L?épuration de plus en plus poussée des eaux résiduaires, en qualité et en quantité, conduit à une production de plus en plus importante de boues. Dans le même temps, les contraintes sur l'utilisation de ces boues se renforcent. Si un épandage agricole est impossible, il faut trouver des solutions. Et même s'il est possible, les contraintes notamment en matière de stockage, sont fortes. Le séchage des boues est alors incontournable. La palette de solutions est large.
Réalisé par , Technoscope
L’épuration de plus en plus poussée des eaux résiduaires, en qualité et en quantité, conduit à une production de plus en plus importante de boues. Dans le même temps, les contraintes sur l'utilisation de ces boues se renforcent. Si un épandage agricole est impossible, il faut trouver des solutions. Et même s’il est possible, les contraintes notamment en matière de stockage sont fortes. Le séchage des boues est alors incontournable. La palette de solutions est large.
5,8 milliards de mètres cubes d'eau traités en station en France en 2008 (source SOeS/SSP Enquête Eau 2008) ; la production de boues évaluée à 1,3 Mt (en matières sèches) en 2005 est estimée à 1,8 Mt en 2009. Où vont-elles ? La mise en décharge est encore pratiquée quoiqu’insatisfaisante vu qu’elles ne sont pas des déchets ultimes sauf contamination particulière. L'Agence de l'eau Rhône Méditerranée et Corse a publié un rapport sur la qua-
L'innocuité des boues d’épuration urbaines recyclées sur la décennie 2000-2010 (Voir EIN n° 347).
Il en ressort que très majoritairement, les boues présentent des concentrations en éléments traces métalliques ETM et en composés traces organiques CTO très inférieurs aux seuils autorisés en épandage. Environ 5 % des boues sont non conformes. Parmi les non-conformités, le cuivre est le plus souvent responsable. Actuellement, on estime à près de 60 % la valorisation agricole en France en grandes cultures ; car il est parfois remis en cause par des industriels du légume qui ne veulent prendre aucun risque. Mais l’épandage reste soumis à des plans locaux qui stipulent les périodes d’épandage impliquant donc un stockage d’environ 10 mois.
Cela dit, depuis une quinzaine d’années, aux dires des spécialistes, tous les appels d'offres de construction de stations importantes (plus de 75 000 EH) mentionnent le séchage ; on remarque aussi que la plupart des grosses stations en France disposent d'une étape de séchage. Jean-Paul Chabrier, Ingénieur Consultant chez Enviro-Consult, remarque que 85 % du parc de stations a une capacité unitaire inférieure à 5 000 EH. Il estime qu'un peu moins de 100 000 tonnes de boues séchées sont produites par les installations de séchage.
Le séchage thermique : un large éventail de méthodes
Par quelle méthode ?
L’éventail est large. Les grosses stations urbaines, dans le cadre d'une approche très industrielle ont leurs installations de séchage ou d’incinération directe des boues. Jean-Paul Chabrier a fait un tour très complet de la question du séchage industriel en novembre au Mans. On compte en France environ 80 lignes de séchage de 500 à 7 000 kg/h d’eau évaporée. Les technologies sont nombreuses, par chauffage direct (convection), indirect (au contact) ou mixte (contact et convection) voire hybride avec deux sécheurs en série. Sans être exhaustif, on trouve dans ces catégories la technologie du sécheur à pales de Nara, le procédé Innodry® de Degrémont Technologies, le procédé de séchage Kult® BT (basse température) de Huber, le sécheur à disques de SIL sans oublier les procédés de séchage par tambours rotatifs proposés par Andritz, les sécheurs à Volute de Horus Environnement et les sécheurs Watropur distribués par EMO… Comme pour tous les procédés intensifs, il faut rester vigilant par rapport aux problèmes de sécurité (explosion, de gaz ou de poussières, feu) et aux questions d’exploitation, d’usure des équipements. Afin de répondre à ces nouvelles demandes du marché, de nouvelles technologies se sont imposées avec l’appari-
…ment de sécheurs à bande travaillant à basse température. Leur avantage principal consiste à sécher les boues par convection avec de l’air chauffé à 130 °C maximum, soit une température bien inférieure à la température d’auto-inflammation des boues urbaines située entre 220 et 280 °C, limitant ainsi les risques liés à ces procédés. Andritz a développé il y a quelques années cette technologie et a intégré dans sa gamme existante de sécheurs (tambour et lit fluidisé) son propre sécheur à bande basse température BDS. On compte parmi les récents succès d’Andritz avec sa technologie BDS l’installation de trois lignes BDS de 4 t/h d’évaporation sur la station des Grésillons en région parisienne ainsi qu’une ligne BDS de 1,5 t/h d’évaporation sur la station de Bègles près de Bordeaux.
Les coûts avancés à la tonne de matière sèche sont de 190 à 355 €/t MS, tenant compte des charges proportionnelles, fixes et de l’amortissement technique. Ce sont des installations techniques qui nécessitent la présence de personnel spécialisé et, bien souvent, dépendent de sources d’énergie fossile. Certaines solutions récupèrent toutefois des calories générées par diverses sources d’énergie : cogénération, réseaux de chauffage, etc. Evaporis™ LT, l’atelier de séchage de Degrémont, est ainsi basé sur l’utilisation d’un sécheur basse température dont le principe de fonctionnement est le séchage en continu par convection d’air chaud dans un tunnel fermé (air à 65/80 °C). Un module d’alimentation reçoit et transforme les boues déshydratées en « spaghettis » qui sont alors convoyés via un tapis dans des modules de séchage où l’air chaud circule, permettant ainsi de charger l’air en humidité puis d’en extraire l’eau par des échangeurs. Un module de retour situé à l’extrémité permet la décharge sur la bande inférieure du tapis. Ce procédé combine économies d’énergie et limitation des gaz à effet de serre grâce à la récupération des basses calories générées par diverses sources d’énergie, et offre une grande souplesse d’exploitation grâce à une livraison clé en main et un procédé automatisé.
La consommation thermique est en effet le point critique d’un séchage. Pour cette raison, d’autres sécheurs comme Evaporis™ LE permettent une consommation thermique d’environ 700 kWh/tonne d’eau évaporée.
soit de l’ordre de 30 % de moins que les autres sécheurs. C’est l’un des sécheurs les plus performants énergétiquement du marché. Evaporis™ LE comprend 3 types d’équipements bien distincts :
- - Un premier étage composé d’un sécheur indirect de type couche mince ;
- - Une étape intermédiaire de « spaghettisation » des boues au niveau de l’extrudeur, équipement également appelé chopper ;
- - Un deuxième étage de séchage composé d’un sécheur direct de type sécheur à bandes.
Le couplage des deux sécheurs est donc particulièrement adapté tant d’un point de vue cinétique (utilisation du sécheur le plus adapté à la qualité de la boue) que d’un point de vue thermique (récupération d’énergie d’un étage sur l’autre).
Andritz, quant à elle, a réalisé plusieurs installations de séchage basse température de grande capacité en récupérant différentes énergies disponibles telles que de l’eau de refroidissement à 90 °C en provenance de moteurs à gaz (cogénération), d’énergie transformée à partir de fumées d’incinérateurs ou de fumées en sortie de process cimentier. Sur cette application cimentière l’intérêt est multiple, car les boues séchées avec une énergie primaire récupérée sont ensuite utilisées en énergie alternative en amont de la cimenterie avec d’autres produits non fossiles ; il n’y a pas de sous-produits à évacuer et, enfin, le cimentier bénéficie éventuellement de crédits de CO₂, venant ainsi augmenter le taux de retour sur investissement déjà très intéressant pour ce type d’investissement.
L’essor des solutions rustiques
À l’autre extrémité, Emmanuel Adler, responsable du pôle « eaux et déchets » à l’École des Ingénieurs de la Ville de Paris, souligne « le grand succès des filtres plantés de roseaux, qui totalisent près de 200 unités en France pour du séchage de boues après une filière de boues activées ». Une solution rustique adaptée aux stations disposant de surface. Entre les deux, les gestionnaires de stations doivent choisir la solution la mieux adaptée à leur gisement de boue et aux filières d’élimination/valorisation les moins coûteuses fonction de leur localisation.
Le séchage des boues d’une station d’épuration permet de s’affranchir des épandages agricoles très souvent contraignants sur les plans foncier et logistique. Les lits de séchage de boues plantés de roseaux sont composés de massifs filtrants constitués de différentes couches de matériaux granulaires qui reposent sur un radier. Les roseaux sont plantés à la surface du massif qu’ils colonisent densément en surface tout en développant un maillage de rhizomes et racines assimilable à un réseau de drainage qui se propage durant l’accumulation régulière de boues sur toute la hauteur de la couche (généralement plus d’un mètre). Les lits de séchage sont alimentés directement depuis le clarificateur de la station, évitant ainsi l’utilisation de polymères et le passage sur table d’égouttage.
La siccité des boues en entrée doit se situer autour de 2 % à 5 % de MS (20 à 50 g/litre).
Il s'agit de boues liquides qui n’ont reçu aucun traitement particulier.
L'eau interstitielle des boues s’écoule le long des tiges et rejoint le réseau de racines pour atteindre, durant ce périple épurateur, la couche de matériau qui permettra son évacuation par des drains. Cette eau est reconduite à la station en amont. Les études montrent que ce retour est généralement moins chargé que ceux provenant des autres procédés de densification comme les filtres à bandes ou les tables d'égouttages.
Le séchage sur lits plantés de roseaux consomme très peu d’énergie et transforme les boues en un terreau humide (15 à 25 % de siccité) facile à transporter, compostable et stockable en bout de champ. Les lits de séchages sont généralement composés de 4 ou 8 casiers qui sont alimentés en alternance 1 semaine sur 4 ou 8 à raison d’un apport quotidien d’environ 140 g MES/m². L’élément principal de dimensionnement est la charge annuelle en Matière Sèche par m² tolérée par le système qui est de 50 à 60 kg/m²/an.
Les essais réalisés pour le groupe Danone avec le concours de l’Agence de l’eau Seine Normandie montrent l’intérêt de la technique avec un retour sur investissement de l’ordre de 3 à 5 ans.
Seuls les Danois ont aujourd’hui un recul suffisant sur de grosses installations dépassant 1500 ou 2000 tonnes de MS par an. Ils affirment que le fonctionnement du système est meilleur lorsque les temps de repos sont supérieurs aux préconisations énoncées précédemment. Ils annoncent qu’il est préférable de créer des unités de séchage avec 8 à 10 casiers et d’alterner 5 jours d’alimentation avec 35 ou 45 jours de repos. Cette conclusion est aussi fonction des conditions climatiques de ce pays qui ne sont pas vraiment propices au séchage naturel.
Cette technique est couramment mise en œuvre par Epur Nature, Aquatiris, SINT, IFB Environnement, Poyry Environnement ou encore l’entreprise Jean Voisin qui dispose d'un centre expérimental pour le traitement des boues mais aussi des matières de vidange, avec une autorisation préfectorale pour traiter 2000 m³/an de matières de vidange (issus des fosses septiques des particuliers) et 2000 m³/an de boues.
Le procédé Phragmicompostage® de SINT, aujourd’hui exploité par Epur Nature, repose par exemple sur des lits étanches garnis de roseaux. La hauteur utile des bassins permet l’accumulation de 1 à 1,50 m de boues. Une fois l'installation mise en service, les lits reçoivent un apport de 20 à 25 kg MS·m⁻²·an⁻¹ de boues la 1ʳᵉ année de fonctionnement, puis le double (charge de dimensionnement) les années suivantes. Celle-ci peut atteindre un rythme de déshydratation très important allant jusqu’à 30 % de matières sèches, ainsi qu’une forte minéralisation. Entre la sixième et la dixième année de mise en place du système, on opère la mise au repos et la vidange successive des lits.
Pour obtenir une siccité élevée, la vidange se fait quelques mois après l’arrêt d’alimentation des boues. Pendant ce temps, les autres lits peuvent recevoir une charge plus élevée. Après la vidange, les lits peuvent être immédiatement réalimentés (à une dose plus faible similaire à l'année de mise en route) sans qu’il soit nécessaire de replanter les roseaux. Les boues traitées sont transformées en un terreau bien minéralisé exempt de risques sanitaires.
Un point important : la nature de la boue et son caractère fortement stabilisé. Les boues très minérales ne posent pas trop de problèmes d’odeur ni en phase de traitement, ni en phase de stockage transitoire ; par contre, si la teneur en matière organique est forte, attention à ce risque d’odeurs. Il faut peut-être s’orienter vers d’autres solutions comme le compostage.
Récemment, un accord de collaboration a été signé entre Epur Nature et Orbicon (Danemark). Cet accord permettra à Epur Nature de profiter de l’expertise danoise en ce qui concerne le traitement des boues des stations plus importantes (supérieures à 20000 EH) et des boues plus spécifiques (par exemple des boues issues du traitement de certaines eaux industrielles et aussi des boues issues du traitement de l’eau potable).
Les installations en milieu industriel réalisées par IFB Environnement produisent quant à elles un complexe organo-minéral de qualité constante, de composition connue et surtout indemne d’élément trace métallique (ETM), paramètre souvent reproché aux boues urbaines. Leur valeur en filière compostage ou amendement organique est de plus en plus reconnue.
Le regain de la digestion anaérobie
Le problème le plus immédiat avec les boues est leur transport et les coûts associés. « Une tonne de boue déshydratée à 20 % de siccité contient 800 kg d’eau »
rappelle Michel Saulnier du bureau d’études NTE.
Passer à 30 % demande beaucoup d'efforts mécaniques pour un gain modeste vis-à-vis des coûts de transports et d’élimination.
Emmanuel Adler replace les choses dans l’évolution : « si les techniques intensives de réduction de boues (par voie thermique ou biologique) au niveau de la filière eau ont connu un certain intérêt courant des années 2000, en particulier de la part des traiteurs d'eau français, le coût de fonctionnement et l’efficacité de ces procédés expliquent leur développement très limité. En 2012, avec les tensions sur le prix de l’énergie, la digestion anaérobie des boues connaît un véritable essor, dynamisée par des tarifs de rachat électrique avantageux, et de nombreux avantages techniques pour la gestion des boues digérées (réduction aisée de la masse de boues, fermentescibilité réduite donc risque d’odeur moindre, facilité de déshydratation...). Le couplage digestion-séchage fait l’objet de nombreuses applications, sur des petites stations comme sur de grandes collectivités ».
Un regain d'intérêt pour les digesteurs de boues et la production de biogaz confirmé par Michel Saulnier qui travaille sur différents projets dont un au nord-ouest de Paris d'une capacité de 120000 EH. Selon lui, « il faut avoir un gisement fiable de boue pour trouver des filières de valorisation ». Le séchage rend la boue nettement plus disponible pour différents débouchés : épandage, valorisation thermique (le PCI d'une boue sèche est assez élevé).
Le biogaz produit servira opportunément à sécher tout ou partie de ces boues. La
clé est là : disposer d’une énergie gratuite ou fatale pour réaliser le séchage. Biogaz sur place, ou calories issues d'une installation industrielle proche alimenteront le sécheur. « Pour des tailles moyennes d'installation je préfère les sécheurs à bande, ils sont simples, rustiques ; comme notre procédé Bioco », explique Jean-Pierre Levasseur, ingénieur industrialisation chez Veolia Eau. « Nous avons plusieurs projets en cours : Évry avec du biogaz, des gaz chauds de moteur à Lille Marquette ». Vinci Environnement, allié à Sogea Martinique sur la CACEM, réalisera une unité de valorisation de biomasse avec production d'électricité et de chaleur qui alimentera deux sécheurs pour les boues de la station d'épuration, lesquelles iront en valorisation agricole ou seront brûlées. Les sécheurs à bande conviennent pour des agglomérations moyennes autour de 100 000 EH.
SIL propose une solution couplée séchage/oxydation thermique qui met en œuvre un oxydeur thermique couplé à une chaudière de récupération d’énergie. Cet oxydeur thermique peut fonctionner tant avec des combustibles fossiles qu’avec du biogaz et même de la graisse de façon simultanée ou indépendante. Ce système, outre la production d’énergie, permet également le traitement des odeurs (COV) contenues dans les buées.
Le séchage solaire : une solution qui fait ses preuves
La solution du séchage solaire est de plus en plus prise au sérieux. Cette technique a fait l'objet d'une étude très complète FNDAE n° 36 par l’IRSTEA de Lyon (ex Cemagref) qui relève son caractère extensif adapté aux petites et moyennes stations tout en notant qu’il existe à l’étranger des réalisations pour plus de 500 000 EH. Le créneau optimum se situe entre 2 000 et 50 000 EH. Selon les fournisseurs de solution et l’exploitation, la siccité atteinte varie de 70 % à 90 %. L’étude porte sur six constructeurs : Thermo-System, Degrémont-France Assainissement, Saur, Ternois-Huber Technology, Veolia-MSE et Vinci-Sogea. Depuis, Ternois et Huber ne sont plus associés. On recense aujourd'hui environ 130 installations de séchage solaire.
Solaire ne veut pas dire gratuité. Le séchage est réalisé en serre pour concentrer la chaleur, et maîtriser l’aération par des dispositifs passifs (ventelles) assistés de ventilateurs pour brasser l’air et l’extraire. Il faut donc une surface pour placer la serre, la construire, assurer ensuite les meilleures conditions de séchage, et prévoir une zone de stockage des boues sèches, sans oublier les dispositifs d’alimentation en boue et d’extraction.
Les matériaux utilisés pour la serre impactent son prix : nature des armatures, des parois (verre, polycarbonate ou plastique ondulé). Le coût d’exploitation sera impacté par la consommation d’énergie des ventilateurs et des dispositifs d’alimentation, d’évacuation et de retournement des boues.
Si le séchage solaire a connu des échecs, c’est avant tout par un mauvais usage, une mauvaise compréhension du fonctionnement voire un mauvais dimensionnement. Il ne faut pas oublier la répartition du gisement solaire, ni sa variation saisonnière (pas d’évaporation un jour froid et couvert en hiver).
Mais globalement, le potentiel moyen est de 2,7 kg/m²/j d’eau évaporée (autour de 1 000 kg/an). Les échecs rencontrés sont souvent dus aux mauvaises odeurs dégagées. Un phénomène largement évitable ! Ammoniac, sulfure d’hydrogène et autres composés odorants se forment quand la vitesse de séchage est insuffisante dans certains endroits de la boue, déclenchant des processus fermentaires. La réponse est simple : ne jamais se trouver dans de telles conditions. Jean-Pierre Canler de l’Irstea souligne l'importance d’avoir des boues de qualité et de ne pas s’aventurer à mélanger des boues de différentes provenances, ni d’avoir des boues trop chargées en matières organiques si l’on veut limiter les problèmes d’odeurs.
Concrètement, il faut prévoir un bon renouvellement d’air pour extraire l'humidité et un contact efficace entre boue et air, donc un retournement fréquent de la boue, ce qui évite aussi sa montée en température. Selon les constructeurs, il est prévu ou non une désodorisation, dont le fonctionnement grève le coût d’exploitation mais rassure les riverains.
Les procédés mixtes optimisés
Pour sécher même en hiver, il existe des installations dotées d’un plancher chauffant : c’est le cas du procédé développé par Huber Technology. Ce qui demande un génie civil plus important qui accroît l'investissement.
Un argument contesté par Henri de Miramon, directeur général chez Huber Technology. « Avec un plancher chauffant, nous pouvons diviser par 2 à 3 la surface de la serre, ce qui diminue le coût du… »
génie civil au contraire. Le coût du plancher chauffant est contrebalancé par les économies réalisées sur la surface de la serre. Nos systèmes se révèlent donc au global pas plus coûteux en investissement que des systèmes « extensifs » sans plancher chauffant : il y a simplement plus d’équipements et moins de génie civil.
Le plancher chauffant est alimenté par une pompe à chaleur profitant du rejet des eaux de la station comme source froide. Henri de Miramon insiste aussi sur la forte capacité de retournement du pont retourneur (1 aller-retour en une heure s'il le faut, ce qui permet d’éviter la fermentation des boues et donc les odeurs). « Globalement, avec l'apport solaire et la PAC, la consommation est de l'ordre de 150 Wh/l eau évaporée, à moitié pour le pont retourneur, moitié pour la PAC. Et nous n’avons pas besoin de désodorisation. »
À Barjol, dans le Var, un sécheur solaire a été mis en route en juin 2011. C’est un sécheur de 9,2 m de large, avec une longueur de plancher chauffant de 30 m, d'une capacité de 140 t de MS par an et comportant un stockage de 155 m² de boues séchées en bout de serre.
À Goderville (76), un sécheur du même type a été mis en service en 2010 par Ternois dans le cadre de sa collaboration avec Huber. « Huber est le pionnier des sécheurs solaires avec plancher chauffant, ce qui permet d’échapper à certaines limites que l’on retrouve sur les sécheurs dépourvus de cette technologie, souligne Henri de Miramon. Le sécheur fonctionne toute l’année, y compris en hiver. Ses performances sont garanties sur la base de 80 % de siccité en moyenne annuelle, avec un minimum de 70 % en hiver. »
Thermo-System, société allemande, assure le retournement efficace du lit de boue par un engin appelé sanglier : un chariot à quatre roues en inox doté de pales qui retournent la boue. Tenu en laisse (alimentation en énergie), il parcourt toute la serre à son gré (selon les capteurs d’humidité) et retourne consciencieusement jusqu’au sol toute la surface ; il s’accommode de boues même collantes, plus ou moins bien réparties. La consommation électrique est de 30 à 40 kWh/t eau évaporée (déplacement sanglier et ventilateurs). La société a déjà construit une vingtaine d’installations en France, de 2 500 EH jusqu'à 100 000 EH à Nantes Métropole, en service depuis quelques mois avec six sangliers.
La plus grande de ce type d’installations traite 30 000 t de boues par an et utilise jusqu’à 5 MW de chaleur complémentaire (installation à Oldenburg/Allemagne). Thermo-System est par ailleurs le seul producteur de sécheurs solaires capable de proposer différentes technologies pour retourner les boues. Hormis le Sanglier Électrique, Thermo-System propose également le « Manageur de Boues », une machine qui permet de mécaniser et d’automatiser complètement le séchage, y compris l’alimentation et l’évacuation des boues.
D'autres constructeurs comme Poyry Environnement, Loïra avec son procédé Loïsol, Veolia Water Solutions & Technologies avec Solia™, Degrémont avec Héliantis™ ont à leur actif des réalisations en solaire, même dans les régions où l’ensoleillement est faible. Une solution qui devrait se développer compte tenu de l’évolution prévisible du coût de l’énergie.