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La mesure de turbidité : un paramètre essentiel pour les eaux potables comme pour les eaux usées

30 septembre 2005 Paru dans le N°284 à la page 65 ( mots)
Rédigé par : Marie-odile MIZIER

L'évolution des normes sur la qualité de l'eau potable, associée à la dégradation de la ressource, implique un suivi rigoureux de la turbidité. Ce paramètre est également important dans le contrôle de processus et en contrôle qualité des traitements.

[Photo : Michel Issaz]

La turbidité est un effet visuel qui traduit le trouble de l'eau. Elle est due aux particules en suspension stables dans l'eau. Ces particules sont d'origines variées : érosion des terres, dissolution de substances minérales ou encore décomposition de matières organiques végétales et/ou animales. La turbidité, à proprement parler, n'est pas dangereuse, mais elle influence d'autres paramètres et ses répercussions sur la qualité de l'eau sont importantes, tant du point de vue chimique que bactériologique. L'augmentation régulière de la turbidité des eaux brutes est une source de préoccupation.

[Photo : L'Ultra Turb Plus, de Hach-Lange, destiné à l’eau potable, mesure la lumière infrarouge diffusée à 90°, conformément à la norme ISO 7027. Il s’affranchit des problèmes de dégazage (présence de bulles d'air interférant à la mesure de turbidité) puisqu'il fonctionne directement en pression jusqu'à 6 bar. Un système d’auto-nettoyage par essuie-glace sur 3 dimensions élimine les dépôts dans la cellule (source éventuelle de diffusion de la lumière parasite).]

tion pour les traiteurs d’eau. Car il existe une corrélation directe entre turbidité et hydrocarbures, entre turbidité et pesticides, et surtout entre turbidité et contaminations fécales. Les matières en suspension ont une certaine capacité à adsorber les ions métalliques (cuivre, mercure...) ou les composés chimiques, comme les pesticides, ce qui n'est pas acceptable pour produire une eau de qualité. De plus, les micro-organismes s'adsorbent sur les particules en suspension et se développent plus facilement qu'en suspension dans l'eau et les amas ainsi créés les protègent des désinfectants. Il a été démontré une corrélation entre la turbidité et la présence des kystes de Cryptosporidium. Un lien a d'ailleurs été mis en évidence sur le terrain (recrudescence des gastro-entérites après les crues, par exemple) et par l'analyse : la teneur en Cryptosporidium est directement corrélée à la turbidité. Elle est ainsi devenue un indicateur de la présence de ces microorganismes. Représentant la somme de tous les matériaux non dissous dans l'eau, la turbidité est un paramètre visuellement détectable par le consommateur. Toutes les étapes nécessaires pour le traitement de l'eau potable peuvent être surveillées et contrôlées par la mesure de turbidité. Son suivi en continu permet donc d'adapter en temps réel les conditions de traitement.

Un paramètre sous étroite surveillance

Pour limiter la présence de parasites Cryptosporidium et Giardia dans les eaux de boisson, la réglementation renforce la valeur limite de la turbidité de l'eau. Aujourd'hui, la réglementation française exige un niveau maximum de 1 NFU (limite de qualité) et indique qu'un niveau de 0,5 NFU est souhaitable (référence de qualité). Ces deux valeurs sont certainement à rapprocher de la limite de 0,3 NTU exigée par la réglementation américaine, et qui constitue probablement la prochaine étape réglementaire européenne.

En parallèle, les traiteurs d'eau doivent faire face à la dégradation de la ressource et à une exigence de service continue de la qualité des traitements. Aucun procédé traditionnel de traitement ne peut à lui seul éliminer toute la turbidité présente dans une eau. De ce fait, la turbidité est peu à peu devenue un paramètre de mesure de l'efficacité des traitements appliqués pour la production d'eau destinée à la consommation humaine.

La turbidité : une mesure de l'efficacité du traitement

Dans les pays de l'Union Européenne soumis à la norme ISO 7027/EN 27027, la mesure est effectuée en lumière infrarouge à la longueur d'onde de 860 ± 60 nm. Celle-ci provient d'une cellule de mesure dont le rayonnement de la photodiode émettrice à l'infrarouge traverse le liquide à mesurer.

[Encart : Le CTME et l'IRA montent une structure opérationnelle commune En s'associant avec l'IRA (Institut de Régulation d'Arles), le CTME (Centre Technique des Mesures de l’Eau) dispose maintenant d'une structure opérationnelle de formation et de tests d’équipements. L'institut travaille en complément du LNE (Laboratoire National d'Essai) au développement de moyens d'évaluation des instruments de mesure de l'eau. L'installation prévue devrait comporter deux circuits d'essai, un de petit volume pour le test des polluants toxiques et un autre plus important puisque équipé d'une cuve de 200 l. Ces bancs qui représentent un investissement de 300 000 € devraient être opérationnels d'ici l'été 2006 et serviront à la qualification des appareils. L'objectif à terme est d'aller vers la certification des appareils dans le cadre d'un accord LNE/IRA où l'IRA ferait l'évaluation du matériel, le LNE apportant son soutien pour la partie administrative. Outre cette expertise technique, l'IRA a mis en place des sessions de formation destinées aux techniciens des collectivités locales chargés de la production et de la maintenance des unités de traitement des eaux. Rappelons que l'IRA est un organisme qui émane de la CCI d'Arles. Il travaille depuis 40 ans dans la formation et l'assistance technique en matière de régulation et d'automatismes intégrant les moyens de mesures automatiques.]
[Encart : Les valeurs de turbidité Eau potable : 0,01 à 0,5 NTU Eaux de source : 0,05 à 10 NTU Eaux usées non épurées : 70 à 2000 NTU Boues actives : 3,6 g/l Boues concentrées : 30 à 70 g/l]
[Photo : Neotek propose une large gamme de turbidimètres et MESmètres. La mesure s'effectue à l'aide d'une lumière infrarouge selon la norme ISO 7027. Chaque modèle est proposé avec ou sans nettoyage automatique.]
[Publicité : Faure Équipements SA]
[Publicité : HACH + LANGE]
[Encart : Dans les pays de l'Union Européenne soumis à la norme ISO 7027/EN 27027, la mesure est effectuée en lumière infrarouge à la longueur d'onde de 860 ± 60 nm. Certains turbidimètres présents sur le marché travaillent en lumière visible selon la norme américaine EPA 180.1 comme le modèle 1720 E de Hach Lange. Les mesures sont alors exprimées en NTU quelle que soit la valeur de la turbidité. D'autres appareils, comme le Clarity II d'Emerson ci-dessous, sont capables de mettre en œuvre l'une ou l'autre des deux méthodes.]
[Photo : L'AMI Turbitrace de Swan mesure la turbidité basse dans les eaux pures et ultrapures.]

Ce principe est utilisé dans de nombreux instruments chez ABB (cellule 7997), Aquacontrol (turbidimètre TU 7685), Anael avec la gamme Monitek, Bamo, Endress+Hauser, Kobold avec son LAT N3, Hach Lange avec Ultraturb, Hanna Instruments (HI 93703 et LP 2000), Mettler Toledo (Trb8300), Neotek (gamme Ponsel), Seres (Turbilight) Sigrist (et son WTM500), EFS avec l'EFS 8332 ou Swan avec l'AMI Turbitrace ou encore Züllig (sur Cosmos-25)...

Certains turbidimètres présents sur le marché travaillent en lumière visible selon la norme américaine EPA 180.1 comme le modèle 1720 E de Hach Lange. Les mesures sont alors exprimées en NTU quelle que soit la valeur de la turbidité. D'autres appareils, comme le Clarity II d'Emerson, sont capables de mettre en œuvre l'une ou l'autre des deux méthodes.

Lorsqu'on observe cette lumière rétrodiffusée sous un angle défini par rapport au rayon incident, la quantité de lumière réceptionnée est liée à la turbidité de l'eau.

[Photo : La cellule de mesure intégrée à l'ensemble IR 102 de Bamo Mesures se sert de deux émetteurs et d'un récepteur intégrant un module d’analyse électronique commandé par micro-processeur. Le capteur délivre un signal 4-20 mA en phase avec sa plage de mesure de 1 à 1000 NTU (IR 102-1000) et de 0,1 à 20 NTU (IR 102-20).]

Une seconde photodiode réceptrice recueille la lumière rétrodiffusée par les particules sous un angle défini. Si la turbidité est inférieure à 40 NTU (unité de turbidité néphélométrique), la lumière diffusée est mesurée sous une incidence de 90°. Dès que la turbidité dépasse 40 NTU, celle-ci est mesurée sur la lumière transmise. Mais attention, il n’est pas toujours possible de comparer les unités entre elles, lorsqu'elles ne font pas appel à la même méthode de mesure.

[Photo : Avec son détecteur de voile de boues CUC 101, Endress+Hauser mesure la turbidité par extinction d'une lumière monochromatique pulsée.]
[Photo : Le turbidimètre LAT-N3 de Kobold, qui se distingue par sa compacité, est utilisé pour mesurer des fluides présentant un degré de turbidité allant de faible (turbidité visible) à très fort.]

Certains fabricants, comme Hanna Instruments, proposent des gammes de produits différentes répondant à l'une ou l'autre des deux normes.

Les deux mesures sont basées sur le principe de la néphélométrie, seule la longueur d'onde du faisceau change. Ce principe est basé sur le fait que les particules en suspension dans l'eau diffusent la lumière qu'elles reçoivent avec plus ou moins d'intensité.

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Un guide de choix sur les turbidimètres

L'Exera* qui regroupe des industriels de tailles et d’horizons variés vient de publier un guide de choix consacré aux turbidimètres. Ce document de près de 90 pages, complet et clair car très concis, a pour objectifs de faciliter et d'orienter rapidement l'utilisateur dans son choix en lui faisant gagner un temps précieux. Il est composé de trois chapitres. Le premier rappelle succinctement les principes de mesure, les unités utilisées, les méthodes et techniques optiques couramment employées, ainsi que la réglementation et les normes concernant la turbidité des eaux destinées à la consommation humaine. Le second chapitre s'attache à fournir une description des turbidimètres retenus lors de l'enquête et une présentation de ceux-ci par méthode de mesure. Le troisième chapitre, qui constitue le cœur de l'étude, présente au lecteur un choix par tableaux destiné à faciliter ses recherches en déterminant les turbidimètres les mieux adaptés à ses besoins et applications. Plusieurs catégories de tableaux sont disponibles. La première regroupe les différents modèles de turbidimètres par méthode de mesure, la seconde par domaine d'applications. La troisième catégorie de tableaux fournit un classement des turbidimètres par coûts et la quatrième établit un classement des performances métrologiques, des coûts et des prestations des différents constructeurs. Au total, un document très complet, incontournable pour tous les utilisateurs et exploitants de ce type d’instrument. Ce guide de choix, accessible aux non-membres, est en vente à l'Exera. Renseignements complémentaires : http://www.exera.com — Tél. : 33 (0)1 53 32 80 08

* Association des Exploitants d'Équipements de Mesure, de Régulation et d'Automatismes.

[Photo : Vue du turbidimètre Trb 8300F/S avec sonde InPro8400 de Mettler Toledo. Il mesure la turbidité par diffusion avant et à 90° de la lumière ou simplement par diffusion avant. Il est adapté aux mesures des très faibles et moyennes turbidités (0 à 400 NTU ou 0 à 400 FTU).]

La lumière diffusée par l'observateur est proportionnelle à la quantité de particules en suspension dans l'eau. Par ailleurs, lorsqu'on doit comparer des résultats, il faut faire attention, les mesures comparatives ne devant être réalisées que sur un même appareil.

Enfin, la fiabilité de la mesure de la turbidité est remise en cause, car celle-ci est influencée par le type (composition et taille) et le nombre de particules dans l'échantillon. En comparaison, le comptage de particules permet une classification et un dénombrement précis des particules contenues dans l'eau, ce qui en fait un outil de plus en plus utilisé dans la production d'eau destinée à la consommation humaine.

Pour les concentrations plus élevées de turbidité ou de MES, WTW a développé depuis plusieurs années deux sondes : la Visoturb (0,05 à 4000 FNU) et la Visolid, directement en mg/l pour les MES (0,0003-1000 g/l). Pour ces deux sondes, les matériaux utilisés ainsi qu'un nettoyage par ultrasons permettent de garantir simplement et efficacement la qualité des mesures. Cette génération d'appareil permet en outre de piloter jusqu'à 20 capteurs sur un même afficheur. D'autres instrumentistes ont développé des appareils de mesures d'interfaces et des détecteurs de voiles de boues.

[Photo : Hach Lange propose la détection du voile de boue par ultrasons avec le Sonatax, sonde ultrasonique auto-nettoyante avec unité d'affichage.]

Détecter les voiles de boues

Ces appareils sont conçus pour mesurer la zone d'interface et de voile de boues dans les processus de sédimentation. Ils mettent en œuvre des principes de mesure qui diffèrent selon les constructeurs.

[Encart : Le contrôle du point zéro : une notion fondamentale « Pour les mesures inférieures à 0,5 NTU, la certitude du point zéro est primordiale », explique Yann Bouvier, Gérant de Swan Instruments d'Analyse France. « Car quel que soit le principe de nettoyage ou le procédé de mesure, en cas d'encrassement de l'optique et si le point zéro n'est pas contrôlé, la mesure dérive doucement et rien ne permet de le savoir, sauf à se déplacer sur site pour le contrôler ». C’est pour cette raison que Swan a développé le Turbitrace, un instrument muni d'un filtre à particules et d'une vanne multivoie pilotée par l'instrument, permettant ainsi un autocontrôle régulier du point zéro optique, en faisant passer régulièrement l'échantillon sur le filtre particule pour vérifier et éventuellement recalibrer le point zéro pour compenser un éventuel encrassement de la cellule de mesure, et cela jusqu’à un certain niveau où est alors déclenchée une alarme d’encrassement. « Ce principe, ajoute Yann Bouvier, permet d’être certain de la qualité de la mesure. De plus, l'instrument est doté de son propre datalogger, conservant ainsi ensemble des valeurs de mesure, mais aussi des différentes calibrations, le tout consultable soit directement au clavier de l'instrument, soit via Internet à l'aide de notre système de communication Web Server. D'autre part, nous avons éprouvé notre cuve de mesure à 20 bar, nous permettant ainsi de certifier une plage d'utilisation de 1 à 10 bar. Il possède sa propre vanne de régulation de pression favorisant l'implantation de notre turbidimètre sur la plupart des réseaux sans avoir besoin de prévoir le moindre accessoire de raccordement ».]

rent de la néphélométrie. Avec Sludge Tracker, ATI (représenté en France par Équipements scientifiques) utilise les ultrasons sous une incidence de 6° et Solartron Mobrey sur son MSL 600 met en œuvre le principe du sonar. Quant à Endress+Hauser, son détecteur de voile de boues CUC 101 mesure la turbidité par extinction d'une lumière monochromatique pulsée.

[Photo : Le WTM 500 de Siemens Process Instruments permet une mesure jusqu'à 0,01 FNU. Sa technologie en jet libre, sans contact, et son système d'autocalibration en font un appareil nécessitant une maintenance réduite à son minimum.]

Les détecteurs de Royce, commercialisés en France par Cometec, utilisent 1 ou 2 capteurs optiques. Le modèle 2110, à un seul capteur, permet de monter un seuil d’alarme sur un bassin. Le modèle 2120 utilise deux capteurs et peut ainsi commander la marche et l’arrêt d'une pompe entre deux seuils. À noter que Royce propose également des moniteurs de voile de boues permettant de connaître en permanence la position du voile de boues dans tous les bassins décanteurs, décanteurs lamellaires, clarificateurs, épaississeurs ainsi que dans certains process industriels.

Ces moniteurs fonctionnent selon le principe du sonar, le capteur émet des ultrasons qui sont réfléchis par les particules en suspension dans le bassin. Chaque variation de concentration est visible par l'utilisateur qui choisit l'interface à poursuivre.

La réalisation de toutes ces mesures optiques implique de prendre certaines précautions comme éviter les bulles d'air ou l'encrassement des fenêtres de mesure. Les constructeurs d'appareils de mesure de turbidité ont travaillé sur ce sujet délicat en soignant l'ergonomie des têtes de mesure (Sigrist) ou en utilisant des matériaux peu sensibles aux salissures complétés par un nettoyage par ultrasons (WTW).

[Photo : WTW a développé depuis plusieurs années deux sondes : la Visoturb (0,05 à 4 000 FNU) et la Visolid directement en mg/l pour les MES (0,0003-1000 g/l). Pour ces deux sondes, les matériaux utilisés ainsi qu'un nettoyage par ultrasons permettent de garantir la qualité des mesures.]

D'autres ont opté pour des équipements de nettoyage de type piston racleur comme ABB, Endress+Hauser, Neotek, Seres ou encore de type essuie-glace comme Hach Lange.

[Photo : L'offre de Royce Technologies, commercialisée en France par Cometec, comprend des détecteurs ainsi que des moniteurs de voiles de boues permettant de connaître en permanence la position du voile de boues dans tous les bassins décanteurs, décanteurs lamellaires, clarificateurs, épaississeurs ainsi que dans certains process industriels.]
[Publicité : Guide de l’Eau]
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