Your browser does not support JavaScript!

Assainissement : l'alternative des réseaux ramifiés sous pression

30 novembre 2007 Paru dans le N°306 à la page 121 ( mots)
Rédigé par : Julie DOINEL

Les réseaux ramifiés sous pression sont une solution alternative à la mise en oeuvre d'un assainissement traditionnel. Moins chère à l'investissement, elle reste pourtant une technique encore peu connue en France.

En Isère, dans le domaine universitaire de Saint-Martin d'Hères et Gières, Sade a par exemple

[Publicité : APS France SAS – Flowtite]
[Photo : Sur un réseau ramifié sous pression, des postes de relevage équipés d'une pompe dilacératrice sont installés chez le particulier. Un raccordement de faible diamètre (63 mm) est alors suffisant pour acheminer les eaux vers un collecteur commun de même dimension.]

Procédé à la réhabilitation d'un réseau d'assainissement gravitaire situé à grande profondeur, dans une zone rocheuse, dans la nappe phréatique, présentant de graves désordres (ruptures, contre-pentes, obstructions, ...) en y substituant un réseau sous pression, équipé d’aéro-éjecteurs. La technique du réseau ramifié sous pression (RRSP) fait partie de ces solutions alternatives. Moins chère à l'investissement, elle tente de se faire une place parmi les autres techniques proposées.

Une solution alternative économique

Guy Polvé, chargé de mission dans l’assistance à maîtrise d’ouvrage à la DDE d’Eure-et-Loir, est à l’origine du développement du RRSP en France. « Depuis 1986, j'œuvre à développer cette technique alternative peu connue dans l'Hexagone », explique-t-il. Travaillant en Beauce, il connaît bien le problème d'une topographie caractéristiquement plane, « qui implique de creuser en profondeur pour la mise en place de réseaux gravitaires et qui pose des problèmes au niveau de l'entretien des réseaux », poursuit-il. Son engagement pour le développement de cette technique est né de son retour d'expérience. « Sur les nombreux kilomètres de réseaux gravitaires que j'ai déjà installés, je peux vous affirmer que ceux-ci fonctionnent souvent à seulement 2 % de leur capacité. Cela s'explique du fait de la faible pente et d’un diamètre de canalisation excessivement élevé : 200 mm, une obligation pour tout réseau installé dans le domaine public », regrette-t-il.

Sur un RRSP, des postes de relevage équipés d'une pompe dilacératrice sont installés chez le particulier. Un raccordement de faible diamètre (63 mm) est alors suffisant pour acheminer les eaux vers un collecteur commun de même dimension. Et du fait de ce diamètre réduit de canalisations, l’installation garantit d’importantes économies au niveau des coûts d’investissement : un des principaux avantages de cette technique.

Finalisé en mai 2005, le chantier de Bréville fait partie des premières applications RRSP en France. Comparativement à un réseau gravitaire ou à la solution alternative du réseau sous vide, le choix de la solution retenue a permis de faire réaliser près de 38 % d’économie. Le montant des travaux s’élevait au total à 536.360 € TTC comprenant les réseaux sous pression, la station d’épuration ainsi que la fourniture des postes d’injection, les canalisations et les accessoires chez les particuliers. La pose des postes a été effectuée en régie par la commune. Pour ce projet innovant, la collectivité a reçu un soutien global à hauteur de 80 % (Agence de l’eau Adour Garonne, Conseil général de la Charente et Fonds européen d’orientation et de garantie agricole). En général, les aides attribuées sont habituellement à la même hauteur que pour un réseau traditionnel, le coût de la pompe restant à la charge de la collectivité. En outre, la facture d’électricité issue de la pompe revient à la charge des particuliers comme le financement du branchement à son habitation et de l’armoire de commande. Même si le coût de la facture reste faible, « cette implication des particuliers est la garantie d'avoir des eaux saines dans le poste de relevage, car ils sont souvent moins tentés de raccorder leurs eaux de gouttières par exemple », estime Guy Polvé. À Bréville, la commune a profité en plus de cette nouvelle technique pour innover : c’est aujourd’hui la seule commune à proposer une facturation à partir du volume assaini et non consommé (voir encadré page...). « Les caractéristiques de notre commune ‑ un sol peu perméable et une topographie plane ‑ se prêtaient bien à ce

[Encart : Salmson réalise son premier réseau ramifié en France Le fabricant de pompes Salmson a fourni 50 postes de refoulement pour le chantier de réseau ramifié sous pression (RRSP) de la commune de Nesle-et-Massoult en Côte-d’Or (21). « Ce chantier achevé en août 2006 est une première en France pour Salmson, même si cela fait déjà trente ans que la société équipe des chantiers de ce type aux États-Unis, en Allemagne ou en Scandinavie », commente Guillaume Grenier, responsable prescription chez Salmson. Le village de Nesle-et-Massoult est essentiellement constitué d’un bourg de 51 maisons qui n’étaient jusqu'alors pas raccordées à un système d'assainissement collectif. Le choix de la solution du réseau gravitaire a évidemment été posé, mais la différence de prix et les caractéristiques du site (topographie plane, terrain difficile) ont fait pencher la collectivité sur le choix du RRSP. « La différence de coût entre les deux solutions s’élevait à plus de 70.000 € (NDLR : pour un montant global de 290.000 €) », se souvient Guillaume Grenier. Cette différence s'explique en partie par des travaux de chantiers réduits. Avec le RRSP, une tranchée de 1,5 km de long et de 4 m de profondeur pour 40 cm de large seulement a été creusée dans le centre du village jusqu’à la station d'épuration, située à 150 m de la dernière habitation. Les ramifications aux habitations ont été élaborées sur le même principe (canalisations en PEHD de diamètre 63 mm). Pour chaque particulier, une cuve en polyéthylène enterrée de 1,60 m de haut et 60 cm de diamètre a été installée, équipée d'une pompe dilacératrice d’un débit de 9 m³/h. Le curage du réseau est prévu une fois par an, « à la charge de la collectivité », précise Guillaume Grenier. Sur sa facture d'eau, le particulier paye en plus l’électricité nécessaire au fonctionnement du poste de refoulement, « soit 7 € par an en moyenne », poursuit-il. Salmson garantit une durée de vie pour ses pompes jusqu'à 25.000 heures. « A priori, les dispositifs installés sur le réseau de Nesle-et-Massoult devraient fonctionner encore pendant 20 ans », conclut Guillaume Grenier. Julie Doinel]
[Publicité : SAS SOLIDOR LETERTRE]

type de technique. Mais cette solution n'est pas transposable partout », souligne Jean-Loup Mercier, maire de Bréville.

Pour quels cas de figure ?

En effet, Amélie Barboteu, ingénieure au bureau d'études Norisko dans l’Eure-et-Loir, rappelle que le choix de la technique du RRSP comparativement à l'assainissement non collectif par exemple dépend « de la perméabilité du sol, la topographie, la présence ou non d'un puits, ou la surface de parcelle très limitée ». Son bureau d'études se charge, en plus de l'étude de zonage du schéma directeur d'assainissement, de réaliser les enquêtes parcellaires avant la mise en place du RRSP. « Cette enquête permet de connaître la configuration du terrain afin de définir l'emplacement du poste de relevage. Notre travail consiste aussi à informer les résidents du fonctionnement du futur réseau », poursuit-elle.

Dans le département de l’Eure-et-Loir, seulement dix à quinze projets sont aujourd'hui à l'étude, et six sont en cours de réalisation ou déjà équipés. Si cette technique du RRSP est surtout intéressante pour des communes rurales, un ratio sert à donner la valeur pour laquelle la solution du RRSP revient implicitement moins chère que les autres techniques. Ce ratio est calculé à partir du nombre de branchements et de la longueur du réseau, où la topographie de la commune doit aussi être prise en compte. « Le choix du RRSP doit s'appliquer aux collectivités dont le mètre linéaire est supérieur à 25. Entre 18 et 25 m, il faut alors tenir compte du volume des eaux à traiter pour savoir si le RRSP est plus intéressant que les autres solutions », considère Guy Polvé.

Une technique qui s’adapte

Un autre paramètre à prendre en compte, et non le moindre, est l'aspect réglementaire. « L'inconvénient principal de cette technique repose sur la lourdeur des procédures administratives. La loi sur l'eau de 1992 imposait une autorisation préfectorale (article 30) et le code rural implique une condition de réserve d'intérêt général.

[Encart : Bréville, ville pionnière en matière d’assainissement Deux ans et demi après la mise en place de son réseau ramifié sous pression, la mairie de Bréville en Charente (16) tire un bilan mitigé. Si les élus ont été confortés sur le choix de la technologie utilisée – réseau ramifié avec 350 m de canalisation gravitaire, 3 100 m de refoulement, 63 branchements – le système de facturation, pour le moins original, pose encore quelques problèmes. Bréville est en effet la seule commune à appliquer aujourd'hui une taxe d’assainissement sur le principe des eaux usées rejetées et non de l’eau potable consommée. Cette particularité avait fait l’objet de nombreux débats au sein de la commune, où le maire, Jean-Loup Mercier, avait même été jusqu’à demander l’aide de la députée de l’époque, Marie-Line Reynaud, pour obtenir une réponse tranchée de l’État. En 2000, l’Assemblée nationale donnait son aval sur cette méthode de facturation, et les recherches devraient également profiter aux campagnes voisines de Bréville puisque la mairie prie, pour l’extension de son réseau ramifié, d’autres hameaux de la commune. ]
[Photo : Côté canalisations, le système nécessite des tubes en PVC pression ou en P.E.H.D de diamètre minimal 55 mm.]
[Photo : Flygt propose une gamme de stations de pompage en résine polyester armé de fibre de verre et polyéthylène. Totalement modulaires, les gammes TOP se déclinent en plusieurs diamètres, plusieurs hauteurs avec 2, 3 ou 4 pompes.]
[Photo : Associée avec la pompe mini-SDL, la station de relevage Sanitson Premium de Salmson est idéale pour s'adapter à la demande des communes qui ont choisi la solution des réseaux ramifiés sous pression (RRSP). Elle se présente sous la forme d’un produit complet avec tous les accessoires intégrés, simple à installer et prêt à fonctionner.]

Mais avec la nouvelle loi sur l'eau, le texte est plus ambigu et semble selon moi plus souple au niveau des autorisations d’intervention », analyse Guy Polvé.

Beaucoup de fabricants proposent aujourd'hui une offre adaptée aux contraintes particulières du ramifié sous pression. Côté canalisations, le système nécessite des tubes en PVC pression ou en P.E.H.D de diamètre minimal 56 mm proposés par Alphacan avec Brio, Rehau avec Raufull, Sotra-Sept avec JK, RYB, ou encore Wavin. Du côté des postes de relevage, la plupart des fabricants intègrent dans leur offre des postes prééquipés en systèmes de pompage ou non, en polyester ou en béton qui s'adaptent bien au RRSP. On peut citer Flygt, Salmson, ABS France, Lowara, Vincent SA, SMVE, Obio Environnement, Techneau, O’pure ou Bora.

Parmi ceux-ci, ITT Flygt est l'un des plus impliqués sur le marché. Le fabricant compte à son actif plus de 200 collectivités équipées, dont la commune de Bréville. « Malgré ses résultats, cette technique reste encore mal connue des bureaux d'études et aujourd’hui peu d’entre eux la proposent comme solution alternative », regrette Alain Koenigs, attaché de direction chez ITT Flygt.

Mais cela n’empêche pas la société de chercher à étendre son application : depuis trois ans, elle réfléchit avec la commune de Montainville (28) sur l’éventualité d'un RRSP dans le cadre de la réhabilitation de son assainissement non collectif. L’objectif serait de mettre en place un réseau ramifié à partir des fosses septiques récentes et des anciennes remises aux normes. Comme le raccordement se ferait à partir d’effluents septiques, donc moins pollués, la solution de traitement finale serait plus sommaire donc moins coûteuse pour la collectivité. « Ce projet constituerait une première en assainissement », souligne Alain Koenigs.

ABS a également développé un réel savoir-faire dans la fourniture d’équipements pour réseaux sous pression grâce aux marchés des pays nordiques. « Si ce procédé est très développé par ABS dans les pays nordiques, c’est que le terrain s’y prête bien, mais surtout qu’ils sont équipés de prétraitements bien plus performants que ce que nous avons sur nos STEP françaises », souligne Henry de Miramon, Directeur Commercial Assainissement chez ABS France.

« En France, les réseaux sous pression restent assez peu répandus, car ils nécessitent l'utilisation de pompes dilacératrices qui ont la particularité de “broyer” les parties solides des effluents. Ainsi, si les dégrillages des STEP ne sont pas adaptés, certains déchets solides peuvent alors passer les prétraitements et se retrouver en petits morceaux dans les bassins biologiques et donc au final dans les boues. »

Quant aux pompes dilacératrices, ou dans certains cas aux aéro-éjecteurs, qui constituent le troisième composant du système, elles sont proposées par Flygt, KSB, ABS France, Salmson ou Soterkenos.

[Photo : Poste de relevage ABS avec une cuve en P.E.H.D pouvant être équipée de pompes dilacératrices Piranha. Le système d’accouplement non immergé rend le dispositif visitable sans aller au fond, laissant le fond de cuve totalement exempt de quoi que ce soit.]
[Encart : Tableau comparatif des solutions Avantages – Réseau gravitaire classique : Gestion en régie communale ; coût de fonctionnement réduit – RRSP : Coût global (investissement et fonctionnement) ; solution adaptée à une règle municipale ; possibilité d’une facturation au volume assaini – Réseau sous vide : En nappe phréatique, aucun risque de pollution du milieu naturel par exfiltration Inconvénients – Réseau gravitaire classique : Coût de mise en œuvre élevé (sous-sol affecté par la présence d'une nappe phréatique ou perchée, surprofondeur du réseau) ; présence de réseaux concessionnaires ; habitat dispersé (si L > 18 m) – RRSP : Mise en œuvre en terrain privé nécessitant une déclaration d'intérêt général (si le poste d'injection est installé sur le domaine privé) – Réseau sous vide : Coût élevé ; entretien périodique souvent mensuel des boîtes de transfert (nettoyage du joint de clapet) ; chaque particulier assure son raccordement dans les mêmes conditions que pour un réseau gravitaire]

D'après une étude réalisée par le bureau d'études Hydraulique Environnement Centre Atlantique (HECA) en 2001 pour le cas de la commune de Bréville (Charente) reprise par la société ITT Flygt.

Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements