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Ammonium, nitrate, phosphore : optimiser les rendements épuratoires

31 janvier 2011 Paru dans le N°338 à la page 52 ( mots)
Rédigé par : Christian GUYARD

L?évolution des normes sur les rejets de stations d'épuration, l'exigence de moins consommer d'énergie lors des processus épuratoires impliquent un fonctionnement optimal des installations. L?aération, étape clé d'une step à boues activées n?est réellement optimisée qu'en suivant au plus près les paramètres représentatifs des réactions biologiques : ammonium et nitrates. L?arrivée de sondes fiables change la donne aujourd'hui, y compris pour les petites stations d'épuration.

Dans un article récent (EIN n° 324 p 67), il était rappelé que plus de la moitié des stations d’épuration françaises (sur un échantillon de 1 251 installations) dimensionnées sur la charge polluante maximale, reçoivent, en moyenne, moins de la moitié de la charge polluante nominale pour laquelle elles sont dimensionnées.

Laure Graveleau, ingénieur à la Direction technique de Degrémont, précise que « dans une journée, le rejet doit être maintenu conforme 24 heures sur 24, alors que la charge varie d’un facteur 1 à 3, voire 4 et les paramètres de fonctionnement sont réglés pour la charge maximale ».

Or, la quasi-totalité des stations étudiées ne disposent que de peu de flexibilité pour adapter leur fonction-

[Encart : Dans une journée, le rejet doit être maintenu conforme 24 heures sur 24, alors que la charge varie d’un facteur 1 à 3, voire 4. Or, beaucoup de stations d’épuration ne disposent d’aucune flexibilité pour adapter leur fonctionnement à la charge effectivement reçue.]

Avec pour conséquence, une surconsommation d’énergie et de réactifs, voire dans certains cas des fluctuations sur la qualité des rejets. Entre des bases de dimensionnement restrictives (point de fonctionnement unique) et le manque de moyens pour moduler et optimiser le fonctionnement des installations, les performances énergétiques ont des marges de progrès conséquentes.

La situation devrait s’améliorer dans les années à venir, plus rapidement que le rythme de construction des stations d’épuration et toucher toutes les tailles d’unités jusqu’à des stations de 10 000 équivalent-habitant. Cette amélioration relève d'une part de la meilleure compréhension des mécanismes d’épuration dans le cadre d'un procédé à boues activées et d’autre part de l'utilisation de sondes fiables, les électrodes ioniques spécifiques ISE, pour la mesure en continu des ions ammonium et nitrates. Amélioration motivée par le souci des exploitants de réduire les consommations énergétiques et de réactifs et par l’exigence réglementaire d’améliorer la qualité des rejets des stations d’épuration.

À l'heure actuelle, dans une station d'épuration à boues activées, environ 60 % de l’énergie est utilisée pour l’aération des bassins, le reste est affecté au traitement des boues et à la désodorisation. « L’aération est nécessaire pour trois fonctions : l’élimination de la pollution carbonée, la respiration des boues, l’élimination de l’azote par les mécanismes de nitrification/dénitrification. La première source d’économie dans une step, quelle que soit sa taille,

[Encart : Ammonium, nitrate : plusieurs principes de mesure Les électrodes spécifiques vis-à-vis des ions ISE sont très prisées puisqu’elles mesurent en continu les concentrations des espèces recherchées, sans consommation de réactif. C’est une mesure potentiométrique de concentration (obtention directe d'un signal électrique) réalisée grâce à une cellule de mesure (électrode de référence et électrode de mesure) située derrière une membrane semi-perméable dont la sélectivité est adaptée vis-à-vis de l’espèce ionique à déterminer. D'où la question des interférences possibles et de l'encrassement de la membrane. Les gammes de mesures sont généralement de 1 à 1000 mg/L et la précision de l’ordre de 5 %, suffisante pour contrôler l’aération. Endress+Hauser propose la mesure optique des nitrates par absorption UV à 214 nm. La mesure de l’ammonium, du nitrate est aussi exigée pour des questions réglementaires, donc avec des méthodes normalisées. D’où l’utilisation d’analyseurs qui travaillent avec des méthodes normalisées, souvent photométriques : une couleur spécifique est obtenue par réaction entre un réactif et un prélèvement dans le milieu. Ces analyseurs ont fait beaucoup de progrès en matière d’automatisation et d'autonomie. C’est le cas de l'UV500, analyseur en ligne développé par Tethys Instruments. Mono ou multiparamètres, l'UV500 permet de mesurer l’ammonium et les nitrates sans réactif et sans interférence, grâce à la spectroscopie UV et à la mesure hautement sélective de l'ammonium en phase gazeuse. Philippe Ribouat de WTW insiste sur l'importance de la phase prélèvement/préparation dont la qualité est essentielle pour un résultat de mesure représentatif. Cette mesure est plus coûteuse qu'une mesure par électrode, mais elle ne répond pas aux mêmes besoins. C'est parfois le seul moyen d'analyse comme c'est le cas pour le phosphate. (NH3 en phase gazeuse), nitrate, NO3, hydrocarbures, couleur,]
[Photo : L’analyseur Alert est proposé par Metrohm en version colorimétrique ou en version ionomètre. Il est livré programmé et préconfiguré pour chaque application spécifique. Il est adapté aux effluents de STEP (chargés) comme aux contrôles de potabilité (sensibilité élevée). Sa mise en œuvre et son entretien restent d’une grande simplicité.]
[Photo : Le nouveau capteur combiné Hach-Lange doté de la technologie ISE (électrodes ions sélectives) a été développé pour la mesure de NH₄ et NO₃ en un même point. Les principales interférences du K⁺ et Cl⁻ sont simultanément compensées par les électrodes ISE, assurant ainsi des résultats fiables 24 h/24.]

« La bonne gestion du taux de boues dans les bassins. Pas la peine de se lancer dans une régulation pointue si la gestion des boues n’est pas bonne » affirme Fabrice Nauleau, Directeur de la Recherche et du Développement de la Saur.

Plusieurs configurations de station existent, avec des bassins dédiés aux phases aérée, anaérobie et anoxique ou un seul bassin avec alternance de phases aérée et anoxie, c’est-à-dire injection ou pas d’air dans le bassin (ou mise en route/arrêt de dispositifs d’apport d’air). Cette alternance est encore largement assurée par des dispositifs à horloge (aération d’une certaine durée plusieurs fois par jour) plus récemment par la mesure de l’oxygène dissous résiduel dans le bassin, et celle du potentiel redox. Si la mesure de l’oxygène reflète bien la situation (aérée ou non), celle du potentiel redox est plus délicate à interpréter : la valeur obtenue est la résultante de tous les couples oxydo-réducteurs présents, entre autres celui de l’azote. La mesure vis-à-vis des espèces azotées est donc indirecte. De plus, les sondes redox sont sujettes à dérive. La régulation dans ces conditions est difficile à caler pour le personnel d’exploitation et peu adaptable aux variations de charge.

« Environ un tiers des besoins d’aération en station sert à l’élimination de l’azote (ammonium et nitrate). La seule mesure représentative de la pollution azotée à traiter est celle de l’ammonium en entrée de station. L’activité réelle des boues pour la nitrification/dénitrification est évaluée par la mesure effective de l’ammonium et du nitrate » explique Samuel Martin, responsable recherche développement Assainissement et environnement au Cirsee (Suez Environnement). Laure Graveleau souligne : « la mesure de ces paramètres a deux objectifs : le suivi de la qualité du traitement d’épuration, et l’utilisation de cette information pour moduler l’aération. L’arrivée de sondes fiables, moins chères, simples et avec très peu de maintenance pour la mesure de l’ammonium et du nitrate marque une rupture dans l’exploitation des steps y compris de faible capacité ». Philippe Ribouat, directeur commercial de WTW, fabricant d’analyseurs, confirme : « Depuis un an, on constate un basculement des mentalités : la mesure de l’ammonium et du nitrate est la bonne voie pour moduler l’aération y compris pour des petites capacités de l’ordre de 10000 EH ».

Des outils fiables et bon marché

Cette optimisation et régulation de l’aération par la mesure directe en continu et in-situ de l’ammonium et du nitrate a fait son apparition en France il y a quelques années. Degrémont lance son système Greenbass™ (pour Biological Aeration Sequenced System) basé sur un algorithme breveté utilisant la mesure en continu ammonium et nitrate pour optimiser les apports d’air (débit d’air fixe ou variable). Dijon en 2010 (400000 EH), Tournus (10500 EH) en 2012 bénéficieront de cette régulation. Veolia Eau propose l’outil d’optimisation de l’exploitation AMONIT™ (exemples à Prades – 66 – station de 15000 EH, St Quentin 150000 EH). Ce système permet à l’opérateur de choisir la qualité d’eau de sortie souhaitée sur les nitrates et l’ammonium et de réduire la consommation d’énergie d’aération. Saur n’est pas en reste avec un développement sur une step de 10000 EH et un autre en cours sur Nîmes où deux files de traitement en parallèle seront comparées l’une avec régulation sur l’ammonium, l’autre classiquement en redox. Ce développement en collaboration avec le Cemagref étudiera finement le mécanisme de dénitrification : « il existe

[Encart : Interférences sur les électrodes spécifiques Les électrodes spécifiques ISE sont sensibles à des interférences. En effet, la sélectivité est réalisée au niveau de la membrane. Celle-ci voit devant elle l’eau du bassin d’aération et tous les ions qu’ils contiennent et qui présentent des ressemblances vis-à-vis des propriétés électriques et de transport : potassium et ammonium ainsi que nitrate et chlorure. Matthieu Bauer d’Endress+Hauser indique des ordres de grandeur : 20 mg/l de potassium correspond à 1 mg/l d’ammonium, c’est-à-dire un apport de 1/20 ; rapport de 1/250 entre nitrate et chlorure. « Dans la plupart des cas, la compensation n’est donc pas nécessaire ». Une orientation non partagée par WTW et Hach-Lange dont les ISE sont systématiquement compensées vis-à-vis du potassium et des chlorures.]
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[Encart : Phosphates, un produit minier La problématique du phosphate par rapport à l’azote (nitrate, ammonium) est qu'il est un produit minier donc une ressource limitée à l’échelle de la Terre. L'azote est disponible dans l’atmosphère et l’ammoniac est synthétisé à partir de gaz naturel (énergie et source d’hydrogène) ; le nitrate s’obtient ensuite par oxydation. De plus, on voit que les bactéries transforment facilement l'ammonium en nitrate. Le phosphate est un produit minier : une fois utilisé comme engrais par exemple, il est dispersé dans la nature, participe à l'eutrophisation, mais n'est plus récupérable (à l’échelle de temps humain). Certaines évaluations évoquent un pic de phosphate, comme le pic pétrolier, qui serait déjà franchi, tout au moins sur les gisements faciles à exploiter ou qui serait à l'horizon 2030. Si la production mondiale continue de croître (161 Mt en 2008) on voit aussi que le prix du phosphate a plus que doublé en dix ans (source USGS), signe d'une certaine tension sur ce minéral. En Europe, pour des raisons d'eutrophisation, le phosphate n'est quasiment plus utilisé dans les lessives. Mais globalement, le monde continue de consommer. Présent dans les eaux résiduaires, et devant être éliminé avant rejet, pourquoi ne pas le récupérer ? C'est d'une certaine manière déjà fait au niveau des boues de step. À tel point que l’épandage de boue est limité sur certaines parcelles en raison d'une teneur trop forte en phosphate. Le précipiter à l'aide de chlorure ferrique pour ensuite le mettre en décharge revient à se priver de cette ressource. On voit déjà de la récupération de matière organique de step pour élaborer des polymères, pourquoi ne pas récupérer le phosphate : des essais sont en cours pour précipiter de la struvite, produit minéral qui pourrait servir d’engrais.]
[Photo : ISA de Bionef accompagné de son électrode ISE NH, permet de mesurer le couple NO3 et NH4 dans les environnements les plus difficiles. Ce spectromètre UV-Vis (190-720 nm) permet à l’utilisateur de réaliser ses propres calibrations, plus des paramètres tels que NO3, OBOB, CODap… La tête de mesure est plongée directement dans le bassin de la step. Plusieurs capteurs peuvent être connectés à la centrale BlueBox, enregistreur transmetteur et du spectromètre UV-Vis ; ISA : pH, conductivité, turbidité, oxygène dissous par électrode ou optode et redox. La sonde de base unifie le process de traitement des eaux usées.]

un risque de former du N2O, protoxyde d’azote ou oxyde nitreux, gaz à fort potentiel d’effet de serre. Il ne faudrait pas que la réduction souhaitable de la consommation d’énergie conduise à l’émission de gaz à effet de serre » explique Fabrice Nauleau. Laure Graveleau précise que lors du développement de Greenbass™, les trois paramètres déter- minants d’évaluation pour une même qualité d'eau traitée étaient la quantité d’énergie d’aé- ration, le protoxyde d’azote et l’indice de boue ; en effet, les boues doivent conser- ver une bonne structure pour ne pas per- dre leurs propriétés à la déshydratation. « Greenbass™ a été développé en ayant en tête la fiabilité globale du système d’épu- ration, la qualité de l’eau et celle de la boue sur une step avec une vision d’exploitant (facilité d'emploi des sondes), et pas de recherche » insiste Laure Graveleau.

Cette nouvelle manière de conduire les

[Photo : Vue du capteur combiné en ligne VarionPlus 700 de WTW pour la mesure en continu des ions ammonium et nitrates.]
[Photo : L’ISEmax CAS 40 d’Endress+Hauser fonctionne directement dans le bassin d’aération de la station d’épuration sans dispositif de prise ou de transport d’échantillons. Le système se compose d’un capteur, d’électrodes et d’un transmetteur avec afficheur et est monté au bord du bassin. Jusqu’à deux capteurs à sélectivité ionique mesurent simultanément les nitrates et l’ammonium dans le bassin d’aération.]
[Encart : La version « potentiométrique » viendra élargir courant 2011 la gamme d’analyseurs en ligne Cristal de Seres Environnement. Les applications concerneront entre autres la mesure de l'ammonium dans les effluents urbains et industriels. L'intégration dans le Cristal apporte : maîtrise des coûts de fonctionnement, maintenance et communication facilitées.]

Installations vaut le coût : au moins 15 % d’économie d’énergie sur l’aération par rapport à une conduite par redox ! Donc un amortissement rapide, de l’ordre d'une année, voire moins pour de grosses capacités.

La conduite de l’aération en épuration biologique par l’ammonium et le nitrate devient donc une évidence, encore fallait-il disposer d'outils fiables et bon marché pour réaliser cette mesure. Plusieurs constructeurs les proposent : WTW, Hach-Lange, Endress+Hauser, YSI représenté par Anhydre.

Les trois grands opérateurs de l'eau que sont Veolia, Degrémont et Saur Stereau ont testé sur plusieurs années les produits de ces trois fabricants et développé leurs algorithmes. Plusieurs générations d’électrodes se sont succédées et améliorées. On trouve des sondes ammonium, nitrate séparées et aussi des dispositifs où les deux sont disposés sur une platine unique puisque certains algorithmes utilisent les deux mesures : la baisse de l'ammonium par nitrification conduit à l’augmentation des nitrates, qui baisseront en phase de dénitrification.

L’arrivée du plug and play

La mesure en continu des ions ammonium et nitrate s’effectue par électrode spécifique. La spécificité est apportée par une membrane, perméable sélectivement aux ions recherchés ; ensuite la mesure est de type potentiométrique. « Les échecs d’il y a quelques années sur ces électrodes venaient du fait que l'on transposait une électrode de laboratoire sur le terrain avec des eaux très chargées, d’où des problèmes d’encrassement » expliquait Philippe Ribouat.

[Photo : L’automate chimique Sentinel Tytronics, distribué par la société Anael, permet le suivi automatique en ligne de divers paramètres, garants de la bonne qualité de l'eau. Ces paramètres sont analysés par potentiométrie (TA/TAC, TH...), par électrode ionique spécifique (ammonium, nitrate...) ou par colorimétrie (chrome, aluminium, fer, manganèse, phosphate, silice, phénol...).]
[Encart : L’analyse en Plug and Play Par principe (loi de Nernst), une électrode spécifique délivre une tension électrique qui est la somme de deux tensions : l'une provenant de la matrice de l'effluent (tous les ions présents dans le milieu), l'autre de la teneur en ions spécifiques, seule grandeur d’intérêt. Utiliser une sonde ou un analyseur qui récupère sans distinction la globalité du signal fourni par l’électrode peut conduire à des dérives, voire des erreurs sur la concentration de l'espèce mesurée, ne générant pas l’optimisation attendue du procédé. Pour contourner ce risque, on peut pratiquer une mesure différentielle : après une mesure simple, on réalise une seconde mesure après ajout d'une quantité connue de l'ion recherché. La différence entre les deux mesures permet de s’affranchir de la matrice et de l’encrassement de l’électrode. C'est la méthode des ajouts dosés. Une sonde simple ne peut fournir ce type de mesure. Jusqu’ici, l'emploi d’un analyseur semblait inadapté à cause du conditionnement d'échantillon à prévoir. Si les orifices de transit sont restreints au millimètre, il faut filtrer l'échantillon. Il existe cependant un système analytique conçu pour véhiculer des effluents chargés : pas de vannes d'entrée, introduction libre dans un vase de mesure via des tubes de 4,8 mm. Autonettoyé à chaque mesure, il réalise la mesure différentielle et délivre une valeur vraie de la teneur en ammoniaque ou nitrate. Un étalon et un tampon sont ajoutés à chaque mesure, réactifs peu coûteux et simples à préparer. L’analyseur Alert 2003 offre ainsi une maintenance minimale, pour un investissement à partir de 8 000 €. Pour les phosphates et l'ammoniaque, lorsque les concentrations ne sont que de quelques mg/L, on peut utiliser la colorimétrie. Les eaux résiduaires étant chargées, il faut des organes à fort diamètre de passage et une mesure différentielle : l'absorbance de l'échantillon est mesurée avant et après développement coloré, seule la différence reflète la teneur réelle. Le colorimètre Alert 2004 garantit ainsi une vraie mesure et donc l’optimisation des procédés qui en dépendent. Berard Fillion – Metrohm France]

Les essais de terrain entre constructeurs de sondes et exploitants ont conduit aux générations actuelles qui sont quasiment « plug and play » (reconnaissance de l’électrode, préétalonnage). Le développement ne s’arrête pas à la sonde ; il concerne aussi sa connectique et la transmission d'information exploitable par les automates de régulation.

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[Photo: Datalink Instruments propose un analyseur d'orthophosphates pour eaux usées : le PHOS 200. Le concept à large tube évite l'inconvénient des bouchages fréquents observés sur les circuits d'analyse à volumes réduits.]

(transmetteurs). C'est finalement ce qui intéresse le personnel d'exploitation : disposer d'un point de mesure opérationnel. « Chez WTW, ces ensembles se nomment VarionPlus 700 IQ pour la sonde combinée et AmmoLyt Plus pour l'ammonium et NitraLytPlus pour le nitrate ; ils disposent d'une compensation vis-à-vis des ions interférents et de la température. Un kit (sonde, câble, transmetteur) pour un ion coûte environ 5 800 €, pour deux ions sur la même platine 6 200 € ; un seul point de mesure suffit pour un bassin » indique Philippe Ribouat qui revendique aussi une certaine avance de sa société sur ce type de capteur. La maintenance est très limitée, uniquement un changement de membrane tous les six mois voire plus. Hach-Lange est dans le même ordre de grandeur de prix pour les versions combinées mais moins cher pour une mesure (ammonium ou nitrate) environ 4 500 € (sonde plus transmetteur) précise Jean-Pierre Molinier qui rappelle qu’un analyseur ammonium type AMTAX (prélèvement, addition de soude et perméation gazeuse) coûte environ 10 000 €.

Endress+Hauser propose aussi des électrodes spécifiques nitrate et ammonium. Matthieu Bauer remarque que si les membranes sélectives conviennent pour les effluents urbains, elles peuvent être altérées par certains produits chimiques, il faut donc être vigilant sur les stations industrielles et mixtes. Dans ce cas, la mesure optique du nitrate par spectrométrie UV à 214 nm (VioMax CAS 51 D) est préférable selon Matthieu Bauer : « il s’agit d'une mesure en continu – 2 flash UV par seconde – sans interférence ionique, mais avec une compensation vis-à-vis de la turbidité du milieu. Ce capteur est aussi plus cher d’environ 40 % qu’une électrode spécifique ». Ce capteur est en technologie Memosens numérique. Hach-Lange et Tethys Instruments proposent aussi cette mesure par UV, à deux longueurs d’onde pour compenser la turbidité.

Les ISE de Endress+Hauser passeront en 2011 à la technologie Memosens (communication digitale), ce qui simplifiera sur le terrain la communication des différents capteurs.

La précision de la mesure par ISE est de l'ordre de 5 % sur la valeur mesurée, ce qui est suffisant pour la conduite de l'aération. Hach-Lange a été un précurseur dans le développement de ces ISE en Allemagne, pays en avance sur la conduite de procédés par l’ammonium et le nitrate. La société propose les sondes NH₄ D sc (lancée en 2007) NO₃ D sc, pour les nitrates et la sonde combinée ammonium et nitrate AN-ISE se

[Encart : Un kit pour doser le phosphate dans les eaux Envolure, jeune entreprise innovante, a développé un kit, ENALYSE-P, pour doser le phosphate dans les eaux. Ce kit, à utiliser directement sur site industriel, se présente en format microplaque 96 puits et permet de mesurer avec précision 96 teneurs en P en quelques minutes de manière simple et flexible à partir de petits volumes d'échantillons. Le kit est disponible pour deux gammes de concentrations : la gamme haute, ENALYSEPGH, de 10 à 250 mg/L (erreur sur la prédiction < 4 %) et la gamme basse, ENALYSEPGB, de 0,05 à 1 mg/L (erreur sur la prédiction < 8 %). Ces deux gammes permettent de répondre d'une part aux besoins analytiques des procédés qui cherchent à maximiser la quantité de P – par exemple la production de struvite – et d’autre part aux besoins analytiques liés au respect des normes. Il est à noter que la norme actuelle fixée à 4 ou 2 mg/L selon les eaux puisse évoluer vers 0,5 mg/L. La lecture du kit se fait à l'aide d'un lecteur de microplaque à absorbance qu’Envolure propose de mettre à disposition de ses clients sous la forme d’un loyer mensuel.]
[Photo: L’analyseur Systea microMac TP+TN commercialisé par Anhydre combine azote total et phosphore total en une seule machine mais chaque paramètre est aussi proposé individuellement. Le cœur de l’analyseur est la boucle de réaction LFA qui permet d’automatiser les processus d'analyse par colorimétrie, en alliant une consommation énergétique faible et des quantités de réactifs réduites. Cette boucle modulaire permet par ailleurs de proposer de très nombreux paramètres depuis les plus simples : nitrates, ammonium... jusqu'au cyanure total en passant par l’hydrazine.]
[Photo: L’Envirolyzer de Mesureo est un analyseur mono-paramètre par colorimétrie, titration ou sonde sélective avec ajouts dosés (NH₄, NO₂, NO₃ et PO₄ ainsi que beaucoup d'autres, sels ferriques...).]
[Publicité : Cannes Water Symposium]
[Encart : texte : Un analyseur séquentiel automatisé assurant rapidité et fiabilité Le principe de mesure séquentielle est adapté aux analyses d’éléments tels que l'ammonium, le nitrate et le phosphate, régulièrement recherchés dans les stations d’épuration. AMS France propose, au travers de sa gamme Smartchem, des appareils qui réalisent automatiquement l'ensemble des opérations d’analyse pour assurer un fonctionnement rapide, fiable et sécurisé. Les Smartchem sont les seuls analyseurs séquentiels équipés d’un système de réduction des nitrates en nitrites sur colonne de cadmium. Le Smartchem 140, analyseur multiparamètres de dernière génération, associe un logiciel de contrôle à un système robotisé, permettant de réaliser jusqu’à 140 tests par heure. Il suffit de placer les échantillons, les réactifs et une solution étalon pour chaque paramètre. Ensuite, tout est automatique : dilution, mélange, mesure et rinçage. Grâce à cette automatisation du process de mesure et à l'utilisation de techniques d’analyse normalisées, toutes les stations d’épuration peuvent s’équiper d'un appareil séquentiel aux performances élevées, jusque-là réservé aux laboratoires externes. En plus de l'ammonium, du nitrate et du phosphate, l'appareil est également capable de mesurer de nombreux autres paramètres recherchés tels que : silicate, nitrites, chlore, sulfate, ammoniaque, chrome… et ce, sans aucune préparation de l'échantillon. Avec un coût d’investissement moyen de 30 000 €, le Smartchem 140 reste compétitif grâce à l'utilisation de kits de réactifs, packagés, testés et commercialisés par AMS France. Ces kits, livrés au format liquide en flacons, sont directement positionnables dans le porte-échantillon du Smartchem 140. « Nos kits de réactifs prêt-à-emploi permettent d’accélérer, de sécuriser et de simplifier la préparation et l’analyse des échantillons. À l'usage, nous constatons des coûts moyens par test de seulement quelques centimes d'euros » explique Laurent Clousier, Directeur Général d'AMS France.]
[Photo : technologie Cartical avec transducteur de type sc]

Les méthodes traditionnelles : un capital d’expériences

Les électrodes ISE arrivent en concurrence avec les méthodes existantes pour lesquelles les exploitants ont beaucoup d’expérience, comme le souligne Samuel Martin, Suez environnement (Cirsee). L'introduction de nouvelles méthodes se heurte aux habitudes. Elles entreront d’autant mieux dans la pratique qu’il y a moins d’habitudes. Leur coût moindre les favorise, notamment par rapport aux analyseurs qui utilisent des réactifs et nécessitent une maintenance relativement importante (bien que tous les constructeurs améliorent les analyseurs) et un personnel plus qualifié. Ces analyseurs en ligne sont proposés par ABB, Seres Environnement, Endress+Hauser, Mesureo, Environnement SA, Macherey Nagel, Anael ou Proanatec utilisent le plus souvent la photométrie après une réaction spécifique produisant un composé coloré dont la concentration est corrélée à celle de l’espèce analysée. Datalink Instruments propose un analyseur combiné compact, l’Ammonit 200, qui mesure à la fois les nitrates et l'ammonium par spectrométrie UV et éventuellement les sulfures sans interférence due aux ions K+ ou Cl-. La mesure de l’ammonium et des sulfures est insensible à l'encrassement même en eaux industrielles.

C’est notamment le cas pour le phosphate et même la seule méthode utilisable (pas d’électrode spécifique pour l’instant). De plus, il existe plusieurs formes de phosphates : orthophosphate et phosphore sous d’autres formes. On trouve du phosphate libre en solution (orthophosphate) dosable directement sur l’eau filtrée, et du phosphate lié à la matière organique déterminé après minéralisation de l’échantillon ; on détermine alors le phosphore total. D'où deux méthodes, la jaune (vanadate-molybdate, coloration mesurée à 380 nm) et la bleue pour le phosphore total (bleu de molybdène mesuré à 880 nm). Pour la détermination du phosphore total, il ne faut pas filtrer puisqu’une partie du phosphore est localisée en partie dans les particules.

WTW propose le TresCon® OP 210 pour la méthode jaune et le TresCon® 510 pour la méthode bleue avec unité préalable de minéralisation. Les plages de mesure vont de 0,05 mg/L à 25 mg/L avec une précision de 2 %.

Hach-Lange propose le Phosphax. « Cet appareil de dernière génération consomme très peu de réactifs qui sont très stables. En faisant une mesure toutes les 5 min l’autonomie est de 4 mois et passe à un an pour une mesure par quart d’heure. Un an sans entretien (les pompes péristaltiques ont disparu) si ce n’est la vérification régulière de la partie prélèvement » insiste JP Molinier.

Datalink Instruments propose un analyseur d’orthophosphates pour eaux usées : le PHOS200. Le concept à large tube évite l’inconvénient des bouchages fréquents observés sur les circuits d’analyse à volumes réduits. Chez Endress+Hauser l'analyseur de phosphate est le Stamolys CA 71 PH, celui d’ammonium est le CA71AM. Chez Anael, l’analyseur de phosphate ou d’ammonium est la série Sentinel.

Au niveau des stations d’épuration, la mesure la plus fréquente est celle des orthophosphates. C’est une mesure qui revient en vogue soulignent plusieurs interlocuteurs : « ceci pour la France car ailleurs en Europe cette mesure est très pratiquée, nous vendons plusieurs centaines d’appareils en Europe et seulement une dizaine par an en France » indique JP Molinier. Il y a certes des restrictions réglementaires vis-à-vis des rejets (2 mg/L voire moins en zones sensibles) pour éviter l’eutrophisation, mais les exploitants veulent d’abord réduire la consommation des réactifs. En effet, s’il est possible de réduire les quantités de phosphate par la biologie (et sans réactif), la voie la plus simple est la précipitation à l’aide de sels ferriques. Pour être sûr que le phosphate est bien éliminé, les exploitants ont tendance à surdoser le réactif avec pour inconvénient la surconsommation (coûts de réactifs et de transport). Des essais menés sur la station d’Evry (250 000 EH) par la Lyonnaise des Eaux en mesurant le phosphate à l’entrée de la step, ont conduit à une baisse de 30 % de la consommation de réactif ; ce qui représente 210 t/an en moins !

Reste qu’on peut améliorer l’élimination du phosphore notamment pour les stations de 2 000 à 20 000 EH comme le mentionne Fabrice Nauleau. « Nous avons développé une offre que nous proposerons courant 2011. Ce sera une offre “à tiroirs” qui s’adaptera en fonction de la taille des stations. Même les stations modestes pourront faire de la déphosphoration ».

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