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Legionella en station d'épuration des eaux usées : évaluation et prévention du risque professionnel

28 février 2009 Paru dans le N°319 à la page 75 ( mots)
Rédigé par : Olivier SCHLOSSER, Sophie COURTOIS et Samuel MARTIN-RUEL

Les quelques rares données cliniques et épidémiologiques disponibles ne suggèrent pas un excès de risque de légionellose chez le personnel de station d'épuration. Afin de mieux quantifier ce risque, un modèle de relation dose-réponse a récemment été publié mais son application se heurte aux difficultés de mesure de Legionella pneumophila dans les eaux usées, les boues et leurs aérosols, et à la surestimation de la dose par l'utilisation d'un outil de biologie moléculaire (la PCR quantitative). L?évaluation du risque de légionellose en station d'épuration doit avant tout s'appuyer sur l'étude sur site des situations générant un aérosol important. Cette démarche permet de répondre efficacement à l'obligation réglementaire d'évaluation des risques en milieu de travail et constitue une base solide pour l'élaboration de recommandations en matière de prévention.

Depuis l'identification de Legionella pneumophila (Lp) en 1976 à la suite d'une épidémie de pneumonies aiguës dans un groupe de vétérans de l'American Legion réunis pour un congrès à Philadelphie, de nombreuses connaissances ont été acquises sur la maladie, l'écologie de la bactérie et sa transmission [encadré 1]. Ainsi, l’émergence de la légionellose depuis quelques dizaines d’années a été clairement associée au développement des activités et des installations génératrices d’aérosols, dans le domaine industriel, de loisirs et résidentiel. La survenue d’épidémies de légionellose et les investigations qui ont suivi ont permis d’identifier les systèmes de refroidissement et tours aéroréfrigérantes ainsi que les circuits d'eau chaude sanitaire comme principales sources de contamination. Plus rarement, des épidémies ou des cas groupés ont été associés à la diffusion d'aérosols contaminés à partir d'autres installations, comme des fontaines décoratives ou des équipements médicaux.

La présence dans les eaux usées de légionelles, et de Lp en particulier, a été documentée, grâce notamment au développement des techniques de biologie moléculaire (Palmer 1993, Roll 1995). Parallèlement, le traitement des eaux usées implique des installations et des tâches génératrices d’aérosols, et des inquiétudes ont récemment émergé concernant la possible diffusion de Lp à partir des stations d’épuration. Il n’y a pas actuellement d’arguments solides d'un impact sanitaire des aérosols de stations d’épuration sur les populations riveraines ; en revanche, plusieurs études rapportent un excès de manifestations d'irritation des voies respiratoires et de diarrhée chez le personnel (Rylander 1999, Thorn 2002). Plusieurs cas groupés de fièvre de Pontiac ont été rapportés parmi les employés du traitement des eaux usées industrielles en Scandinavie (Gregersen 1999), suggérant une possible exposition professionnelle aux légionelles en station d’épuration.

L’évaluation des risques sur le lieu de travail et la proposition d’actions de prévention sont clairement encadrés par la législation, l'employeur ayant l’obligation d’assurer la sécurité et de protéger la santé de

ses salariés (directive cadre n° 89/391/CEE et textes de transposition dans le droit français). L'objectif de cet article est de présenter la synthèse de l’évaluation du risque de légionellose chez le personnel de station d’épuration et de proposer des règles de prévention appropriées. Cette évaluation a été menée selon deux approches : une approche fondée sur l’analyse des données d’observation sanitaire, et une approche prédictive comprenant d’une part le calcul du risque en utilisant un modèle mathématique et d’autre part l’estimation du risque par une appréciation qualitative du risque sanitaire.

Quelles sont les données d’observation du risque légionelles en station d’épuration ?

Ces informations sont issues de la revue des cas cliniques et des études épidémiologiques publiés, ainsi que des données nationales de surveillance sanitaire communiquées par l’Institut de veille sanitaire (InVS). Peu de cas cliniques ont été rapportés. Trois cas de légionellose chez des employés de station d’épuration ont été signalés, 1 cas en Suède (De Jong B., conférence European Working Group for Legionella Infections (EWGLI) 2005, Rome) et 2 cas en Finlande (Kusnetsov J., conférence EWGLI 2007, Stockholm). Deux épisodes de cas groupés de fièvre de Pontiac ont été décrits, un au Danemark (Gregersen 1999) et un en Finlande (Kustnetsov J., conférence EWGLI 2008, Madrid). Il est important de souligner que chacune de ces stations d’épuration traitait des eaux usées industrielles, donc potentiellement chaudes (papeterie, usine chimique, industrie alimentaire).

Les données épidémiologiques sont rares. Une seule étude, de type transversal, a été publiée (Clark 1980). Elle a été réalisée aux USA par l’Environment Protection Agency en 1980 à Cincinnati, Chicago et Memphis, et n’a pas montré de différence significative de la prévalence des anticorps anti Lp sérogroupe 1 (Lp1) entre les sujets travaillant en station d’épuration et ceux du groupe témoin non exposé. Les résultats de cette étude ne soutiennent donc pas l’hypothèse d’un risque plus élevé d’infection par Lp chez le personnel de station d’épuration en comparaison de la population non exposée aux eaux usées.

Concernant les données de surveillance nationale, l'InVS fait une analyse annuelle des cas rapportés de légionellose, sur la base des informations notées sur le formulaire de déclaration (la fiche de notification) transmis aux Ddass. En France, la légionellose est une maladie à déclaration obligatoire, et le formulaire comporte un item « lieu de travail » dans la rubrique « exposition à risque ». En 2005, l'InVS a effectué une analyse de ces fiches de notification. Parmi les 3 195 cas dont la notion de source potentielle de contamination était renseignée, il n’existait que 2 cas avec la mention « station d’épuration » (InVS, communication personnelle). Plus récemment, dans le bilan des légionelloses déclarées en 2007, aucune information « station d’épuration » n’a été relevée sur les fiches de notification analysées par l'InVS. L’exposition professionnelle la plus fréquemment rapportée était celle concernant les routiers associée à la prise des douches (InVS, communication personnelle).

Ces données d’observation sont donc rares, et ne suggèrent pas un excès de risque significatif de légionellose chez le personnel de station d’épuration. Concernant les systèmes de notification et de surveillance sanitaire en France, il faut souligner qu’une possible « exposition à risque » n’est pas toujours signalée sur les fiches de notification. Les cas de légionellose chez le personnel de station d’épuration pourraient ainsi être sous-déclarés, mais il est toutefois peu probable qu’un excès de risque significatif échappe à la vigilance des Ddass. Il en est de même dans les autres pays industrialisés qui disposent de systèmes de surveillance analogues et partagent leurs résultats avec ceux des autres pays de l’Union européenne, par l’intermédiaire du réseau EWGLI par exemple. Par ailleurs, les cas sporadiques de légionellose déclarés ne font habituellement pas l’objet d’une enquête approfondie. Les quelques cas isolés qui ont été rapportés chez des employés des stations d’épuration ne peuvent ainsi pas être attribués avec certitude à l’exposition aux aérosols d’eaux usées. La relation de causalité ne peut pas être établie. Comme signalé plus haut, deux épisodes de cas groupés de fièvre de Pontiac en station d’épuration d’eaux usées industrielles ont été décrits. La survenue de ces épisodes soutient l’hypothèse d’une exposition professionnelle aux légionelles en station d’épuration d’eaux usées industrielles, mais le risque professionnel de fièvre de Pontiac en station d’épuration ne peut pas être estimé sur la base de ces seules données.

Qu’il s’agisse de fièvre de Pontiac ou de légionellose, l’évaluation du risque nécessiterait la réalisation d’études épidémiologiques bien construites, de type enquête de cohorte prospective, permettant de mesurer l’incidence des événements sanitaires considérés.

Évaluation du risque par l’approche prédictive

Parallèlement à l’épidémiologie, un risque sanitaire peut être évalué par une approche prédictive. Le risque n’est pas mesuré sur la base de données d’observation, mais calculé en utilisant un modèle mathématique de relation dose-réponse. L’introduction de données d’exposition (la dose) dans ce modèle permet le calcul de la réponse (l’incidence de la manifestation sanitaire considérée). En microbiologie, cette méthode d’évaluation quantitative du risque est surtout utilisée dans l’industrie alimentaire, et plus récemment dans la production d’eau potable. La validité du ou des modèles de relation dose-réponse est un élément critique central de la pertinence de l’utilisation de cette méthode, un autre tout aussi important est celui représenté par la fiabilité de l’évaluation des doses (l’exposition).

Concernant les légionelles, un premier modèle de relation dose-réponse a été proposé en 2007 (Armstrong et Haas, 2007, 2008). Ce modèle, de type exponentiel, a été construit sur la base de données expérimentales chez le cobaye. L’équation implique un paramètre r avec une valeur égale à 0,06 pour le risque d’infection à forme bénigne (ne nécessitant pas de traitement médical) et une valeur égale à 1,07 × 10⁻⁴ pour le risque de légionellose typique, c’est-à-dire une pneumonie sévère nécessitant une hospitalisation. La pertinence de ce choix de modèle a été validée sur la base de données d’observation lors d’épidémies et des valeurs d’exposition relatives estimées par modélisation de l’aérosolisation.

Dans ce modèle, la dose est exprimée en unités formant colonies (UFC), la probabilité d’infection P(d) étant calculée selon la formule :

P(d) = 1 – e^(–r·d),

où d représente la dose de Lp.

[Photo : schéma d’analyse qualitative du risque de légionellose par inhalation d’aérosols d’eaux usées]

La méthode de mesure des légionelles étant la technique par culture. Or, lorsque cette méthode, qui constitue la méthode standard pour l’analyse des légionelles, est appliquée à des échantillons d’eaux usées et d’aérosols, les résultats obtenus sont quasi systématiquement négatifs, soit du fait d’une compétition par la microflore abondamment présente dans l’échantillon, soit parce que les légionelles sont dans un état viable mais non cultivable.

À l’issue de projets de recherche analytique sur les légionelles dans le cadre d’un projet ANR (Agence Nationale de la Recherche) (Courtois 2008), nous avons utilisé des résultats de mesure de Lp dans les eaux usées et dans l’air par méthode de biologie moléculaire (PCR quantitative) pour estimer les risques d’infection bénigne par Lp et de légionellose. La concentration de Lp dans l’air était estimée soit directement à partir de prélèvements d’air, soit à partir des mesures de Lp dans les eaux usées par l’application de coefficients d’aérosolisation des procédés calculés à partir de mesures faites sur les sites. Les doses étaient estimées en considérant les concentrations de Lp dans l’air mesurées ou estimées et le volume d’air inhalé en fonction de différents scénarios d’exposition correspondant à différentes tâches. Cette dose était exprimée en unités génomiques. Lorsque les doses étaient calculées avec les mesures dans l’air, l’introduction de ces doses dans le modèle mathématique de relation dose-réponse a conduit à des résultats très élevés de risque d’infection bénigne et de légionellose chez le personnel de station d’épuration, avec un risque annuel d’infection de 100 % dans chacun des sites investigués, et jusqu’à 35 % concernant la légionellose. Lorsque les doses étaient calculées avec les mesures dans les eaux usées, l’étendue des résultats était plus large, mais les risques calculés étaient également très élevés, jusqu’à 100 % d’infection par Lp par an et jusqu’à 80 % de légionelloses. Ces résultats sont incohérents avec les données de surveillance sanitaire nationales, et la comparaison avec ces données de surveillance conduit à un risque de légionellose environ 10 000 fois plus élevé chez le personnel de station d’épuration que dans la population générale, valeur très élevée et non plausible sur le plan épidémiologique. Ces résultats mettent en évidence les conséquences d’une utilisation inappropriée du modèle de relation dose-réponse liée à la méthode de mesure des concentrations en Lp. En effet, le modèle a été construit et validé sur la base de données d’exposition en UFC, c’est-à-dire d’une méthode de mesure de Lp par culture. La méthode par PCR mesure le matériel génétique du micro-organisme et ne permet donc pas d’affirmer que les micro-organismes dont le matériel génétique a été identifié sont viables et, a fortiori, infectants. Les doses estimées et les résultats de calcul du risque sont donc surestimés, et cette surestimation est très importante lorsque l’on considère les données de surveillance sanitaire nationales de la légionellose.

En alternative à cette démarche d’évaluation quantitative du risque inappropriée, nous avons apprécié le risque de légionellose de façon qualitative. Cette méthode repose sur la combinaison des probabilités d’occurrence des événements indépendants qui concourent à la survenue d’une légionellose (figure 1). Elle a par exemple été utilisée par l’AFSSA pour évaluer le risque sanitaire pour l’homme lié à la présence, dans l’eau destinée à la consommation humaine et dans divers effluents aqueux, de virus Influenza hautement pathogène, dans le cas d’une épizootie ou dans celui d’une épidémie (AFSSA 2006). Les probabilités sont exprimées par les qualificatifs suivants : nulle, négligeable, faible, modérée et élevée. La combinaison de deux probabilités conduit à une probabilité plus faible que celle de chacune des probabilités de départ, comme illustré dans le tableau 1. Le risque professionnel de légionellose en station d’épuration a été apprécié « négligeable » ou « nul à négligeable » selon les scénarios d’exposition. La principale limite de cette approche est le manque de précision associé à l’appréciation qualitative des probabilités d’occurrence, et particulièrement pour la qualification du pouvoir d’aérosolisation des différents procédés et tâches.

La prévention du risque de légionellose en station d’épuration

En conclusion du paragraphe précédent, les résultats de la démarche d’évaluation du risque sanitaire, qu’elle soit quantitative ou qualitative, n’apparaissent pas susceptibles de représenter des repères fiables ou suffisamment précis pour l’élaboration de recommandations de gestion du risque professionnel de légionellose en station d’épuration. Néanmoins, en acceptant la validité du modèle de relation dose-réponse proposé par Armstrong et Haas et en observant que la valeur du paramètre r pour le risque de légionellose est très inférieure à 1, il est intéressant de noter que l’équation du modèle traduit alors une relation linéaire entre la probabilité de légionellose à la suite de l’inhalation d’une dose d et cette dose d. Diminuer la dose de Lp diminuera proportionnellement et de façon linéaire le risque de légionellose. Cette dose, pour une distribution granulométrique donnée des particules, est directement proportionnelle à C_a × V_inh × k, avec C_a = concentration de Lp dans l’air ambiant inhalé par le travailleur, V_inh = Q_i × t = volume d’air inhalé

Tableau 1 : Résultats de combinaisons des qualificatifs de probabilités de survenue d’événements dépendants. Nu : nulle, N : négligeable, F : faible, M : modérée, E : élevée. D’après : AFSSA, 2006

par le travailleur pendant la tâche de durée t et nécessitant un débit respiratoire Qr, et k = proportion de particules inhalées atteignant l’étage alvéolaire dans les poumons. Les moyens de prévention contre la légionellose en station d’épuration s’attacheront donc à réduire chacun de ces paramètres :

  • Diminuer Cw. L’objectif de réduire la concentration de légionelles dans les eaux usées apparaissant peu pertinent, c'est sur la réduction de l’émission et de la dispersion des aérosols et sur le changement d’air des locaux fermés que doivent se porter les efforts. L’émission d’aérosols peut être diminuée par le choix du procédé (dispositifs d’aération immergés des bassins biologiques plutôt que turbine de surface, pompage des eaux brutes plutôt que relèvement par vis, diminution de la hauteur des cascades) ou de la méthode utilisée, comme par exemple l'utilisation d’un balais-brosse plutôt qu'un système de jet à haute pression pour nettoyer les goulottes de surverse, ou l'utilisation d’eau potable plutôt que d’eau traitée pour la réutilisation sur site (nettoyage, rabattage mécanique des mousses, ...). La dispersion des aérosols peut être diminuée en équipant certains ouvrages d'une protection comme une jupe autour des turbines d’aération de surface, ou un capotage autour de la vis de relèvement. Dans le cas d’installations dans des bâtiments fermés, la ventilation des locaux doit être optimisée pour renouveler suffisamment l'air intérieur (INRS 2002)

  • Diminuer Qr. Le débit respiratoire est fonction de la demande en oxygène associée à l’effort fourni, donc dépend clairement de la charge physique de la tâche effectuée. Toute action permettant de réduire la charge physique de la tâche permettra de diminuer la quantité de particules inhalées et celle de Lp qui peuvent y être associées. Cette démarche nécessite une observation des tâches effectuées et une réflexion au cas par cas pour éventuellement modifier la procédure opérationnelle. Cette action bénéficiera de la coopération.

[Encart : Rappels sur la légionellose et la fièvre de Pontiac - Une vingtaine d'espèces de légionelles sont pathogènes chez l'homme, mais Legionella pneumophila (Lp) est impliquée dans plus de 90 % des légionelloses et le sérogroupe 1 (Lp1) dans 80 % des cas. Les autres espèces concernent essentiellement les sujets immunodéprimés. - La transmission se produit par l'inhalation d’aérosols contaminés (gouttelettes < 5 µm). Les deux principales sources de contamination par Lp sont l'exposition aux aérosols générés par les circuits d'eau chaude sanitaire (douche, jacuzzi, ...) et ceux produits par les tours aéro-réfrigérantes. Dans les cas sporadiques communautaires de légionellose, en raison de l’absence habituelle d’investigations environnementales, la source de contamination demeure le plus souvent indéterminée. Il n’y a pas de transmission interhumaine rapportée. La dose infectante est inconnue ; le risque infectieux dépend de la virulence de la souche, de la concentration dans l’aérosol, du volume d’aérosol inhalé (donc du débit respiratoire et de la durée d’exposition), et de facteurs de risque individuels. - Il existe deux types de manifestations bien distinctes : • la légionellose, ou maladie des légionnaires : il s’agit d'une pneumonie, d'incubation de 2 à 10 jours, à début rapide en 2 à 3 jours à type de tableau pseudo-grippal parfois accompagné de signes digestifs, conduisant à la triade « pneumonie-diarrhée-confusion mentale » dans sa forme classique. Cette pneumonie, confirmée par la radiographie, est le plus souvent bilatérale. La létalité atteint 25 %. Le taux d'attaque est faible, de 0,1 à 5 %. La pneumonie accompagnée d'atteintes multiviscérales est la forme clinique sévère de l'infection par Lp ; de nombreuses contaminations par Lp n’entraînent pas de maladie patente, ou se manifestent par une forme légère de la maladie qui n'entraîne pas d'hospitalisation (toux et fièvre modérée). Une infection par Lp peut se traduire par une simple apparition d'anticorps (séroconversion). Les facteurs de risque individuels sont fréquents mais non indispensables (1 dans 69 % des cas en 2003) : âge croissant (médiane = 59 ans), tabagisme (40 %, seul FR dans 27 % en 2003), alcoolisme, cancer ou hémopathie (11 %), corticoïdes ou immunosuppresseurs (12 %), diabète (10 %), affection respiratoire chronique (dont la silicose). • la fièvre de Pontiac, manifestation bénigne, d’incubation courte (quelques heures), à type de syndrome grippal (point essentiel, il n'y a pas de pneumonie), guérissant spontanément en 2 à 5 jours. Le taux d’attaque est très élevé : 95 à 100 % des personnes exposées. Le mécanisme est mal connu ; des effets des constituants de la paroi de la bactérie sont évoqués. - La légionellose se déclare par épidémies, par cas groupés ou par cas isolés (cas sporadiques, représentant 50 % des cas de légionellose). La légionellose est responsable de 0,5 à 5 % des pneumonies communautaires (par opposition à nosocomiales, contractées à l’hôpital, qui représentaient 40 % des cas en 2002) nécessitant une hospitalisation. En 2006, 1 443 cas de légionellose ont été déclarés en France. - La discordance entre répartition des souches de Legionella dans l’environnement et en médecine mérite d’être soulignée : Lp1 représente plus de 80 % des souches isolées chez les malades alors qu’elle représente moins de 30 % des souches dans l'environnement. Inversement, les espèces différentes de Lp sont significativement présentes dans l'environnement (25 %), alors qu’elles ne sont isolées que dans 4 % des cas cliniques.]

ration du personnel du site et des conseils d'un ergonome.

  • Diminuer t. En diminuant le temps d’exposition, t, on réduit le volume d’air inhalé et les particules qu'il contient. Cette réduction du temps d’exposition peut être obtenue par une réflexion sur l’organisation du travail (contenu, durée, répétition et répartition des tâches).
  • Diminuer le nombre de particules inhalées. Il s’agit de protéger le travailleur contre l'inhalation des particules présentes dans l’air à son poste de travail par le port d'un appareil de protection respiratoire. Cette mesure de protection individuelle doit être mise en œuvre lorsque les moyens de protection collective destinés à réduire l’émission et la dispersion des aérosols sont insuffisants, et que dans le cas d'ouvrages dans des locaux fermés, les dispositifs de ventilation ne permettent pas un assainissement de l'air satisfaisant au poste de travail ou pendant la tâche considérée. Un demi-masque filtrant jetable est approprié à ce type d’expositions de courtes durées, de type FFP2 ou FFP3. En station d'épuration, la grande variabilité observée des niveaux de concentrations en Lp dans l'air rend complexe le choix entre ces deux niveaux de protection dans un contexte où un excès de risque de légionellose chez le personnel n’est pas suggéré par des données d’observation sanitaire. Il est nécessaire de proposer un niveau de protection au moins égal à celui offert par un FFP2. Le choix pour un FFP2 peut être justifié par des durées d’exposition à des niveaux élevés d’aérosols généralement brèves, par le souci d’une meilleure observance du port d’un masque mieux toléré, par l’absence d'arguments d’un excès de risque de légionellose chez le personnel de station d’épuration, et par le niveau de protection habituellement suffisant apporté par un demi-masque jetable FFP2 contre les autres agents biologiques contenus dans les aérosols d’eaux usées et de boues.

Les règles d'utilisation des appareils de protection respiratoire doivent être clairement définies. En station d’épuration, le demi-masque filtrant doit être porté dans toutes les situations d’exposition aux aérosols, c’est-à-dire :

  • lors des tâches à proximité des ouvrages sources d’aérosols (relevage, pré-traitement, bassins biologiques, déshydratation des boues, aspersions d’eau de process, ...)
  • lors des activités de nettoyage générant des aérosols (en particulier utilisation de jets d’eau à haute pression, lavage des camions après dépotage des boues, …).

La liste des tâches et interventions nécessitant le port du demi-masque sera établie sur chaque site. Le personnel sera formé et informé pour une bonne adhésion aux procédures et pratiques mises en place. Les demi-masques filtrants peuvent être portés de façon discontinue pendant la journée de travail, mais seront jetés à la fin de cette journée de travail.

À ces règles de prévention primaire s’ajoute la prévention secondaire qui repose sur le dépistage rapide de la légionellose. L’efficacité du traitement antibiotique est liée à la précocité de sa mise en œuvre, donc à la précocité du diagnostic. Celui-ci est grandement facilité par la méthode de détection des antigènes urinaires de Lp. Il est donc important de sensibiliser (sans inquiéter) le personnel de station d’épuration aux premiers signes de la légionellose et de l'inciter à consulter rapidement un médecin s'il présente une fièvre avec des signes respiratoires, auquel il expliquera que son métier peut l’exposer aux légionelles. Cette action d'information est clairement du rôle du médecin du travail qui surveille l'état de santé du personnel, et qui a pour mission de contribuer à l'évaluation des risques et à leur prévention. Dans le cas de la survenue d'une légionellose chez un employé de station d’épuration, le médecin du travail analysera le poste de travail et les tâches effectuées dans les 10 jours précédant l'apparition des symptômes, et recherchera si d'autres employés ont pu présenter ou présentent des symptômes.

Conclusion

La publication récente d’une proposition de modèle de relation dose-réponse pour l’infection à Lp et la légionellose ne permet pas une avancée majeure dans l’évaluation du risque pour le personnel de station d’épuration en raison des difficultés de mesure de Lp dans les eaux usées, les boues et leurs aérosols, et de la surestimation de la dose par l'utilisation de la PCRq. L'approche qualitative de l'appréciation du risque représente une alternative intéressante, mais la signification des résultats reste limitée par leur expression qualitative. L'évaluation du risque de légionellose en station d’épuration doit avant tout s’appuyer sur l'étude sur site des situations générant un aérosol important. Cette démarche permet de répondre efficacement à l’obligation réglementaire d’évaluation des risques en milieu de travail et constitue une base solide pour l'élaboration de recommandations en matière de prévention.

[Encart : Références bibliographiques * Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) (2006). Demande d’évaluation qualitative du risque sanitaire pour l’Homme lié à la présence dans l’eau destinée à la consommation humaine et dans divers effluents aqueux de virus Influenza hautement pathogène, dans le cas d'une épizootie ou dans le cas d'une épidémie. Réponse à la saisine 2005SA.0332. http://www.afssa.fr/Documents/EAUX2005s20332.pdf. * Armstrong TW, Haas CN. (2007). A quantitative microbial risk assessment model for Legionnaires’ disease; animal model selection and dose-response modelling. Risk Analysis, 6, 1581-96. * Armstrong TW, Haas CN. (2008). Legionnaires’ disease: evaluation of a quantitative microbial risk assessment model. J Water Health, 6, 149-66. * Clark CS, Van Meer GL, Linnemann CC Jr et al. (1980). Health effects of occupational exposure to wastewater. EPA-600/2-80-028, pp. 239-264. * Courtois S, Chesnot T, Delgado-Viscogliosi P et al. (2008). Fiabilisation de l'analyse de Legionella pneumophila dans les eaux résiduaires : évaluation de différentes méthodes de préparation d'échantillons. Eur. J. Water Qual, 39, 91-102. * Gregersen P, Grunnet K, Uldum SA et al. (1999). Pontiac fever at a sewage treatment plant in the food industry. Scand J Work Environ Health, 25, 291-296. * INRS (2002). Usines de dépollution des eaux résiduaires et ouvrages d'assainissement. Guide pratique de ventilation n° 19 ED 820, 22 p. * Palmer CJ, Tsai Y, Paszko-Kolva et al. (1993). Detection of Legionella species in sewage and oceanwater by Polymerase Chain Reaction, direct fluorescent antibody and plate culture methods. Appl. Environ. Microbiol, 59, 3618-3624. * Roll BM, Fujioka RS (1995). Detection of Legionella bacteria in sewage by polymerase chain reaction and standard culture method. Wat. Sci. Tech., 31, 409-416. * Rylander R. (1999). Health effects among workers in sewage treatment plants. Occup. Environ. Med., 56, 354-367. * Thorn J, Beijer L, Rylander R. (2002). Work related symptoms among sewage workers: a nationwide survey in Sweden. Occup Environ Med 59:562-566. ]
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