Conduire une gestion patrimoniale optimale des réseaux d'assainissement requiert de plus en plus des solutions informatiques capables de supporter la quantité et la diversité des données à analyser. La mise en ?uvre d'une organisation optimisée est également indispensable pour fiabiliser les informations et programmer aux mieux investigations et travaux de réhabilitation. La gestion des inspections télévisées illustre parfaitement ces besoins. Si la normalisation a amené des avancées avec l'encodage des inspections (Norme EN13508-2), leur intégration dans les bases de données patrimoniales n?est pas sans poser quelques difficultés. Avec le développement d'un module dédié à cette activité et l'accompagnement des différents acteurs, Veolia Eau garantit la qualité des informations et leur parfaite intégration dans son SIG.
La gestion des inspections télévisées illustre parfaitement ces besoins.
Si la normalisation a amené des avancées avec l’encodage des inspections (Norme EN13508-2), leur intégration dans les bases de données patrimoniales n’est pas sans poser quelques difficultés. Avec le développement d’un module dédié à cette activité et l'accompagnement des différents acteurs, Veolia Eau garantit la qualité des informations et leur parfaite intégration dans son SIG.
Dégradation des réseaux d’assainissement enterrés
Les années passent et, à l'abri des regards, les réseaux d’assainissement enterrés se dégradent. Ils représentent la première valeur patrimoniale de bon nombre de collectivités, et sans réaction des gestionnaires, il faudrait s'attendre à davantage de désordres et l'augmentation du nombre d’interventions pour compenser les défauts fonctionnels. Il est donc primordial d’ajuster les actions et d'identifier les travaux pour maintenir un niveau de service optimal, avec une attention particulière pour la maîtrise des coûts. C'est dans cette optique que Veolia Eau développe des méthodes et des outils informatiques, pour proposer aux collectivités des services adaptés pour optimiser la gestion patrimoniale de ces infrastructures.
Réseaux d'assainissement et facteurs de vieillissement
Les réseaux d'assainissement, construits au fil des ans et depuis plus d'un siècle pour certains, sont encore en phase d’extension. Si le vieillissement d’une canalisation dépend beaucoup de son matériau, les conditions de pose jouent aussi une influence majeure. Elles déterminent des périodes qui ont un impact marquant sur la durée de vie des ouvrages : les grands travaux du XIXe siècle, l'effort quantitatif au détriment de la qualité de 1950 à 1980 ou la réglementation apparue dans les années 90 sur les contrôles de qualité des travaux neufs par exemple. Mais il est admis que d’autres critères expliquent ce vieillissement, parmi lesquels les sollicitations diverses de l'environnement : les nappes et leurs fluctuations, le comportement des sols selon les variations climatiques, la topographie provoquant érosion ou dépôt des matières en suspension, les activités urbaines, la densification des réseaux divers,... À noter également des agressions chimiques de plus en plus fréquentes : la composition des effluents qui transitent se modifie avec des temps de séjour qui s’allongent, en zone rurale via de longs refoulements comme en zone urbaine avec des longueurs cumulées de réseau de plusieurs milliers de kilomètres. Le réseau,
jusqu’alors considéré comme simple infrastructure de transport, est de plus en plus le siège d'une dégradation biologique.
Voici autant de raisons qui expliquent que l’on observe pour les réseaux d’assainissement une grande variabilité de leurs performances techniques et leurs aptitudes à répondre aux niveaux de service attendus par les usagers et la réglementation. L’évaluation de cette performance selon trois composantes (hydraulicité, étanchéité et pérennité structurelle) est une étape clé pour mettre en œuvre une gestion patrimoniale cohérente. C’est à la fois le point de départ de l'analyse technico-économique qui conduit à décider des actions à engager, et le moyen de mettre en évidence leur pertinence. Cette évaluation s’appuie bien entendu sur l'état visuel des ouvrages, préalable indispensable aux travaux de réhabilitation, mais aussi sur d'autres informations : l’historique des obstructions, la mesure des déversements au milieu naturel, l’estimation du taux d’infiltration par temps sec et des surfaces imperméabilisées, les résultats des contrôles de conformité des branchements des particuliers et des industriels,...
Cependant connaître la performance intrinsèque du réseau ne suffit pas pour prendre les meilleures décisions, et comme l’a explicité le Projet National Rehaur (Réhabilitation des Réseaux d’Assainissement Urbains) voilà près de dix ans maintenant, la vulnérabilité de l'environnement sous ses divers aspects (milieu superficiel, nappes souterraines, urbanisation et activités économiques...) doit être prise en compte dans l’analyse des risques associés aux dysfonctionnements. Cette analyse des risques repose donc sur de nombreuses données, et en fiabiliser la collecte et la gestion présente certaines difficultés :
• Inventaire patrimonial : tronçons, regards, équipements, ouvrages divers.
• Informations collectées au quotidien lors des actions d’exploitation.
• Indicateurs issus de l'étude du fonctionnement des différentes antennes.
• Données cartographiques relatives à l’environnement des ouvrages.
Disposer d’un SIG couplé à des fonctionnalités spécifiques est indispensable pour effectuer l’analyse des risques
Le gestionnaire qui élabore les programmes de travaux et l’exploitant qui optimise au quotidien la planification des activités doivent pouvoir s’appuyer sur un outil qui offre une vision détaillée de l'inventaire patrimonial et un accès à l'historique et aux programmes des interventions.
La consolidation de cette base requiert des moyens de mise à jour rapides et simples pour que tous les renseignements utiles soient efficacement intégrés, en particulier les indications techniques propres à la gestion des réseaux : la description de l’antenne de réseau curée ou inspectée, les résultats de l'étude des mesures hydrauliques à l'aval d'un bassin de collecte... Les analyses complexes qui sont réalisées traitent des données de formats multiples, d’étendues diverses (ponctuelle, linéaire et surfacique) et d’échelles plus ou moins larges : le regard ou le branchement, le tronçon de quelques dizaines de mètres, la rue et le quartier, les bassins de collecte déterminés par des points caractéristiques du réseau et des points de déversement (déversoir d’orage ou trop-plein de station de pompage), l’aire géographique associée à la sensibilité des nappes ou l’urbanisation...
De telles fonctionnalités de consultation, de consolidation et d’analyse sont une aide pour l’ensemble du service chargé de la gestion des réseaux d’assainissement, et la qualité des informations enregistrées et leur agencement au sein d'une base de données sont un gage de réussite. L’utilisation d'un Système d'Information Géographique (SIG) est donc une nécessité, mais doit être complétée par l'utilisation de modules spécifiques au métier d’exploitant.
Veolia Eau continue d’améliorer une solution informatique de ce type dans le cadre du développement de son offre relative à la gestion patrimoniale des réseaux d’assainissement :
• Ajout d'un module d’intégration des résultats d’inspections télévisées dans GIMS, son SIG web.
• OctaVE, outil d’aide à la décision dédié à l’Optimisation de la Collecte et du Transfert en Assainissement : validation de l'en-
codage des inspections télévisées et aide à la programmation des investigations et des travaux, d’après la méthodologie décrite dans l'ouvrage Gestion Patrimoniale des Réseaux d’Assainissement Urbains (Projet National Rerau).
Encoder des inspections télévisées à la Norme EN13508-2 pour capitaliser les résultats
Le XXᵉ siècle a vu la création et l’extension des réseaux d’assainissement, tandis que plusieurs études telle que Inventaire et scénario de renouvellement du patrimoine d'infrastructures des services publics d’eau et d’assainissement (OIEau - avril 2002) montrent que le XXIᵉ siècle sera probablement celui de la réhabilitation ; l'inspection visuelle préalable des ouvrages est alors incontournable. Cette prise de conscience s'accompagne d'une évolution de la réglementation et de la normalisation, l’inspection télévisée devient un véritable outil de gestion patrimoniale.
Si l'inspection télévisée est utilisée depuis les années 70 pour comprendre l’origine de dysfonctionnements, elle est obligatoire depuis les années 90 pour contrôler la qualité des travaux neufs et préconisée aujourd'hui pour surveiller le fonctionnement d'un système de collecte (arrêté du 22 juin 2007). C’est également un moyen de mettre à jour l'inventaire patrimonial (longueurs des tronçons, matériaux, formes et dimensions) et donc de participer aux objectifs de la Loi Grenelle 2 (12 juillet 2010) et dans une moindre mesure à la réglementation relative à l’exécution de travaux à proximité de certains ouvrages souterrains (arrêté du 5 octobre 2011).
La normalisation au niveau européen du système de codage de l’inspection visuelle des branchements, des collecteurs, des regards de visites et des chambres d’inspection (NF EN 13508-2 publié par l’Afnor en septembre 2003) permet d’assurer une homogénéité des rapports d’inspection sous une forme exploitable informatiquement (le fichier encodé), et donc de faciliter leur valorisation. Certaines collectivités françaises ont d’ailleurs décidé de mettre en œuvre des campagnes ambitieuses d'inspection pour connaître l'état fonctionnel et structurel de leurs ouvrages. En Allemagne où l’encodage est une pratique plus ancienne, dans des villes de tailles diverses comme Berlin ou Brunswick, la majorité des tronçons a été inspectée, voire même parfois à plusieurs reprises, afin de suivre l'état des ouvrages et d’estimer leurs durées de vie.
Ainsi, le rapport d’inspection télévisée n'est plus soigneusement rangé dans une armoire une fois les actions d’urgence identifiées et les observations peuvent être capitalisées dans un SIG, dès lors que :
- Une organisation coordonnée est établie, car des acteurs aux compétences diverses sont impliqués : le responsable définit les priorités d’inspection ; l’opérateur réalise l’inspection, équipé d’un matériel utilisant des technologies modernes (caméra sur chariot et logiciel d’encodage) ; le cartographe édite le plan sur lequel figurent les collecteurs à inspecter, et met ensuite à jour la base de données partagée par tous.
- Les fichiers sont encodés correctement. La difficulté majeure reste aujourd’hui la qualité de ces fichiers : les logiciels de saisie des inspections télévisées ne maîtrisent pas l’encodage proposé par la Norme, et les opérateurs sont insuffisamment formés.
Assurer un encodage de qualité des inspections télévisées
Suite à l’analyse de nombreux fichiers encodés, la Direction Technique de Veolia Eau a dressé ce constat : il est nécessaire de définir des procédures de validation pour identifier les anomalies d’encodage, qu’elles soient imputables aux logiciels de saisie ou aux opérateurs.
Le respect de la Norme représente une contrainte forte pour l’opérateur et les mises à jour des logiciels n’ont pas été accompagnées d’évolutions ergonomiques adaptées : les observations à décrire sont les mêmes mais les informations à renseigner plus nombreuses. La Norme introduit 43 codes distincts pour l'inspection des collecteurs, c’est-à-dire une liste exhaustive d’éléments à la disposition de l’opérateur pour restituer des observations qui peuvent être complexes. Il est fréquent de combiner plusieurs codes : un branchement pénétrant mal renformi se décrit avec les codes Raccordement, Branchement pénétrant et Raccordement défectueux ; le blocage de la caméra par un obstacle avec les codes Inspection terminée avant le nœud d’arrivée et la description de l’obstacle ; deux fissures en radier et en voûte imposent de doubler le code Fissure ; une flache demande à minima la présence de 3 codes Niveau d’eau correspondant au début, au maximum et à la fin du niveau d’eau anormal… Certains codes peuvent être complétés par une quantification, parfois indispensable pour juger de la gravité d'un défaut : par exemple pour faire la différence entre deux fissures ouvertes de 2 mm ou de 5 cm alors que l’opérateur aurait préféré sélectionner « fissure légèrement ouverte » ou « large fissure »…
La Norme introduit une notion structurante du fichier encodé qui ne devrait pas impacter le travail de l’opérateur : « l’inspection depuis un nœud en direction d’un…
autre ». Or c'est « le tronçon entre deux regards connus », qui est l’entité structurante des rapports d'inspection télévisées que les techniciens consultent depuis des dizaines d’années. Ce changement paraît anodin mais il est pourtant à l'origine d'anomalies d'encodage pour décrire un tronçon inspecté dans les deux sens à cause d'un obstacle empêchant le passage de la caméra, ou lorsque l’opérateur découvre un regard sous bitume. Dans ces deux exemples, il faut considérer deux inspections et non plus un seul tronçon. Il est également à l'origine d'erreurs dans les cumuls des longueurs inspectée et non inspectée, en général indiquées dans la synthèse d’un rapport au format papier. Certains logiciels ont encore du mal à tenir compte de cette notion et si seul l’un des deux supports doit être correct, c’est le rapport papier qui reste malheureusement privilégié aujourd’hui !
À ces anomalies d'encodage s’ajoutent les contraintes dues au rapprochement avec les tronçons dans le SIG. Il s’agit d’assurer la concordance entre l’inventaire patrimonial du cartographe et la réalité du terrain que rencontre l’opérateur. Le tracé du réseau doit être identique et une même dénomination des ouvrages s'impose : les regards ne peuvent plus s’appeler de manière identique pour toutes les rues, R1, R2, R3 etc...
Pour assurer la validité des fichiers encodés utilisés par ses équipes, Veolia Eau a donc porté ses efforts sur ces deux fronts : la correction des logiciels de saisie et la formation des opérateurs. Les logiciels utilisés par les opérateurs, qu’ils soient agents de Veolia Eau ou prestataires, ont tous été testés pour dresser la liste des anomalies d'encodage. Puis la plupart des éditeurs a été contactée pour effectuer les corrections nécessaires, par chance au moment où l’édition de la version modifiée de la Norme (août 2011) les obligeait déjà à effectuer une mise à jour. En interne, il s'est agi de mettre en place des formations portant sur la maîtrise opérationnelle de la Norme : elles sont dispensées conjointement aux opérateurs, aux cartographes et aux responsables qui suivent le fonctionnement du réseau. C'est également l'occasion du déploiement de l’outil OctaVE, développé par la Direction Technique pour aider chacun à valider les fichiers encodés : plus de 80 types d’anomalies d'encodage ont été relevées.
Valoriser les résultats des inspections télévisées encodées grâce à une solution informatique complète
Les inspections télévisées permettent d’améliorer en continu l’inventaire patrimonial des canalisations, d’avoir une photographie de l'état des canalisations à un instant précis, voire de suivre leur vieillissement dans le cas d'inspections répétées. C’est pour atteindre ces objectifs de manière automatisée que Veolia Eau a développé dans GIMS, son SIG web, un module capable d’intégrer les fichiers encodés à la Norme EN13508-2 (versions 2003 et 2011). Dès lors que le fichier est valide, il suffit d'un clic. Des inspections pour lesquelles les identifiants n’ont pas pu être validés sont quant à elles intégrées en pointant simplement le tronçon sur la carte : la reprise de l’historique est donc assurée.
Avec cet outil, l’ensemble des informations relevées lors de l'inspection est enregistré dans la base de données et peut être consulté dans la cartographie via des thématiques et par l'intermédiaire de fiches de consultation :
- • Caractéristiques des tronçons (matériau, forme, dimensions...).
- • Informations concernant l'inspection (date, conditions d’inspection…).
- • Défauts et observations diverses (localisation des branchements…).
Par ailleurs, l'utilisateur peut associer les fichiers de son choix aux canalisations inspectées (rapport PDF notamment), et les photographies aux défauts.
Comme le précise Germain Maubert, exploitant Veolia Eau de réseaux d'assainissement dans le Nord, c’est avant tout la possibilité d’archiver les inspections et de les rendre facilement consultables qui est intéressante : « Avec ce module nous avons intégré au SIG l'ensemble du linéaire inspecté en 2012 très rapidement. Nous accumulons pour le moment des informations, et quand le linéaire sera important nous noterons automatiquement les tronçons ; auparavant, même si les rapports d’inspection étaient archivés, il était fastidieux de reconstituer des synthèses ». En effet, il suffit d’un accès web pour suivre l’avancée du programme d'inspections contractuel et consulter l'inspection d’un collecteur, mais aussi pour lancer des requêtes et accéder à une information structurée (par exemple les rues sous lesquelles des canalisations contiennent des racines)...
De nouvelles fonctionnalités liées aux données enregistrées vont être intégrées prochainement à ce module. La première concerne la mise à jour des caractéristiques du patrimoine à l'aide de rapports basés sur la cartographie, dans lesquels sont comparées les données contenues dans le SIG et celles indiquées lors de l’inspection (diamètre, matériau, revêtements particuliers, type d’emplacement, profondeur, localisation des branchements…). La seconde assure la gestion de l’historique des inspections et des tronçons. Seule l’inspection la plus récente est affichée, même si celles qui auraient été réalisées sur le même tronçon au préalable sont également
conservées, que ce tronçon soit encore en service ou qu'il ait été déposé dans le cadre d'un renouvellement par exemple. Dans le cas particulier d'un tronçon inspecté dans les deux sens à cause d’un obstacle, les deux inspections sont agrégées.
Conclusion et perspectives
La norme EN13508-2 définit un système de codage complet pour rendre compte de l’inspection visuelle des ouvrages dans des fichiers encodés. L’édition de tels fichiers facilite l’enregistrement dans une base de données et, avec une solution informatique adaptée, les observations deviennent facilement accessibles à tous et exploitables pour construire des programmes de réhabilitation. Le processus d’intégration est cependant sensible à la qualité de l’encodage : une formation approfondie des opérateurs s’impose, ainsi que l’évolution des logiciels pour optimiser la saisie des informations.
C'est avec le temps que ces outils vont porter leurs fruits, et la meilleure connaissance du fonctionnement des réseaux et de leur état va donner les moyens de fiabiliser des analyses qui ont encore été trop peu confrontées à la réalité du terrain. Il s’agit dans un premier temps de limiter les incertitudes sur la programmation des travaux, mais bientôt également de mieux appréhender le vieillissement des ouvrages et d’engager des réflexions plus cohérentes pour évaluer les investissements nécessaires dans les décennies à venir.

