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Les barrières réactives : de la dépollution active à la gestion du risque

30 mars 2005 Paru dans le N°280 à la page 37 ( mots)
Rédigé par : Jacques VERCRUYSSE et Virginia BILBAO

La dépollution des eaux souterraines a toujours été une préoccupation majeure des sociétés de dépollution des sols, du fait de l'impact de ces dernières sur l'environnement, et particulièrement sur les coûts des projets de dépollution. Depuis de nombreuses années, Ecoterres S.A. participe au développement de nouvelles techniques dans le domaine de la dépollution, notamment des eaux souterraines.

La première technique qui vient à l'esprit pour dépolluer une nappe d'eau souterraine est le pompage actif de l'eau et son traitement, plus communément appelé la technique « Pump & Treat ». Cette technique a vite été suivie d'autres, toutes basées sur l'extraction de l'eau ou l'injection de matière active (air, …). Ces techniques, qui ont prouvé leur efficacité, sont cependant lourdes à mettre en œuvre dans le cas de grands volumes d'eau polluée dans un aquifère peu perméable. En effet, l'infrastructure d'extraction ou d'injection devient intense tandis que le débit d'eau traité est faible, ce qui fait augmenter le temps de la réhabilitation, en dizaines d'années bien souvent. Cependant, le constat est clair : par le fait même des caractéristiques hydrogéologiques de l'aquifère, le polluant est peu mobile, et l'urgence de dépollution devient donc moins criante. La porte est ainsi ouverte à la mise en place de techniques plus lentes, mais non moins efficaces. Ces techniques font davantage appel aux techniques passives plutôt qu'actives, et ceci à des coûts avantageux. On ne parle dès lors plus de dépollution active, mais de gestion du risque… Les barrières réactives font partie de ces techniques de dépollution.

Détruire le polluant lors de son passage à travers la barrière

Le principe des barrières réactives est simple : profiter de l'écoulement naturel de la nappe d'eau souterraine polluée pour placer en aval du panache de pollution un écran perméable dont la fonction est de détruire le polluant lors de son passage à travers celle-ci. Ceci peut se réaliser de deux manières : soit en plaçant une barrière perméable en aval et continue sur la largeur du panache, soit en y plaçant une barrière imperméable guidant le flux d'eau souterrain vers des points de passage obligé. Ces points de passage ou « portes » sont équipés de cellules détruisant à leur tour le polluant, et libérant ainsi l'eau souterraine de sa charge polluante (barrières de type « Funnel and Gates »).

Chaque cas est spécifique, par la géologie et l'hydrologie du site définissant l'écoulement.

[Photo : Figure 1 : Barrière continue.]
[Photo : Barrière type “Funnel & Gates”.]

souterrain, ainsi que par le type de polluant, l'importance du panache, la durée dont on dispose pour détruire la charge polluante, etc. Autant de facteurs qu'il faut maîtriser, par une approche pluridisciplinaire et spécialisée. La réalisation des modèles d'écoulement souterrain et de transport de polluants permet de définir l’emplacement et de dimensionner la barrière, bref en définir son design. En définissant les réactions chimiques ainsi que leur cinétique permettant la destruction du polluant, le choix du matériau réactif peut être fixé. Ce dernier se compose de fer zéro valent, de charbon actif, de zéolithes, de compost, etc. L'avantage de cette technique réside dans le fait qu'une fois placée dans le sol, le système devient tout à fait invisible. De plus, seul un monitoring est encore nécessaire. Plus de consommation d'énergie, d'entretien électromécanique ou autre pendant de longues années !

Exemple de réalisation : circonscrire une pollution aux organochlorés

En 2003 et 2004, une pollution en organochlorés de la nappe d'eau souterraine d'un terrain industriel dans la région anversoise (Belgique) était circonscrite par une barrière réactive de type "Funnel and Gates". Après un dimensionnement minutieux réalisé par une équipe d'hydrogéologues expérimentés au moyen de modèles d'écoulement souterrain, le choix s'est porté vers un système composé d'une barrière imperméable longue de 140 m et équipée de deux portes réactives de 25 m de long chacune. Les modèles ont montré une vitesse d'écoulement souterrain de l'ordre de 5 m/an. La barrière imperméable a été réalisée en ciment bentonite de 6 m de profondeur et 60 cm de large, ancrée dans la couche géologique inférieure imperméable.

[Photo : Mise en place de la barrière.]

Le choix du réactif s'est porté vers un mélange contenant du fer zéro valent. Au contact avec les organochlorés, on assiste à une déshalogénation de ces derniers de la manière suivante :

Fe⁰ + R-Cl + H⁺ → Fe²⁺ + R-H + Cl⁻

Le temps de séjour nécessaire à la destruction du polluant, confirmé par des tests en laboratoire, a été déterminé à 30 heures. De cette manière, l'épaisseur de la porte perméable et donc la quantité de réactif à préparer ont pu être calculées.

La mise en place s'est réalisée par trancheuse à chaîne à guidage automatisé. Alors que le sol excavé était évacué d'un côté, le ciment bentonite remplissait l'espace libre par l'autre côté. La mise en place n'a duré que quelques jours, réduisant ainsi les nuisances dues aux travaux au minimum.

[Photo : Mise en place des portes.]
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