L?étude in situ Tarn, réalisée de 2008 à 2014, a rendu son rapport final aujourd'hui. Cet article propose un résumé des enseignements essentiels et esquisse les perspectives permettant à l'ANC de progresser sur ses terres traditionnelles. Première mondiale : des informations collectées sur le terrain et six années durant nous permettent de mieux comprendre pourquoi cette forme d'assainissement peine autant à s'installer sur nos territoires et à gagner la confiance des propriétaires. La solution du bon développement des produits avant leur mise sur le marché est duplicable et sûrement positive pour la planète.
Première mondiale : des informations collectées sur le terrain et six années durant nous permettent de mieux comprendre pourquoi cette forme d’assainissement peine autant à s’installer sur nos territoires et à gagner la confiance des propriétaires.
La solution du bon développement des produits avant leur mise sur le marché est duplicable et sûrement positive pour la planète.
Quelques mois après avoir lancé la plus vaste étude jamais entreprise sur la réalité du fonctionnement de filières de traitement des eaux usées issues de maisons individuelles, l’équipe constituée, à la lumière des premiers constats tant analytiques que de fonctionnement, s'est interrogée sur la réalité des pollutions que ces ouvrages testés devaient traiter.
Six années plus tard, les nouvelles connaissances acquises ont mises à mal des certitudes sur le fond de notre métier, centré sur le traitement de la pollution. Ce « petit assainissement » doit traiter des eaux usées issues de familles pourtant semblables à celles dont la pollution est traitée avec satisfaction par le « grand assainissement » appelé plus souvent « assainissement collectif ».
Un petit détail a échappé aux experts depuis des décennies : la qualité des eaux usées brutes « collectives » se mesure à l’entrée des unités de traitement, soit à l'aval de longs réseaux de canalisations. Fréquemment, ces eaux usées se trouvent mélangées à des eaux parasites (nappes, intrusions d’eaux pluviales) ; elles empruntent des tuyaux dont la pente peu inclinée permet la décantation d'une partie des MES.
Ces eaux usées, dès le début de leur parcours vers le site de traitement, profitent de la présence d’oxygène.
Au final, les caractéristiques quantitatives et qualitatives de la pollution à traiter diffèrent entre l’assainissement collectif et le petit assainissement là où les principes des traitements sont les mêmes, quelle que soit la taille des systèmes épuratoires : cet aspect essentiel n'est pas vraiment pris en compte aujourd’hui.
Les travaux que cet article va essayer de synthétiser constituent pour le lecteur le début d'une nouvelle ère de l’assainissement des eaux usées issues de maisons
individuelles. Construisons une meilleure protection de l'environnement en oubliant les erreurs passées : tout au plus un manque de recul, voire une coordination trop succincte des différents acteurs de l'ANC.
Une personne à considérer :
le propriétaire de l'installation
Lorsqu’une famille envisage l’achat d’un véhicule, il est très courant que tous, des enfants aux parents, soient associés à cet acte d’achat. Chacun cherche la satisfaction de ses propres souhaits et envies face à un choix dont les offres sont attestées conformes à la réglementation en vigueur par la carte grise. Les professionnels du marché basent leur argumentaire sur les critères différenciant leur produit de la concurrence, par rapport aux exigences qu’ils ont cru détecter chez les membres de la famille. Ils ne proposent pas un coupé sport à une famille comptant quatre enfants voulant se promener par les chemins ; de même, les différents composants de leur véhicule doivent être entretenus, sous leur responsabilité, en particulier dans le cadre de garanties précises directement assumées par eux. Cette démarche constitue l’essentiel des actes d’achat de notre vie quotidienne.
Pourquoi, dans ce contexte, l'ANC échappe-t-il à cette logique de bon sens ?
Pourquoi :
- un couple de retraités doit-il absolument construire son assainissement individuel incluant les 5 chambres de sa maison alors qu’il n’en aura qu’un usage très occasionnel (quelques jours par an), usage auquel aucune technologie ne saura répondre ?
- autant de services publics d’assainissement non collectif n’apportent aux propriétaires contrôlés aucune garantie sur l’équipement de traitement de leurs eaux usées qu’ils viennent d’installer ?
- en réalité, un propriétaire qui installe un « ANC » ne dispose-t-il en fait d’aucune garantie de son fournisseur d’équipement et de son installateur, ces derniers s’étant auto-protégés par des guides d’installation et de fonctionnement validés par la France ?
- une réception de travaux ne doit-elle pas obligatoirement conclure la phase d’installation de l’équipement ?
- ce manque d'information autour de l’exploitation indispensable des ouvrages installés, sachant qu’aucune garantie (si par hasard elle est prévue à l’origine) ne s’appliquera dès lors que l’utilisateur aura « bricolé » son équipement ?
De fait, malgré un investissement initial moyen de 10 000 €, auquel il faut ajouter un coût annuel de 400 à 1 000 €, chaque utilisateur est bien démuni.
Comment alors, ne pas comprendre les réserves émises par les élus ou les associations de consommateurs ? Le propriétaire est le seul absent des réunions où sont traitées la réglementation, voire la normalisation ? Il faut redonner aux propriétaires le pouvoir afin que la qualité, l’efficacité, la fiabilité et la robustesse de leur investissement soient une réalité.
Dire que plusieurs centaines de dispositifs d'ANC sont agréés ne signifie rien si cette information n’est pas complétée par des critères différentiels, permettant un choix réel, accompagnés de garanties claires et de conditions d’installation, de réception et d'utilisation validées par des tiers responsables.
Un décret de décembre 2002 déclare une habitation insalubre si elle n’est pas équipée d'un système d’assainissement, ne l’oublions pas. Qu’est-ce qui bloque l’expansion de ce « petit assainissement », pourtant synonyme d’une vie meilleure dans une nature plus protégée ? Il devrait être perçu comme une nécessité vitale, il est reçu comme une contrainte futile. Et s'il fallait simplement associer l'utilisateur et le propriétaire à son caractère indispensable pour « vivre plus sainement » ?
Un dispositif ANC de qualité, qu’est-ce que c’est ?
Depuis près d’un siècle, l'ANC est réglementé. Depuis les années 1920, cette réglementation exige un traitement secondaire ; les hygiénistes d’alors avaient une vision réaliste de ce qui devait être fait pour lutter contre les épidémies. Depuis cette époque, on pourrait même avancer que rien n’a bougé sur le fond réglementaire.
De fait, le vrai changement, apparu depuis quelques années, est une forte pression industrielle de fournisseurs d’équipements ANC qui, « prévoyant » une explosion du marché dans les pays développés, ont essayé de structurer leur offre tant via les réglementations nationales que via les organismes de normalisation.
Au plan technique, malgré diverses démarches nationales, la constante générale consiste à profiter de cette situation de développement pour tenter de rester chacun maître sur son territoire. La mise en avant de particularités technologiques nationales (liées à ses propres industriels et organismes spécialisés) a été préférée à l’approche scientifique pure de la meilleure solution dans l’intérêt du consommateur. La normalisation européenne a également succombé à ces travers non scientifiques. Les concessions réciproques lobbyistes ont supplanté une structuration rationnelle du domaine dans une Europe vraiment respectueuse de l'environnement. En 2015, on voit ainsi un produit comme le Jokhasou (Japon) proposer, de par son développe-
ment rationnel et pragmatique, une exploitation performante et des résultats sur les eaux traitées le plaçant au niveau de ses meilleurs concurrents.
Selon moi, un dispositif ANC de qualité est un équipement qui traite les eaux usées sans défaillance entre des passages annuels d’exploitation en rejetant dans l’environnement des eaux traitées compatibles avec les exigences réglementaires nationales. En situation courante, on pourrait fixer les niveaux respectifs de la trilogie MES/DBO₅/DCO à 30/35/125 mg/L.
On peut y ajouter d’autres exigences quant à l’azote ou le phosphore, le niveau technique des équipements permet aujourd’hui de satisfaire aux exigences de ces paramètres.
Le point le plus épineux concernant les équipements ANC est celui de leur fonctionnement « autonome ». Ceci concerne toutes les filières, même celles dites « traditionnelles », susceptibles de traiter vraiment les eaux usées et non celles qui ne font que les enfouir. Après examen sérieux in situ, elles s’avèrent tout aussi fragiles que celles fonctionnant à l’énergie électrique.
En fait, tout dispositif repose sur une succession de phases de traitement, et le « fonctionnement autonome » est en fait dépendant de sa phase de traitement la plus délicate. C’est à ce niveau qu’intervient l’effet du « DÉVELOPPEMENT » d’un produit, cette période au cours de laquelle le dispositif est fortement sollicité, afin d’appréhender ses points faibles successifs : le « DÉVELOPPEMENT » y porte remède. Il a pu sembler facile à de nouveaux industriels de fabriquer un dispositif en assemblant cuves et tuyaux mais sans « DÉVELOPPEMENT », leur équipement, même agréé, reste médiocre.
Les travaux conduits sur 6 années dans le Tarn ont nettement mis en évidence l’incontestable supériorité, au plan de « l’autonomie de fonctionnement », d’équipements issus de toutes les familles de process, qu’il s’agisse de filtres Premier Tech Aqua, Eparco, de SBR Sotralentz ou des cultures fixées du Jokhasou d’Housetec.
Cette autonomie de fonctionnement se mesure en outre sur la totalité d’un ouvrage, depuis le point d’entrée des eaux usées brutes de la maison individuelle raccordée jusqu’au retour des eaux traitées dans le milieu naturel. À ce titre, la réception des travaux après installation est un facteur essentiel du fonctionnement autonome de l’équipement d’ANC. Toute erreur d’installation, d’apparence bénigne, par exemple une pente insuffisante, peut s’avérer ensuite un point de blocage de l’ensemble de la filière.
Souvent, l’utilisation d’énergie électrique est présentée comme rédhibitoire pour un équipement ANC. Même s’il est exact que s’en affranchir élimine un souci pour les décennies de fonctionnement à suivre, il faut être conscient d’une part que les sites d’installation où l’on peut éviter tout relevage de l’ouvrage ne représentent qu’un tiers des cas rencontrés, et d’autre part que l’argument économique souvent annoncé est totalement fallacieux : la dépense annuelle avoisine la centaine d’euros.
En 2015, enfin, un dispositif de qualité doit voir ses informations majeures de fonctionnement reliées à un central d’alertes, raccordé à la structure d’exploitation choisie par le propriétaire. L’expérimentation d’alarmes sur site a montré ses limites : le plus souvent, l’équipement est mis en panne par le propriétaire car l’alarme elle-même déclare des pannes inexistantes.
Les eaux usées à traiter, quelles sont-elles ?
Avant les travaux in situ réalisés dans le Tarn, la conviction générale des « spécialistes » reposait sur une uniformité des caractéristiques des eaux usées domestiques brutes, qu’on les retrouve en entrée d’une unité collective de traitement des eaux usées ou à la sortie d’une maison individuelle. Pour preuve, tous les essais de type relatifs au marquage CE issu de la norme NF EN 12566-3 + A2 (où tous les agréments nationaux de produits, quelle que soit la voie d’essais choisie) s’appuient sur cette vérité : « la concentration en MES de l’eau usée brute à traiter est de 300 mg/L, celle de la DBO₅ de 300 mg/L, celle de la DCO de 600 mg/L tandis que le volume par habitant est de 150 L/jour ».
Les charges organiques quotidiennes, sur sept jours de pollution par habitant, sont de l’ordre de 60 grammes de DBO₅, en milieu rural comme en milieu urbain.
De ce fait, les concentrations moyennes quotidiennes sur sept jours, mesurées à la sortie des maisons individuelles pour la trilogie « MES/DBO₅/DCO » sont respectivement de 504/633/1512 mg/L.
Concernant l’azote, l’intégralité de l’azote ammoniacal est traitée dans la seconde partie du processus, soit à une concentration de 115 mg/L. Quant au phosphore total, sa valeur moyenne est d’environ 20 mg/L après abattement en décantation primaire.
La directive européenne sur les eaux usées de 1991 définit la charge organique à traiter. Le flux organique de pollution traité par les ouvrages est un volume réduit de plus d’un tiers. Il convient de noter que cette situation n’est pas propre à la France ; les quelques mesures opérées par nos soins dans d’autres pays européens montrent des résultats tout à fait similaires à ceux enregistrés dans le Tarn.
Notez que, pour mesurer cette charge organique moyenne sur sept jours, il est indispensable de mesurer les valeurs de la pollution organique du samedi et du dimanche.
Ces deux jours montrent une plus forte pollution, impactant de 20 % la moyenne journalière de la semaine.
Même si le flux de pollution organique moyen par habitant, repris par la directive européenne ERU de 1991, paraît pertinent avec 60 g/jour/EH, les textes européens et français ne tiennent aucun compte dans le fonctionnement du « petit assainissement » des variations journalières du flux de pollution : sur une période de sept jours, ce flux de pollution oscille régulièrement entre 3 et 4 entre ses valeurs maximale et minimale, en choisissant un intervalle percentile 10/90.
Ce point n’est pas sans conséquences sur la réalité de fonctionnement des ouvrages puisqu’il peut amener à fonctionner des ouvrages prévus pour une charge organique minimale de 300 g/jour de DBO, à des valeurs nettement supérieures, de l’ordre de 575 g/jour de DBO, (charge organique manifestement non vérifiée sur les ouvrages agréés du marché).
Pour mieux cerner les performances demandées aux traitements secondaires des ouvrages, il est utile d’examiner les caractéristiques des eaux usées issues des fosses septiques testées in situ dans le Tarn, destinées au prétraitement des eaux usées domestiques brutes et installées en amont des dispositifs de traitement secondaire. Les tests réalisés montrent pour un percentile 75 sur la trilogie MES/DBO/DCO des résultats respectifs de 170/310/760 mg/L (valeurs mesurées sur 31 dispositifs), soit des concentrations en entrée du traitement secondaire rappelant celles des eaux usées brutes sur les plateformes des laboratoires d’essais européens notifiés.
Vers une reconnaissance mondiale unique des produits…
À la lumière des nouveaux résultats apportés par les études 2008/2014 de 66 sites du Tarn, le sujet des essais européens de Petites Installations d’Assainissement sur plateforme notifiée mérite une réflexion rénovée.
La norme NF EN 12566-3 + A2 a créé des essais sous la pression des seuls fabricants, validés par des experts universitaires manquant d’une réelle expérience terrain, et donc dépourvus de véritable connaissance des eaux usées domestiques brutes issues d'une maison individuelle. Les résultats obtenus sont manifestement insuffisants pour qualifier les produits en termes de robustesse, de fiabilité, de sécurité de fonctionnement ou de performances épuratoires transférables en situation réelle.
La recherche des rendements épuratoires, telle que décrite dans le marquage CE, n'est pas validée par les essais sur plateforme actuels. Or, ce sont sur ces résultats d'essais que la réglementation française a construit ses exigences pour l'attribution d'agréments français. Il faut revoir ce dossier en y faisant figurer tous les éléments techniques en notre possession.
La réflexion technique visant à atteindre, lors d’essais significatifs, des qualités réelles de produits, doit intégrer l'ensemble des connaissances, y compris celles acquises hors de l’espace européen. Il y va de l'intérêt de TOUS les ACTEURS du domaine de l’ANC que d’intégrer le maximum de connaissances disponibles. Il serait absurde de considérer que des individus en Chine, aux U.S.A, en Russie, au Canada, au Japon ou en Europe polluent différemment. Notre société est définitivement mondiale ; le temps où le yoghourt n’était consommé qu’en Bulgarie est révolu.
Les essais de produits sur lesquels sera marqué CE, ISO ou autre doivent être les mêmes partout. Comme expliqué précédemment, les vraies eaux usées brutes sont très variables en qualité. Aussi, le recours à des eaux usées artificielles normalisées, toutes fabriquées selon une même recette, permettra d’obtenir de vraies comparaisons, lors d’essais strictement identiques, pour des produits destinés à une même mission de traitement d’eaux usées brutes issues de maisons individuelles.
Enfin, avec l’éclairage des études in situ du Tarn, des essais sur site peuvent compléter des essais de traitement sur plateforme, sous réserve de les orienter vers la réalité de la fonctionnalité de l'exploitation : une réflexion est à conduire très rapidement sur ce sujet.
En effet, chaque maison individuelle constitue un cas particulier. En voulant utiliser l’in situ pour juger de la qualité des eaux traitées par un type donné de dispositif, cela nécessiterait (pour avoir une signification scientifique réelle) la réalisation de plusieurs centaines, voire plusieurs milliers, de suivis pour un même type de dispositif ; ce qui ne semble ni utile, ni justifié, sauf à considérer un process totalement innovant ne ressemblant à aucun autre. La démarche serait alors du « DÉVELOPPEMENT ».
Le vrai challenge de cette indispensable mise à plat des essais est que dans un marché du « petit assainissement » dépressif, il faut dégager une véritable volonté de dynamiser une meilleure protection de l’environnement.
Ceci peut s’obtenir, sans doute, en dépassant l’exigence réglementaire ou le consen-
sus normatif, en valorisant les qualités et performances des produits qui peuvent s’en prévaloir et ce, dans la saine information du consommateur.
Notre monde évolue, les eaux usées à traiter aussi...
En tout état de cause, rien ne sera jamais acquis en termes de caractéristiques des eaux usées domestiques brutes. La partie de la pollution liée aux produits d’entretien et de nettoyages divers ne cessera de se modifier au cours des années prochaines.
Les industriels fabriquant ces produits recherchent des formules toujours mieux ciblées sur les tâches à accomplir. Ils font en sorte de capter leurs clients par des actions de marketing liées aux tendances nouvelles qu’elles soient appelées « bio », « produits verts », « efficacité industrielle appliquée à la maison » ou exposant d’autres « supposées qualités vis-à-vis de l’environnement ».
Dans ce contexte de « prise de conscience humaniste » de la nécessité de sauvegarder notre planète pour nos enfants, la réflexion reste superficielle. Le citoyen a une croyance quasi religieuse en ces affirmations, sans même se demander si ces nouveaux produits d’hygiène ou de nettoyage si performants ne pourraient pas avoir d’effets néfastes.
Quelques études ont été conduites sur ce que sont ces nouveaux produits qui nettoient aussi bien et renforcent nos efforts pour une propreté toujours meilleure. Mais l’industrie va plus vite que les études et les produits sont consommés sans que les vraies conséquences sur les eaux usées soient sinon connues, du moins à minima envisagées. La croyance répandue est que quelque chose qui nettoie, voire assainit, ne peut être sale, et ne peut donc nuire à l’environnement.
Les études in situ conduites dans le département du Tarn de 2008 à 2014 montrent combien les produits d’hygiène corporelle, ou de nettoyage divers dans une maison, peuvent accroître de façon très forte la pollution émise par cette maison, jusqu’à en constituer la part prépondérante.
L’étude spécifique menée sur les produits lessiviels utilisés dans la maison (sur une base de 3 personnes) montre que la quantité de DBO rejetée dans ses eaux usées peut atteindre une moyenne de 192 g/jour sur des mesures réelles de terrain portant sur une trentaine de cas. Même si cette valeur ne vaut pas pour l’ensemble des utilisateurs, elle mérite de s’interroger sur le contenu réel de ces « super produits » et sur les quantités utilisées par les ménages. Une évidence doit être soulignée : si un produit de nettoyage contient beaucoup de principes actifs dans un faible volume, il faut en utiliser peu et sans doute abandonner ses habitudes nées d’années d’utilisation de nettoyants, pour une efficacité notoirement plus faible nécessitant la mise en œuvre de volumes plus importants.
Le tableau ci-dessous nous montre les pourcentages de chaque poste de pollution (en ne prenant en compte que les pollutions dues aux produits utilisés), pour un panel de produits d’hygiène et de nettoyage choisis au hasard.
Tableau : proportions des pollutions dues aux produits sur la pollution totale
Type de produits : | Proportions de la pollution totale |
---|---|
- Vaisselle : | 0,1 % – 2,5 % |
- Linge : | 1,6 % – 34 % |
- Ménage : | 0,6 % – 2,5 % |
- Hygiène corporelle : | 1,6 % – 12 % |
- TOTAL : | 5 % – 51 % |
Le constat simple et factuel est de dire qu’une part importante de la pollution en DBO, rejetée par nos maisons provient uniquement des produits que nous utilisons, en particulier pour le lavage de notre linge et pour notre hygiène personnelle, part qui peut représenter jusqu’à 50 % de la quantité totale de DBO de nos eaux usées. Ce chiffre est la fourchette haute de l’ensemble des résultats que nous avons obtenus, avec l’utilisation des produits les plus polluants, du panel retenu de façon aléatoire, tous confondus.
Cet exemple illustre que notre constat de pollutions organiques quotidiennes, sur une période de sept jours, très supérieures à 60 g/jour, est tout à fait plausible dans le contexte actuel d’une vraie vie familiale. Il est important d’engager une réflexion sur ce thème de la pollution supplémentaire, ajoutée à la pollution humaine naturelle, car rien ne dit que l’usage des « produits verts » ou le fait de jeter dans la cuvette des toilettes les supports cylindriques de papier hygiénique constituent des actes écologiques permettant de mieux protéger notre planète. Par ailleurs certains produits industriels d’hygiène et de nettoyages divers se sont révélés moins polluants que les autres. C’est à la Société d’établir les règles indispensables, dans la mesure où ce sujet pourrait ne pas avoir été pris en charge par l’Industrie.
Lutter contre la pollution n’est pas uniquement la traiter, mais avant tout en réduire l’émission à sa source, en ajustant les compositions des matières premières et en éduquant l’utilisateur sur les pratiques d’usage.
Conclusion
Premier constat, après six années d’observations sur le terrain du comportement de l’ANC, tout cela est très rassurant : près de 90 % des mesures de qualité des eaux traitées par un panel de 22 produits différents respectent la réglementation française sur des échantillons 24 heures.
Toutefois, cet excellent bilan, obtenu dans des conditions d’exploitation telles que des passages trimestriels, ou sur alerte par le propriétaire, ou sur alerte à distance automatisée, est à reconsidérer. En conditions habituelles de fonctionnement, seules 2 filières sur 3 auraient été opérationnelles à un an. Une sur trois l’aurait été à cinq ans. L’exploitation régulière de ces ouvrages est un sujet majeur qui, en 2015, n’est pris en compte ni par le marquage normatif, ni par la réglementation, quel que soit le pays, qu’il y ait en place des agréments nationaux ou pas.
En fait, pour un produit devant traiter les eaux usées issues de la maison individuelle, le maître mot est « DEVELOPPEMENT ». Une filière de qualité ne dépend pas d’un bon ou d’un mauvais process, mais du travail réalisé sur la résorption des points faibles du process quel qu’il soit, pour atteindre une fiabilité et une robustesse autorisant une pérennité de fonctionnement. Même s’il est exact que certains process présentent moins d’embûches que d’autres dans leur fonctionnement, la preuve est faite que le process « autonome » dans son fonctionnement ne peut exister sans un « DEVELOPPEMENT ».
Le terrain nous montre aussi que le propriétaire est « l’oublié » dans la chaîne d’acteurs de l’ANC. C’est lui qui endosse toute la responsabilité pour en retour n’avoir
Aucune garantie.
Mal informé avec des produits tous munis d'un agrément (dont la valeur est de fait celle du plus mauvais d’entre eux), il doit s’en remettre à sa propre étoile pour rencontrer un industriel vraiment qualifié, pour détecter un installateur compétent en sachant que la brassée de documents sous laquelle on va le noyer lui interdira, en cas de souci, de faire valoir sa bonne foi : à un moment il n’aura pas respecté l’alinéa 12 de la page 52, ce qui sera la cause de ses ennuis.
Il serait inopportun de faire reposer sur le contenu de la réglementation la responsabilité de cette situation. Sur le fond, la réglementation représente le minimum à respecter. C’est aux industriels de proposer et de valoriser ce qui différencie et met en avant leurs produits. Regardons le marché automobile : nul industriel ne mettrait en avant d’avoir passé avec succès le contrôle du Service des Mines ; c’est la base même de ce qui leur permet de faire exister leur modèle, pas la base de la promotion de leur produit. Le marché de l’ANC doit beaucoup progresser sur ces aspects, sous peine de stagner dans la médiocrité, amalgamant dans un « raccourci destructeur pour le marché » à la fois le coût élevé d'un produit « X » qui peut être excellent avec le dénuement technique d’un produit « Y » sans développement mais avec « X et Y — tous les deux titulaires d’un agrément « identique ».
Le terrain nous explique aussi qu’installer « professionnellement » des produits est encore trop souvent une illusion. La réception officielle et parfaitement cadrée d'un chantier est indispensable, au moins autant que l’exploitation professionnelle par de seuls spécialistes de tous les ouvrages installés. Là encore, les industriels doivent être clairs sur ces démarches.
Les « plus responsables » doivent refuser de vendre à n’importe qui n'importe quoi, en laissant installation et exploitation être faites n’importe comment.
Inutile d’insister sur l’énorme claque prise en pleine figure par chacun de nous sur notre ignorance commune de ce qu’étaient les eaux usées, les vraies, celles sorties des maisons... Était-il encore fallu que les experts descendent sur le terrain ! Depuis dix ans que je suis l’ANC, les dizaines de réunions annuelles eussent sans doute plus souvent dû se tenir dans des cabanes de chantier. Mais seul demain est important. À ce titre, il faut que ces enseignements de terrain ne soient pas un aboutissement mais une plateforme de lancement d'une démarche nouvelle de suivi de tout ce qui a lien avec l’ANC : qu'il s’agisse des évolutions inévitables des eaux usées, des validations des performances des produits avec des méthodes mondialisées, des protections des consommateurs qui s’ouvriront à ces outils de sauvegarde de la planète pour leurs enfants, à la seule condition qu’on leur donne confiance dans un acte responsable dont la maîtrise leur sera accessible.
La réglementation ne doit plus être un refuge, mais un tremplin. Choisir sa voiture se fait dans l'allégresse familiale, l’acte d’achat de l’ANC doit demain atteindre ce même objectif. Si nous le voulons, nous le pourrons, tous ensemble.