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Histoire d'eau : Le sel de table fluoré et l'eau potable

29 janvier 1988 Paru dans le N°115 à la page 66 ( mots)

L’Organisation mondiale de la Santé estime que la carie dentaire doit être considérée comme un véritable fléau planétaire. En France, 80 % des enfants scolarisés en souffrent.

Certains facteurs individuels favorisent cette affection, telle la fragilité dentaire ou la salive. Mais l’alimentation peut également avoir des effets négatifs. Ainsi, il est établi que la prévention de la carie est obtenue par une meilleure hygiène dentaire, une réduction de la consommation de sucre raffiné et des apports de fluor suffisants.

Nos connaissances sur le fluor remontent au début du XXᵉ siècle où des auteurs de différentes nationalités relatent l’observation de taches anormales brunes sur l’émail des dents. Leur présence a été liée à une intoxication fluorique chronique provoquée par la consommation d’une eau excessivement chargée en fluor. Mais ils ont aussi constaté que ces dents étaient plus résistantes à la carie. Ils en ont déduit que le fluor absorbé à un taux raisonnable pouvait jouer un rôle protecteur vis-à-vis des caries dentaires.

Depuis lors, l’utilisation du fluor est passée dans nos mœurs. C’est dans un souci de prévention que le ministère de la Santé a autorisé, depuis le 1ᵉʳ octobre 1986, la mise en vente d’un sel de table fluoré. Sa commercialisation s’assortit de la précaution suivante : « ne pas consommer si l’eau de boisson contient plus de 0,5 mg/l de fluor ».

Pourquoi le sel de table fluoré ?

Les aliments et l’eau de boisson constituent nos apports naturels de fluor.

En effet, tous les aliments renferment cet élément, mais à des concentrations variables en fonction de leur nature et de leur mode de préparation.

Le fluor est également un élément constitutif de l’eau. Sa concentration est variable selon l’origine géographique de la ressource, c’est-à-dire la nature du bassin versant ou de l’aquifère.

Ainsi, dans le bassin parisien, les fleuves renferment des taux de fluor modérés compris entre 0,10 et 0,30 mg/l. Dans d’autres régions, telles que celles d’origine volcanique, les teneurs peuvent être beaucoup plus élevées pour atteindre jusqu’à 10 mg/l. Il faut ajouter que ces teneurs peuvent être augmentées par la fertilisation des sols à l’aide d’engrais phosphatés qui contiennent du fluor.

La dose moyenne de fluor apportée quotidiennement par l’alimentation à l’ensemble de la population est difficilement appréciable compte tenu des habitudes très variées.

Le tableau ci-dessous regroupe certains taux de fluor relevés dans le rapport de l’O.M.S. de 1972.

Miettes de thon : 0,1 mg/kg
Maquereau en conserve : 12,1 mg/kg
Porc : 0,2 mg/kg
Bœuf : 2,0 mg/kg
Agrumes : 0,07 mg/kg
Thé : 97,0 mg/kg

Dans le cas où les apports alimentaires paraissent insuffisants, les dentistes et médecins peuvent conseiller la prise chez les jeunes enfants, de comprimés, pâtes dentifrices ou gommes à mâcher non sucrées fluorés.

Certains pays ont opté pour la fluoration (*) de l’eau de distribution publique, produit consommé par la collectivité. Ainsi, plusieurs grandes villes à travers le monde pratiquent cette prévention collective. La teneur finale de fluor dans l’eau est alors généralement comprise entre 1 et 1,5 mg/l, concentration maximale admissible fixée par la Communauté économique européenne dans l’eau destinée à la consommation humaine.

En France, les autorités sanitaires ont souhaité utiliser pour vecteur le sel de table, produit dont la quasi-totalité des quantités distribuées est consommée alors que dans l’eau, la fraction réellement absorbée est de l’ordre du pourcentage. De ce fait, on limite le risque d’enrichissement progressif en fluor du milieu environnant.

La vente d’un sel de table fluoré à 250 mg/kg vient d’être autorisée par le ministère de la Santé, tout en maintenant le sel non fluoré pour laisser à chacun le choix.

Cette mesure existe en Suisse depuis une vingtaine d’années et certaines études indiquent une réduction de l’importance des caries.

« Ne pas consommer si l’eau de boisson contient plus de 0,5 mg/l de fluor »

Le fluor est présent dans tout notre corps, mais il se localise préférentiellement au niveau des dents et du squelette. Cela explique qu’en cas de surdosage, ce sont ces organes qui sont touchés.

La première atteinte est révélée par l’émail tacheté, encore appelé fluorose dentaire. La fluorose osseuse apparaît pour des quantités supérieures de fluor et se traduit dans sa phase extrême par une croissance anormale du tissu osseux.

L’Organisation mondiale de la Santé estime que la fluorose dentaire pourrait survenir par la consommation régulière d’une eau fluorée à 2 mg/l et que la fluorose osseuse apparaît par la consommation d’une eau contenant 2, voire plus probablement 5 mg/l de fluor.

La concentration maximale de l’eau fixée par la Communauté économique européenne est 1,5 mg/l.

Afin de tenir compte de ces risques d’intoxication chronique et des apports dont nous avons parlé plus haut, le ministère de la Santé a fait apposer sur l’emballage.

(*) Fluoruration et fluoration sont deux termes indifféremment utilisés.

du sel fluoré la précaution d'emploi suivante : « ne pas consommer si l'eau de boisson contient plus de 0,5 mg/l de fluor ».

L'Administration locale est à même de renseigner le consommateur sur la teneur en fluor de l'eau qui lui est distribuée. En outre, la Compagnie générale des eaux précise sur les factures si la teneur naturelle en fluor dépasse ou non le seuil de 0,5 mg/l.

Le fluor, élément naturellement présent dans l'eau, a une teneur qui ne dépend que de la nature du terrain environnant la source et qui est relativement constante pour une rivière donnée. Le traitement classique de potabilisation que subit une eau superficielle ne modifie pas cette caractéristique.

En ce qui concerne le Syndicat des eaux d'Ile-de-France, les eaux provenant des usines de Neuilly-sur-Marne et de Méry-sur-Oise ont une teneur moyenne en fluor de 0,2 mg/l. Celle qui est produite par l'usine de Choisy-le-Roi à partir de la Seine se situe à un niveau légèrement inférieur de 0,15 mg/l.

Les eaux en provenance des nappes albienne et sparnacienne ont des taux de fluor de l'ordre de 0,40 mg/l. Elles restent donc inférieures à un seuil de 0,5 mg/l.

[Encart : Normes françaises (1961) La concentration maximale admissible est de 1 000 µg/l de fluor. Normes européennes (1980) La concentration maximale admissible (CMA) est variable selon la température moyenne de l’aire géographique considérée : 8-12 °C : CMA 1 500 µg/l de fluor 25-30 °C : CMA 700 µg/l de fluor]

Extrait du n° 10 du Bulletin INF EAU du Syndicat des eaux d'Ile-de-France.

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