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La nouvelle réglementation relative à la qualité sanitaire des eaux de baignade : un outil efficace de gestion

28 septembre 2007 Paru dans le N°304 à la page 96 ( mots)
Rédigé par : V. SALBERT, A. MORMENTYN et M. CATHELAIN

La qualité sanitaire des eaux de baignade est devenue ces dernières années un enjeu majeur du développement touristique des communes littorales. Les collectivités locales ont entrepris de nombreux efforts pour améliorer la qualité de leurs eaux de baignade. Efforts qui se sont traduits sur le littoral du Pas de Calais, du Nord et de la Somme par une très nette amélioration de la situation sanitaire du littoral depuis le début des années 80 (figure 1) sous l'impulsion d'une politique active et volontariste de l'Agence de l'Eau Artois Picardie et des acteurs locaux du bassin Artois Picardie.

La qualité sanitaire des eaux de baignade est devenue ces dernières années un enjeu majeur du développement touristique des communes littorales. Les collectivités locales ont entrepris de nombreux efforts pour améliorer la qualité de leurs eaux de baignade. Efforts qui se sont traduits sur le littoral du Pas-de-Calais, du Nord et de la Somme par une très nette amélioration de la situation sanitaire du littoral depuis le début des années 80 (figure 1) sous l’impulsion d’une politique active et volontariste de l’Agence de l’Eau Artois Picardie et des acteurs locaux du bassin Artois Picardie.

Plus de dix ans après son initiation et après de nombreux débats, le nouveau texte a été adopté le 15 février 2006 et instaure de nouvelles règles notamment quant au calcul de l'indice annuel de qualité des eaux de baignade.

Le propos de cet article est de montrer l'intérêt de cette nouvelle directive comme outil de gestion de la qualité des eaux de baignade au travers de son nouveau mode d’évaluation de l'indice annuel de qualité. Il se base sur des résultats d'une étude réalisée par SAFEGE Environnement pour le compte de l’Agence de l’Eau Artois Picardie.

L’indice annuel de qualité des eaux de baignade : un outil de gestion

Les analyses du suivi sanitaire de la DDASS opéré sur les zones de baignade pendant la saison balnéaire font l'objet d’une analyse synthétique à l'échelle d'une saison. Cette dernière analyse permet de répartir les différentes plages en quatre classes de qualité A (eaux de bonne qualité), B (eaux de qualité moyenne), C (eaux pouvant être polluées momentanément) et D (eaux de mauvaise qualité) selon les critères définis dans le décret n° 81-324 du 7 avril 1981. Dans cette méthode, la concentration n'est pas utilisée directement pour le classement puisque c'est le pourcentage de la totalité des résultats au-dessus de la valeur seuil qui permet

[Photo : Évolution de la qualité sanitaire des eaux de baignade sur le littoral du bassin Artois Picardie (DDASS 59, 62, 80).]

Tableau 1 : Critères de classification annuelle des sites de baignade proposés par la nouvelle directive

Paramètres Excellente qualité Bonne qualité Qualité suffisante Qualité insuffisante
Entérocoques intestinaux < 100 germes / 100 ml < 200 germes / 100 ml < 185 germes / 100 ml > 185 germes / 100 ml
Escherichia coli < 250 germes / 100 ml < 500 germes / 100 ml < 500 germes / 100 ml > 500 germes / 100 ml
Évaluation Au 95ᵉ percentile Au 95ᵉ percentile Au 90ᵉ percentile Au 90ᵉ percentile

Le nombre de prélèvements devient un paramètre tout aussi important que la valeur par elle-même puisqu’en fonction du nombre de prélèvements le poids d'une donnée sera plus ou moins élevé. Il est donc ainsi préférable de disposer de 20 prélèvements (poids de chaque prélèvement 5 %) que de 19 prélèvements (poids de chaque prélèvement 5,3 %) puisque cela permet de s'affranchir dans le classement annuel d’un mauvais résultat. D’autre part, le mode de classement actuel donne la part belle à l'indicateur Escherichia coli au détriment des entérocoques intestinaux. Ces derniers ne servent qu’à séparer les eaux de bonne et de moyenne qualité tandis que l’indicateur Escherichia coli permet de scinder les eaux conformes à la réglementation de celles considérées comme non conformes.

La nouvelle directive européenne prévoit que la qualité des eaux de baignade soit évaluée à l'issue de chaque saison balnéaire sur la base de l'ensemble des résultats recueillis lors des quatre dernières saisons contrairement à actuellement où seules les analyses de l'année en cours sont prises en compte. Les plages sont toujours regroupées en quatre classes de qualité (tableau 1) mais, en simplifiant les choses, les plages comprises dans les trois premières classes seraient conformes aux nouvelles exigences réglementaires.

La répartition dans les différentes classes s'appuie sur l’évaluation au 95ᵉ (ou 90ᵉ) percentile de la fonction normale de densité de probabilité en log₁₀ des données bactériologiques Escherichia coli et entérocoques intestinaux. Le 95ᵉ percentile est la valeur sur l'axe des abscisses représentant 95 % de la surface de l’enveloppe des fréquences classées des concentrations bactériennes.

Une des grandes nouveautés est donc de disposer pour chaque plage d'une valeur numérique, chaque année servant de niveau de référence de la qualité des eaux de baignade contrairement à actuellement où seule la classe de qualité est disponible. Cette valeur permet un suivi beaucoup plus précis de l’évolution de la qualité sanitaire d'une plage et des comparaisons plus fines entre différentes zones de baignade comme nous allons le voir sur le littoral du Nord de la France.

Le lieu d’application : le littoral du Nord, un littoral transfrontalier

Le site des dunes de Flandre s’étend de l'avant-port Est de Dunkerque côté français à l'embouchure du fleuve l'Yser côté belge. Il s’agit d'une bande sableuse plus ou moins large qui s’étend sur 26 kilomètres traversée en son milieu par la frontière franco-belge. Ce littoral présente différents visages avec un passage progressif côté français d'espaces naturels à l’Est à une zone urbaine à l’Ouest. De la frontière belge à Leffrinckoucke, s’étend ainsi un vaste complexe de dunes sableuses d’une largeur comprise entre 750 et 1 500 mètres. Ce complexe dunaire ne dispose pas de réseau hydrographique de surface mais par endroits, la nappe phréatique est affleurante. Entre les deux embouchures, aucun rejet ponctuel n'est localisé. Côté belge, le littoral se caractérise par une succession de zones urbaines entrecoupées de massifs dunaires. La qualité sanitaire des eaux de baignade sur ce littoral est particulièrement bien suivie puisque l'on dénombre 19 stations de suivi dont 7 côtés français.

Un constat : un meilleur pouvoir discriminant du nouvel indice annuel

Le tableau suivant (tableau 2) présente le classement des plages françaises entre 2000 et 2004 d’une part avec la réglementation actuelle et d’autre part simulé avec les critères proposés par la nouvelle directive européenne. Les indices de classement actuel sont très homogènes puisque toutes les plages se voient classées en B entre 2000 et 2005 (à l'exception d’un classement en A en 2003 pour Leffrinckoucke) ce qui peut laisser à penser à une qualité sanitaire globalement identique entre les différents sites. En revanche, les classements simulés avec la nouvelle réglementation laissent apparaître une qualité plus dégradée aux deux extrémités : à l'ouest à proximité de l'avant-port de Dunkerque et à l’est à Bray-Dunes à proximité de la frontière belge, état de fait confirmé par le pourcentage des concentrations inférieures au nombre guide actuel (tableau 3). Cet exemple montre une meilleure discrimination des plages dans les différentes classes de qualité avec la nouvelle réglementation contrairement à la situation actuelle où la classe B est fortement prépondérante sur les trois autres classes.

Comme on vient de le voir, la qualité sanitaire des eaux de baignade apparaît plus dégradée aux deux extrémités du littoral. L’étude des percentiles relatifs aux Escherichia coli (figure 4) précise cette logique spatiale de contamination des eaux de baignade. Ces percentiles ont été calculés conformément aux propositions de la nouvelle directive.

[Figure : Notion de 95ᵉ percentile.]

Nouvelle directive pour l’ensemble des plages entre le port de Dunkerque et l’Yser côté belge.

L’impact sanitaire des deux embouchures apparaît clairement. À l’extréme ouest, l’avant-port de Dunkerque engendre une forte dégradation de la qualité des eaux sur la plage de la digue des Alliés située la plus à proximité de l’embouchure et son impact diminue ensuite rapidement pour devenir faible à partir de la plage de Malo terminus, soit environ à 6 kilomètres du port.

1 : Bray-Dunes – Le Perroquet 2 : Bray-Dunes – Poste de secours 3 : Zuydcoote – Centre plage 4 : Leffrinckoucke – Centre plage 5 : Dunkerque – Malo terminus 6 : Dunkerque – Malo centre 7 : Dunkerque – Digue des Alliés

[Photo : 95° percentiles des plages entre le port de Dunkerque et l’Yser.]

De même, côté est, l’impact de l’Yser apparaît de façon notable jusqu’au point Koksijde 60 également situé à environ 6 kilomètres de l’embouchure du fleuve (le point Nieuwpoort 120 est accolé à la digue de l’embouchure de l’Yser et ainsi protégé du panache du fleuve, ce qui explique sa valeur faible). Les deux sources connues de contamination des eaux de baignade de ce secteur ont donc un impact relativement limité spatialement et pouvant être bien mis en évidence. En revanche, l’augmentation des percentiles entre La Panne côté belge et Bray-Dunes côté français ne peut en aucun cas être corrélée avec l’une ou l’autre de ces sources de contamination, ce qui laisse à penser qu’une source de germes bactériens non déterminée est localisée dans ce secteur.

L’étude des percentiles va donc permettre d’orienter les recherches d’une ou de plusieurs sources de pollution sur ce secteur du littoral, en sachant qu’une modélisation n’est pas possible dans ce secteur ; les flux hydrauliques sont inconnus dans le Delta de l’Aa.

[Photo : Localisation des points de suivi de la qualité des eaux de baignade.]

Tableau 2 : Indices annuels de qualité des plages entre Dunkerque et la frontière belge

Réglementation actuelle : 00 – 01 – 02 – 03 – 04
Nouvelle directive : 00 – 01 – 02 – 03 – 04

Tableau 3 : pourcentage des concentrations inférieures au nombre guide actuel en 2006

Digue des Alliés : 57 %
Malo Centre : 66 %
Malo Terminus : 66 %
Leffrinckoucke : 71 %
Zuydcoote : 85 %
Bray-Dunes : 61 %
Bray-Dunes Le Perroquet : 57 %

Conclusion

Les critères de qualité sanitaire des eaux de baignade proposés par la nouvelle directive européenne sont plus exigeants que ceux utilisés actuellement et devraient permettre, selon l’OMS et dans le cas du respect des seuils proposés, de réduire le risque sanitaire moyen pour un baigneur de contracter une maladie ORL, digestive ou respiratoire de 15 % à moins de 8 %. Néanmoins, la principale avancée proposée par cette nouvelle réglementation réside dans un changement du mode de gestion, avec un passage d’une estimation de la qualité purement analytique à une véritable gestion active des zones de baignade, processus dans lequel le maire de la commune où est située la plage aura un rôle central. Cette responsabilité accrue nécessite pour l’élu de disposer d’outils lui permettant d’orienter ses actions de gestion des zones de baignade ; le percentile, de par son pouvoir discriminant, constitue l’un de ces outils. Dans cette logique, la possibilité de disposer pour chaque plage d’une valeur numérique représentative de la qualité sanitaire des eaux de baignade permettra une approche plus précise des problèmes et une étude plus aisée des sources de contamination et de leur impact sur le littoral.

L’Agence de l’Eau Artois-Picardie a inscrit le respect de cette nouvelle directive dans les objectifs prioritaires de son 9ᵉ programme d’interventions (2007-2012) avec le souhait d’avoir à terme toutes les baignades en excellente ou bonne qualité.

Références bibliographiques

• Étude de l’Agence de l’Eau Artois-Picardie « Étude des profils de baignades des plages du Bassin Artois-Picardie » réalisée par Safege, 2006 • DDASS 59, commande interne • Directive européenne n° 76/160/CEE du 08/12/1975 • Directive européenne n° 2006/7/CEE du 15/02/2006 • Décret n° 81-324 du 7 avril 1981

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