Your browser does not support JavaScript!

Essais de dopage de la station d'épuration de Marquette-lez-Lille

30 novembre 2004 Paru dans le N°276 à la page 127 ( mots)
Rédigé par : Gilles RUYSSCHAERT

Dans le cadre d'une campagne d'amélioration continue, le service Traitement des Eaux Usées de la Direction Eau et Assainissement a mis en place une campagne d'essais de dopage de la station d'épuration de Marquette-lez-Lille durant le premier semestre 2003. Objectif : optimiser le fonctionnement de la station en limitant les volumes d'eau by-passés et en augmentant les rendements globaux de la station.

Lille Métropole Communauté urbaine dispose d’un parc de stations d’épuration communautaires de toutes tailles. Les plus importantes sont celles de Marquette (750 000 Eq Hab), Wattrelos (400 000 Eq Hab), Houplin Ancoisne (180 000 Eq Hab), Villeneuve d’Ascq (170 000 Eq Hab), Armentières (90 000 Eq

Tableau 1 : Bilan des débits et flux entrants station (2001, 2002 et essai)

Année Débit MS DBO₅ DQO
2001 Débit : 124 298 m³/j, soit 52 115 442 m³/an MS : 2 079 874 kg/j DBO₅ : 495 031 kg/j DQO : 1 617 960 kg/j
2002 Débit : 124 002 m³/j, soit 51 875 307 m³/an MS : 2 224 269 kg/j DBO₅ : 564 089 kg/j DQO : 2 046 859 kg/j
Essai Débit : 137 870 m³/j, soit 50 322 550 m³/an MS : 2 438 292 kg/j DBO₅ : 590 010 kg/j DQO : 2 207 167 kg/j

Hab), Neuville-en-Ferrain (65 000 Eq Hab). La plus importante d’entre elles se situe à Marquette-lez-Lille et recueille les effluents de l’agglomération de Lille-Marquette correspondant à une population de près de 500 000 habitants répartis sur plus de 15 000 ha, à laquelle s’ajoutent 73 entreprises industrielles raccordées au réseau d’assainissement. La première tranche de cette station d’épuration a été mise en service en 1969. Deux extensions ont ensuite été réalisées en 1975, 1977 et 1989. La station ne traite que la pollution carbonée.

La filière eau est constituée d’un prétraitement (dégrillage, dessablage, déshuilage) et d’une répartition en trois files en parallèle constituées chacune d’une décantation primaire et de bassins biologiques combinés de moyenne à forte charge. Le débit moyen d’eau brute arrivant sur la STEP est de 120 000 m³/j. À noter qu’il existe un by-pass entre la décantation primaire et les bassins biologiques dans le cas où ceux-ci ne peuvent accepter la charge et/ou le débit total de l’effluent à traiter.

La filière boue se compose d’une extraction de boues dites fraîches en décantation primaire et d’une extraction de boues biologiques. Celles-ci sont dirigées vers un flottateur afin de les concentrer. Les boues fraîches (600 m³/j) et flottées (200 m³/j) sont acheminées vers deux digesteurs primaires à 35 °C (fermentation anaérobie mésophile) produisant 11 000 Nm³/j de biogaz. La digestion permet de réduire de 50 % les matières organiques contenues dans les boues.

Les boues digérées sont ensuite déshydratées selon deux procédés : elles passent par un des trois filtres tambours sous vide EIMCO (filière calcique) ou par un filtre à bandes (filière humique).

Les boues déshydratées obtenues présentent une siccité proche de 30 %. Le gisement de cake produit est de 33 000 t/an. Ces boues sont valorisées en milieu agricole ou sont envoyées en CET si elles présentent une pollution.

La filière de valorisation du gaz se compose des équipements suivants :

  • deux moteurs dual biogaz-fioul de puissance électrique unitaire de 1 125 kW. Ces équipements de cogénération consomment les deux tiers du biogaz total et produisent le tiers de l’énergie électrique nécessaire au fonctionnement de la STEP ;
  • trois chaudières maintiennent les digesteurs à température constante ;
  • une unité de lavage de biogaz permet de produire du méthane carburant pour des bus urbains ;
  • une torchère brûle le biogaz excédentaire.

À noter : l’installation de production de méthane carburant a été mise en œuvre en 1994 et constituait le premier pilote mondial dans ce domaine. Le principe consiste à concentrer le biogaz en méthane (de 64 % à 98 %) et à ôter les gaz indésirables (CO₂, O₂, soufre…).

La volonté de protection des eaux de surface de la Marque, les impératifs législatifs et l’augmentation continue de la quantité de pollution font que, bien que l’on augmente d’année en année la pollution abattue, les rendements de la station doivent sans cesse être améliorés. Ce constat est une preuve de l’amélioration du transport des eaux usées via le réseau d’assainissement de Lille Métropole Communauté Urbaine. Dans le cadre d’une amélioration continue, le service Traitement des Eaux Usées de la Direction Eau et Assainissement a mis en place une campagne d’essais de dopage de la station d’épuration de Marquette-lez-Lille durant le premier semestre 2003.

L’objectif de la campagne d’essais était d’optimiser le fonctionnement de la station d’épuration en limitant les volumes d’eau bypassés et en augmentant les rendements globaux de la station. Le principe adopté était d’injecter une combinaison de réactifs chimiques au niveau du prétraitement, afin de piéger plus facilement la pollution en agglomérant les particules, et de réguler leur dosage en fonction de la quantité de pollution à traiter. L’efficacité des décanteurs primaires est alors augmentée et la quantité de pollution entrant sur les bassins biologiques peut être rendue plus constante, ce qui améliore le comportement de ces bassins.

Impact sur la filière eau

Tout au long de ce bilan technique, nous comparons la période de l’essai à deux années de référence, à savoir 2001 et 2002. En termes de débit moyen reçu par la station, ces deux années sont représentatives.

[Photo : Acheminement du coagulant et du floculant entre les bacs de préparation et l’unité de prétraitement.]

Tableau 2 : Rendements de la décantation primaire

Rendement MeS
Rendement DCO
Rendement DBO5

de la situation pendant la période du dopage.

On notera, cependant, une augmentation de charge entrante sur la station sur les trois paramètres de DCO, DBO5 et MeS.

Lissage des résultats en sortie des décanteurs

Le tableau 3 reprend :

Tableau 3 : Moyennes des eaux décantées et moyennes des écarts-types sur les eaux décantées

Moyennes sur eau décantée
Moyennes des écarts-types
MeS
DCO
DBO5

…giques en dépit de flux bruts plus importants sur la période d’essai. À côté des flux entrants sur les biologiques, les rendements de décantation correspondants sont indiqués entre parenthèses.

Tableau 4 : Débits et flux entrants sur les bassins biologiques

Flux eau brute (kg/j)
Eaux décantées entrant sur les biologiques (kg/j)
(rendements de décantation primaire)

Le tableau 1 reprend les caractéristiques de ces trois périodes :

Pratiquement, le dopage a consisté en l’injection en tête des décanteurs primaires, en fonction du flux entrant de MeS (estimé par un turbidimètre), d’une combinaison de trois produits : du chlorure ferrique, un coagulant organique et un floculant. Dans la première phase de l’essai, différents dosages et combinaisons de produits ont été testés afin de déterminer les conditions optimales de traitement. Il apparaît que :

  • le chlorure ferrique est indispensable pour déstabiliser l’effluent ;
  • le coagulant organique permet, en synergie avec le chlorure ferrique, de déstabiliser la partie colloïdale de l’effluent. Il permet, ainsi, d’améliorer les rendements, notamment sur la DBO5, et d’augmenter la concentration des boues primaires ;
  • le floculant est indispensable pour effectuer une bonne décantation. Cependant, un excès de floculant peut entraîner une flotta­tion des boues.

Augmentation des rendements des décanteurs primaires

Les rendements des décanteurs ont été largement améliorés. L’amélioration la plus sensible concerne le rendement des MeS.

  • les charges des eaux décantées en moyenne/jour ;
  • la moyenne des écarts-types.

L’écart-type est le calcul pour chaque jour de la différence entre la concentration moyenne journalière sur l’eau décantée et la concentration moyenne de l’eau décantée sur la période de l’essai.

Une faible moyenne des écarts-types indique que les valeurs journalières sont proches de la moyenne globale et, par conséquent, que les variations de charge sont faibles d’un jour sur l’autre. On constate que le dopage a permis de :

  • minorer la concentration moyenne des eaux décantées ;
  • lisser les résultats en sortie des décanteurs, les variations de concentration étant moins importantes. La gestion de l’aération des bassins biologiques en est facilitée.

Diminution de la charge en entrée des bassins biologiques

Comme le montre le tableau 4, l’amélioration des rendements des décanteurs a permis d’alléger la charge sur les biologiques.

2003 essai (semaine 3 à 29)

Débit : 137 870 m³/j
MeS : 24 382 kg/j
DCO : 59 010 kg/j
DBO5 : 22 057 kg/j

Débit : 135 431 m³/j
MeS : 14 446 kg/j (42 %)
DCO : 40 545 kg/j (31 %)
DBO5 : 15 596 kg/j (29,2 %)

Amélioration des rendements de la station

Nombre de non-conformités

Le tableau 5 montre que le dopage a permis de limiter le nombre de non-conformités en dépit d’une charge plus importante reçue sur la station.

Pourcentage de by-pass et qualité des by-pass

Le tableau 6 reprend les débits et charges sur les périodes considérées et rend compte à la fois du volume moyen/jour des by-pass et le pourcentage de ceux-ci par rapport au débit total reçu. Les charges non traitées et rejetées en by-pass sont également précisées (pourcentages par rapport aux flux d’entrée également précisés).

Le dopage a permis de limiter la pollution

Tableau 5 : Nombre de non-conformités

MeSDCODBO5
2001 : 11248
2002 : 33619
2003 essai (semaine 3 à 29) : 731

Tableau 6 : Volume et qualité des by-pass

Flux brut moyens entrants station et débit

Année Débit (m³/j) MeS (kg/j) DCO (kg/j) DBO5 (kg/j)
2001 142 889 20 974 49 130 16 980
2002 142 022 22 824 52 940 20 485
Essai 137 870 34 382 59 201 22 057

Volume de by-pass et pourcentage par rapport au débit eau brute

Année Débit (m³/j) % Débit MeS (kg/j) % MeS DCO (kg/j) % DCO DBO5 (kg/j) % DBO5
2001 2 100 1,5 293 1,39 603 1,23 220 1,31
2002 5 800 4,10 816 3,65 743 1,37 645 3,17
Essai 2 400 1,77 318 1,13 623 1,08 269 1,22

À noter : Lille Métropole Communauté Urbaine rénove en 2004 les réseaux d’aération complets (canalisations et diffuseurs) des deux bassins de la file n° 3.

Répartitions du débit entrant sur les filières biologiques

En raison du souci d’aération sur la file n° 3 (bassins R1 et R2), il a fallu reporter progressivement une partie de la charge sur les deux autres lignes. Le dopage a aidé à réaliser cette opération sans pénaliser les rendements des lignes 1 et 2, comme on peut le constater dans les tableaux suivants.

Tableau 7 : Répartition du débit sur les trois lignes biologiques

Total sur bio (m³/j) Bio 1 (m³/j) % Bio 1 Bio 2 (m³/j) % Bio 2 Bio 3 (m³/j) % Bio 3
2001 140 728 52 776 37,5 39 382 28,1 48 625 34,5
2002 135 135 52 495 38,6 38 201 28,3 44 539 33,3
Essai 136 431 53 254 39,5 38 195 28,0 47 34,6

Tableau 8 : Rendement des biologiques (DCO, DBO5 et MeS)

Rendements MeS (%)

Année EE1 EE2 EE3
2001 83,7 82,42 84,6
2002 83,2 87,5 81,6
Essai 84,6 81,1 83,1

Rendements DCO (%)

Année EE1 EE2 EE3
2001 74,57 74,3 76,9
2002 73,1 74,78 76,7
Essai 72,41 73,89 76,1

Rendements DBO5 (%)

Année EE1 EE2 EE3
2001 86,27 85,53 88,1
2002 83,21 85,36 87,2
Essai 83,43 84,98 87,3

Les rendements en DCO, DBO5 et MeS sont maintenus voire légèrement augmentés malgré l’augmentation de la charge. Les rendements de l’eau épurée ont été également augmentés sur le phosphore total.

Rendements globaux de la station

Du fait de la diminution des volumes by-passés et de l’amélioration de leur qualité, les flux d’azote et de phosphore sont partiellement reportés sur les six bassins des deux autres lignes (files n° 1 et 2).

– le problème de vétusté du réseau d’air de deux des huit bassins de la station (file n° 3). Ce réseau est corrodé et les rendements des diffuseurs ne sont plus suffisants.

– une augmentation de la charge brute importante entre 2001 et la période de l’essai : augmentation de 16 % sur les MeS, 19 % sur la DCO et 24 % sur la DBO5.

Ces deux facteurs auraient dû contribuer à une augmentation du volume de by-pass, mais en réduisant la charge entrante sur les biologiques, le dopage a permis d’éviter ce phénomène.

Tableau 9 : Rendements et flux épurés sur les biologiques en azote et phosphore

2001 2002 Essai
Rendement eau épurée Azote global (%) 2,77 7,95 6,4
Flux eau brute azote global (kg/j) 5 344 5 711 5 494
Flux eau épurée azote global (kg/j) 528 500 514
Rendement eau épurée Phosphore total (%) 27,1 35,68 48,9
Flux eau brute Phosphore total (kg/j) 714 730 671
Flux eau épurée Phosphore total (kg/j) 523 450 343

Tableau 10 : Rendement station et flux épurés et rejetés sur les MeS

20012002Essai
Rendements MeS (%)81,5679,3783,2
Flux éliminé MeS (kg/j)17 12517 68620 276
Flux rejet global MeS (kg/j)3 8494 5974 106

Tableau 12 : Rendement station et flux épurés et rejetés sur la DBO₅

20012002Essai
Rendements DBO₅ (%)83,3582,7686,6
Flux éliminé DBO₅ (kg/j)13 97616 95319 116
Flux eau rejet global DBO₅ (kg/j)2 7933 3522 941

Les rendements globaux station ont augmenté et on note une nette augmentation des flux totaux éliminés.

Les flux rejetés en eau épurée sont également indiqués. Grâce au dopage, on a ainsi pu faire face aux augmentations de charges reçues sur la station et diminuer la pollution rejetée dans le milieu naturel (cf. tableaux 10, 11, 12).

Synthèse des résultats sur la filière Eau

Le dopage a permis de :

  • augmenter les rendements des décanteurs primaires ;
  • diminuer et lisser la charge entrante sur les bassins biologiques ;
  • améliorer les rendements de la station (diminution des non-conformités, diminution du volume et de la charge des by-pass, augmentation des rendements des bassins biologiques).
[Photo : Injection du coagulant.]

Tableau 11 : Rendement station et flux épurés et rejetés sur la DCO

20012002Essai
Rendements DCO (%)72,5872,1876
Flux éliminé DCO (kg/j)35 94840 77744 873
Flux rejet global DCO (kg/j)13 58215 71514 173

Tableau 18 : Bilan sur les boues primaires (concentration et flux d’extraction)

20012002Essai
Concentrations des boues (g/l)43,339,2352,93
VS = 58,37
Flux entrée (kgMS/j)20 97422 32524 882
VS = 24 217
Flux extrait (kgMS/j)20 37720 88329 007
VS = 32 753

Impact sur la filière Boue

Concernant la filière Boue, il faut noter que :

  • lors des premières semaines d’essai, différentes combinaisons de produits ont été testées. Une fois la combinaison définitive déterminée, différents paramètres ont varié suite à l’augmentation du dosage de chlorure ferrique et à la mise en route du coagulant organique ;
  • le stockage en digestion primaire est important (12 000 m³) soit un temps de séjour de l’ordre de 20 jours et une dilution progressive des boues avant dopage par les boues issues du dopage, ce qui implique une lente évolution des paramètres. On considère que la situation s’est stabilisée deux mois après le démarrage des essais. C’est pourquoi on distingue les moyennes sur la période de l’essai et les moyennes en période stabilisée désignées par l’abréviation VS (Valeur Stabilisée).

Boues primaires

Dans le tableau 18 sont repris :

  • la concentration des boues primaires, ceci ayant son importance quant au comportement de la digestion ;
  • les flux totaux extraits mis en parallèle avec les flux bruts.

Du fait de l’amélioration des rendements des décanteurs primaires, les flux de boues primaires ont fortement augmenté. Les concentrations des boues extraites ont fortement augmenté, permettant de maintenir des débits d’extraction proches de ceux des autres années tout en traitant davantage de boues. Il faut noter que l’ajout de chlorure ferrique génère un volume de boues supplémentaires estimé à 1 tonne/j.

Tableau 13 : Moyennes des indices de boue

Bo 1Bo 2Bo 3
20012002Essai20012002Essai20012002Essai
IB moyen240263309231265256214260266
Moyenne des écarts-types629912590121857077165

Boues biologiques

Caractéristiques

Le tableau 13 reprend les valeurs moyennes des indices de boue. En dernière ligne, la valeur moyenne des écarts-types indique le degré de variation des indices de boue.

La station est sujette à des problèmes récurrents de variations importantes de l’indice de boue d’un jour sur l’autre. Ce phénomène semble dû aux fortes variations de charge rejetées dans le réseau par certains industriels ainsi qu’à la nature de certains rejets industriels (levures). Les périodes de temps sec sont également défavorables à un main-

Tableau 14 : Flux d’extraction des bassins biologiques

Flux extraction (kg/j)

tien de l’indice de boue dans des valeurs acceptables.

Sur le biologique n° 2, on constate une amélioration de la moyenne des indices de boue et également une meilleure stabilité. Sur toutes les lignes, les valeurs d’indice de boue sont restées stables jusqu’à une période caractérisée par des charges particulièrement importantes (25 t/j de MeS, 58 t/j de DCO et 23 t/j de DBO5).

Tableau 16 : Retours en tête des bassins biologiques

Extractions biologiques (kg/j)
Boues by-passées (kgMS/j)
Entrée flottateur (kgMS/j)
Sortie flottateur (kgMS/j)
Retour en tête de sous-verse (kgMS/j)
Retours en tête de biologie (kgMS/j)

Extractions des bassins biologiques

Dans le tableau 14, on note les flux extraits des biologiques. Ces boues biologiques sont envoyées sur le flottateur afin de les concentrer mais celui-ci ne peut accepter un flux supérieur à 10 t/j. L’excédent est donc renvoyé en tête de station ; les flux de retour en tête biologique seront exprimés dans le paragraphe suivant.

La charge de DBO5 entrant sur les bassins biologiques étant diminuée et ramenée à des valeurs proches de celles de 2001, on constate néanmoins que la production de boues biologiques a sensiblement diminué par rapport à 2001. Les charges massiques et volumiques ne sont pas modifiées entre ces périodes.

Cette réduction de la production de boues biologiques s’explique à la fois par la réduction du flux de MeS entrant sur les biologiques et par une amélioration du taux de synthétisation de la DBO5.

Le taux de synthétisation intervient dans le calcul de la biomasse produite à partir des réactions de synthèse :

Production de biomasse = Taux de synthétisation × Flux de DBO5 éliminé sur le biologique.

Les calculs indiquent un taux de 0,8 pour l’année 2001 et 0,68 pour la période de l’essai. Cette valeur se rapproche de la valeur donnée dans la littérature, à savoir 0,6 (Mémento Technique de l’Eau, Degrémont). Bien entendu, ce paramètre dépend de beaucoup d’autres facteurs (âge des boues, équilibre des nutriments...) mais le dopage a permis de l’améliorer. De fait, les flux de boues activées ont diminué. Cela a permis de réduire les retours en tête du flottateur et donc d’alléger la charge à traiter en tête de station.

Impact sur la flottation

Le flottateur est un ouvrage très sensible aux caractéristiques des boues biologiques extraites. Ainsi, lorsque se produisent des épisodes de “boues gélatineuses” avec des indices de boue élevés, les résultats du flottateur se dégradent en termes de concentration de boues épaissies et la consommation de polymère augmente.

Même si les concentrations de boues flottées ont baissé, on constate que le rendement de l’appareil a augmenté sur la période de l’essai. Cela signifie que moins de MeS ont été rejetées dans la sous-verse et donc en retours en tête.

Tableau 15 : Bilan de fonctionnement du flottateur

Concentration entrée (g/l)
Flux entrée (kgMS/j)
Concentration (g/l)
Flux sortie (kgMS/j)
Rendement (%)

Retours en tête des bassins biologiques

Le flottateur ne peut capter qu’un tonnage limité de MS. Le surplus de boues biologiques extraites est by-passé avant entrée flottateur et constitue la majeure partie des retours en tête des bassins biologiques.

Des flux d’extractions biologiques plus faibles et un meilleur rendement du flottateur contribuent à améliorer le taux de capture et à diminuer les retours en tête (diminution des boues by-passées en entrée du flottateur et diminution de la sous-verse du flottateur). On constate une nette diminution des retours en tête des bassins biologiques pendant la période de dopage. Ceci contribue à diminuer la charge en tête de la station.

Digestion

Bilan massique

Dans le tableau 17, le bilan sur la digestion est réalisé pour les périodes considérées. Les valeurs stabilisées sont signalées.

La concentration des boues primaires mixtes a augmenté. Le volume introduit est resté stable, le temps de séjour également, malgré l’augmentation de la charge introduite sur les digesteurs, ce qui a conduit à une augmentation de la production de gaz.

Tableau 17 : Bilan massique (MS et MV) et rendement de la digestion

Flux MS entrée digestion (kg/j)
Concentration entrée digestion (g/l)
Débit entrée digestion (l)
% de MV entrée digestion
MV total entrée digestion (kg/j)
Flux MS sortie digestion (kg/j)
% de MV sortie digestion
MV total sortie digestion (kg/j)
Rendement (%)
Production de gaz (m³/j)

Qualité du biogaz

Le biogaz a été analysé avant et en fin d’essai. Les résultats sont repris dans le tableau 19.

Le dopage n’a pas perturbé la digestion. La qualité du biogaz est restée stable avec une baisse sensible sur la teneur en H₂S sur un digesteur.

Déshydratation

Bilan de fonctionnement

Le tableau 20 reprend différents paramètres de la déshydratation.

Depuis fin 2002, une dégradation des résultats sur la déshydratation a été constatée, notamment sur les filtres sous vide. Ce problème fait l’objet d’une étude actuellement en cours afin d’identifier l’origine du problème.

Un essai de filtration avec de nouvelles toiles a été réalisé, sans impact sur les siccités. Le tableau 20 laisse à penser que les différents paramètres ne se sont pas améliorés pendant la période du dopage. Cependant, le graphique suivant permet de suivre l’évolution de deux paramètres importants avant et pendant la période de l’essai.

[Photo : Évolution de la siccité et de la charge massique sur les EIMCO depuis décembre 2001.]

On constate une baisse des paramètres de charge massique et de siccité à partir de décembre 2002. L’essai a débuté en janvier, mais on considère que la situation en entrée de déshydratation s’est stabilisée à partir de mi-mars (période de détermination des dosages de chlorure ferrique et de coagulant organique, et temps de séjour de la digestion).

À partir de fin mars, on constate une remontée des paramètres de siccité et de charge massique. D’après ces observations, il est difficile de relier les variations de ces paramètres au dopage.

Pendant une partie du dopage, la filtration n’a pas fonctionné à pleine capacité suite à des problèmes de pannes (pompe à boues). Les arrêts fréquents n’ont pas permis de filtrer la totalité des boues en provenance des digesteurs. Des by-pass en sortie digesteur et en sortie des stockeurs ont été nécessaires, ce qui a généré des retours en tête importants (près de 4 tonnes de retours en tête estimés).

Le dopage a permis de faire face à l’augmentation de la pollution liée à ces retours en tête, sans dégradation des résultats en sortie de station.

Tableau 19 : Qualité du biogaz avant et après dopage

H₂S (mg/m³)
CO₂ (mg/m³)
O₂ (mg/m³)
H₂ (mg/m³)
CH₄ (mg/m³)

Synthèse des résultats sur la filière Boue

Le dopage a permis de :

  • - augmenter les rendements des décanteurs primaires (augmentation de la concentration des boues primaires, des flux extraits) ;
  • - diminuer la production de boues biologiques ;
  • - diminuer les retours en tête des bassins biologiques ;
  • - augmenter la charge introduite en digestion ;
  • - augmenter la production de biogaz issu de la digestion.

Bilan sur l’utilisation des réactifs

Réactifs de déshydratation

Les consommations de chaux et de chlorure ferrique par tonne de matière sèche sur les…

Tableau 20 : Bilan de fonctionnement de la déshydratation (quantité de boues, siccités, charge massique)

Boues sortie stockeur (kg/j)
Concentration entrée déshydratation (g/l)
Boues déshydratées (kg/j)
Temps de fonctionnement (h/j)
Charge massique filtre sous vide (kg/m²/h)
Charge massique Pressdeg (kg/h)
Siccité (%)
Retours en tête déshydratation (kg/j)

Tableau 21 : Consommations de réactifs sur la déshydratation(2001 / 2002 / Essai)

  • • Chaux livrée : 6,4 g / tMS – 7,2 g / tMS – 7,6 g / tMS
  • • Chlorure ferrique : 31,5 % soit 2,04 g / tMS – 33,6 % soit 2,70 g / tMS – 39,2 % soit 2,71 g / tMS
  • • Polymère : 5,7 % soit 3,15 g / tMS – 7,2 % soit 3,42 g / tMS – 8,1 % soit 4,2 g / tMS

Les filtres sous vide ont augmenté depuis 2001. Par contre, sur le Pressdeg, la consommation de polymères a diminué du fait d'une qualité de boue plus intéressante.

Flottateur

On peut considérer que les consommations sur le flottateur sont équivalentes (notamment entre 2001 et l’essai). Le dopage n’a pas généré de modifications importantes sur ce poste.

Bilan énergétique

Le dopage a permis d’améliorer les ratios énergie/flux MeS épuré, énergie/flux DCO épuré et énergie/flux DBO₅ épurée puisqu’on a notamment :

  • - augmenté les rendements des décanteurs tout en augmentant les concentrations des boues primaires ; de ce fait, il n’y a pas d’augmentation du débit d’extraction et donc des pompes d’extraction ;
  • - baissé la charge entrant sur les biologiques et donc réduit les besoins en air ;
  • - diminué les extractions biologiques.

On note néanmoins une dégradation des rendements d’énergie sur les biologiques. Ceci est, sans doute, lié au problème de vétusté du réseau d’aération sur la ligne 3.

Bilan économique

Coûts d’exploitation

Réactifs de dopage

À l’issue de ces essais, la combinaison de traitement optimale obtenue est décrite ci-après. Les quantités sont rapportées au kg de MeS traité :

  • - Chlorure ferrique : 108 g / kg de MeS traité
  • - Coagulant organique : 2,1 g / kg de MeS traité
  • - Floculant : 0,6 g / kg de MeS traité.

Cependant, pendant certaines périodes, il n’est pas nécessaire d’injecter des réactifs. Un seuil de déclenchement du traitement en fonction de la charge entrante peut être mis en place. La valeur seuil de 110 mg/l semble raisonnable.

Afin d’estimer les quantités de produits nécessaires pour effectuer un dopage sur une année, nous prenons les estimations suivantes :

  • - Flux brut entrée sur 2003 depuis début de l’essai : 40 000 kg MeS/j (flux eau brute + retours en tête estimés soit 14 600 t/an). L’estimation des retours en tête est sans doute un peu élevée mais permet de donner des valeurs hautes de consommations réalistes.
  • - En tenant compte d’une valeur seuil de 110 mg/l, on traite 917 t de MeS en moins.

Ces hypothèses permettent de déterminer des consommations annuelles maximales de :

  • - 1 400 t/an de chlorure ferrique ;
  • - 30 t/an de coagulant organique ;
  • - 8 t/an de floculant ;
  • - eau de préparation : 7 300 m³/an.

Mise en place et maintenance du matériel

Les temps de main-d’œuvre sont estimés comme suit :

  • - suivi de l’exploitation (contrôles, nettoyage, manutention des big-bags, surveillance de la cuve FeCl₃) : 2,21 h/j ;
  • - maintenance (électrique et mécanique) : 0,41 h/j ;
  • - suivi des approvisionnements : 0,1 h/j.

Soit un total de 2,72 h/j. Avec un taux horaire moyen de 33,22 € / h, le coût est estimé à 90,35 € / j.

Impact économique du dopage sur le fonctionnement de la station

Économie d’énergie sur la filière biologique

Du fait de l’amélioration du rendement d’épuration de la DBO₅, des économies d’énergie sont réalisées sur le poste aération.

En imaginant que le rendement 2002 ait été appliqué au flux brut DBO₅ reçu pendant l’essai, les bassins biologiques auraient reçu la charge suivante : 22 057 – (22 057 × 0,203) = 17 579 kg/j au lieu de 15 596 kg/j avec le dopage. De fait, il aurait fallu traiter 1 983 kg de plus. Sachant que pour traiter 1 kg de DBO₅ la dépense énergétique est de 1,93 kW, l’économie d’énergie est de 3 827 kW/j.

Augmentation de la quantité de gaz produite

Quelques 3,5 t supplémentaires de matières volatiles ont été envoyées en digestion, ce qui représente 1,7 t de MV éliminées supplémentaires avec un rendement de 48 %, soit 1 600 Nm³ de gaz supplémentaires produits. On estime qu’un m³ de gaz produit équivaut à 2 kW h, soit 3 200 kW supplémentaires.

Tableau 22 : Consommation de réactifs sur la flottation

Polymère (kg / tMS) : 5,65 (2001) – 5,08 (2002) – 5,47 (Essai)

Tableau 23 : Bilan énergétique

2001 2002 Essai
Consommation secteur (kW / j) 29 164 29 935 26 893
Production générateurs (kW / j) 10 513 12 328 14 396
Consommation totale (kW / j) 39 317 42 263 41 289
Consommations soufflantes (kW / j) 17 435 20 024 22 315
Volumes d’air injectés (m³) 1 244 230 1 075 177 1 151 317
Énergie / flux MeS épuré (kW / kg MeS) 2,11 2,04 1,85
Énergie / flux DCO épuré (kW / kg DCO) 2,81 2,52 2,00
Énergie / flux DBO₅ traité (kW / kg DBO₅) 1,28 1,37 1,03
Consommation soufflantes / flux MeS épuré (kW / kg MeS) 0,98 1,25 0,83
Consommation soufflantes / flux DCO épuré (kW / kg DCO) 1,61 1,84 1,25
Consommation soufflantes / flux DBO₅ épuré (kW / kg DBO₅) 0,76 0,89 0,67
Consommation soufflantes / débit entrant sur biologique (kW / m³) 0,16 0,18 0,17

À titre indicatif, la capacité d’utilisation du gaz est de 15 000 Nm³/j en hiver et 14 000 Nm³/j en été. Les débits d’utilisation sont de l’ordre de 400 Nm³/h sur les moteurs électrogènes MAN, 50 Nm³/h sur les chaudières et 200 Nm³/h sur la torchère fonctionnant en continu. Le skid gaz (gaz utilisé pour l’alimentation des bus) utilise au maximum 200 Nm³/j.

À noter que Lille Métropole Communauté Urbaine élabore pour 2005 un programme de renouvellement de la filière de valorisation de biogaz. Les équipements de cogénération et de production de méthane carburant seront remplacés. La rénovation de la filière de valorisation permettra d’optimiser le bilan énergétique, en particulier en réduisant quasiment à néant la part brûlée en torchère.

Tableau 24 : Bilan économique d’exploitation en phase de dopage(€/j)

Produits Dépenses Gains
Chlorure ferrique 307
Coagulant organique 367
Floculant 63
Eau de préparation 55
Économie d’énergie sur filière biologique 250
Production de gaz supplémentaire 96
Réactifs supplémentaires en déshydratation 59
Main d’œuvre 91
Total 942 346

Coût net : 942 – 346 = 596 €/jour

Flottateur

Il n’y a pas de modification de la quantité de boues traitées sur le flottateur.

Déshydratation

On a estimé à 2 tonnes/j les quantités de boues supplémentaires qui ont été générées par le dopage. Soit :

  • Consommation supplémentaire de chaux : 110 t/an ;
  • Consommation supplémentaire de chlorure ferrique : 26 t/an ;
  • Consommation supplémentaire de polymère : 2 500 kg/an.

Bilan économique d’exploitation

Le tableau 24 reprend les dépenses et gains (économie d’énergie) liés à la mise en place du dopage. Les données sont exprimées en €/j.

Investissements nécessaires

Matériels nécessaires

Pour dimensionner le matériel nécessaire, les hypothèses suivantes sont retenues :

  • Flux maximum observé (+10 %) = 80 t/j + 15 t/j de retour en tête ;
  • Flux minimum observé (–10 %) = 10 000 kg/j + 15 t/j de retour en tête ;
  • Pointe de charge = 600 mg/l et débit maximum = 3 500 l/s, soit un maximum ponctuel de 7,5 t/h.

Les pompes seront pilotées par un automate relié à un turbidimètre pour l’évaluation de la charge. Les caractéristiques de l’automate seront les suivantes :

  • Pilotage par calcul du flux entrant : l’automate récupère l’information de débit de relèvement et la mesure faite par un turbidimètre de la concentration des eaux entrant sur les décanteurs (eau brute + retours en tête) ;
  • Mise en place d’un seuil bas de fonctionne-

Tableau 25 : Liste et caractéristiques du matériel nécessaire au dopage

Produits Matériel Dimension Débit
Chlorure ferrique Cuve de rétention Mati = 10 tonnes/j Min = 2,7 tonnes/j
Chlorure ferrique Pompe d’expédition du chlorure ferrique Débit max = 800 l/h Débit min = 50 l/h
Coagulant organique Poste de préparation automatique poudre 3 000 t/h, 3 bacs Min = 250 l/h
Coagulant organique Pompe d’expédition Maxi = 1 400 l/h
Floculant Poste de préparation automatique poudre 5 000 l/h, 3 bacs
Floculant Pompe d’expédition Maxi = 1 100 l/h
Floculant Aspirateur polymère Maxi = 3 300 l/h
[Photo : Cuve de chlorure ferrique.]
  • pour la biologie :
    • diminution des retours en tête du biologique ;
    • augmentation des concentrations en entrée digestion et déshydratation ;
    • augmentation des siccités sur le filtre Pressdeg.
[Photo : Injection du floculant.]

Bilan économique

  • arrêt du dopage en cas de concentration inférieure à 110 mg/l ;
  • mise en place d’une alarme en cas de fortes charges liées aux pluies d’orage pour gérer l’arrêt du dopage ; l’objectif est d’éviter de boucher les décanteurs.

Le coût total d’investissement des équipements est approximativement de 100 k€. À ce coût s’ajoute celui du local qui héberge les équipements.

[Photo : Turbidimètre afin d’estimer la charge de l’effluent à traiter.]

Tableau des rejets et gains liés au dopage :

Sans dopage Avec dopage Gains (kg/j) Gains (%)
Rejets MES (kg/j) : 5 030 4 106 924 18,4
Rejets DCO (kg/j) : 16 146 14 173 1 973 13,7
Rejets DBO5 (kg/j) : 3 802 2 941 861 22,6
Rejets Phosphore (kg/j) : 431 343 88 20,4

Conclusion

Bilan technique

  • Augmentation des rendements des décanteurs et globaux de la station ;
  • Diminution des by-pass et des non-conformités ;
  • Gestion facilitée pour la biologie.

Bilan économique

  • Dépenses liées au fonctionnement du dopage (réactifs) et conséquences du dopage – boues supplémentaires à déshydrater : 942 €/j ;
  • Gains réalisés (économies d’énergie et gaz supplémentaire produit) : 346 €/j.

Soit au final, une dépense réelle de 596 €/j pour le fonctionnement du dopage.

Bilan environnemental : réduction de la pollution rejetée

Le dopage a permis d’améliorer les rendements de la station ; on peut donc estimer la quantité de pollution qui aurait été rejetée si le dopage n’avait pas eu lieu.

Globalement, le dopage a permis d’absorber le surplus de pollution dû à l’amélioration du transport des eaux usées et, en plus, à traiter la pollution équivalente à la production d’une ville de 16 000 habitants.

La qualité de l’eau de surface de la Marque canalisée a donc été sensiblement améliorée.

Au vu de ces résultats, la volonté de pérenniser ce dopage a été confirmée par l’adoption d’une délibération à ce sujet par les élus de LMCU. Cette mise en œuvre définitive est prévue pour début 2005 au plus tard.

[Publicité : Éditions Johanet]
Cet article est réservé aux abonnés, pour lire l'article en entier abonnez vous ou achetez le
Acheter cet article Voir les abonnements