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Management du risque Legionella sur les installations de refroidissement avec tours aéroréfrigérantes humides (TAR)

31 mars 2008 Paru dans le N°310 à la page 57 ( mots)
Rédigé par : Laurent GARRELLY, Guy BONNET et Claire SABY

Depuis 2004, La réglementation impose aux exploitants de TAR(installation classée pour la protection de l'environnement ICPE) la mise en place d'un management du risque visant à limiter la prolifération des Legionella dans l'eau du circuit. La surveillance (à l'initiative de l'exploitant) représente un point essentiel de cette démarche ainsi que la prévention par le nettoyage de l'ensemble des installations et la désinfection de l'eau. L?ensemble du dispositif de prévention doit être contrôlé par une analyse périodique de la qualité microbiologique de l'eau avant sa dispersion. Cet article expose les exigences et présente des moyens de surveillance et de prévention permettant de réduire le risque ?Legionella? pour les populations humaines exposées aux aérosols des ICPE.

Les tours aéroréfrigérantes humides (les TAR) ont été introduites récemment, à la fin de l’année 2004, dans la famille des installations classées pour la protection de l’environnement. Plus précisément, et plus concrètement, la rubrique 2921 de la nomenclature des installations classées, créée par le décret du 1er décembre 2004, vise les circuits d’eau dispersée en distinguant les circuits courts (dits circuits primaires fermés) et les circuits longs (dits « non fermés »). Les circuits non fermés, plus

[Photo : Schéma des légionelles dans le circuit d’eau dispersée, puis à leur émission dans l’air.]

difficiles à maintenir « propres » relèvent d'un régime d’autorisation à partir d’une capacité d’échange thermique de 2 000 kW ; les autres types de TAR relèvent du régime de simple déclaration.

Exigences réglementaires sur TAR

Dans la pratique, l'installation et l'exploitation de toutes les TAR doivent satisfaire à un ensemble d’obligations réglementaires, introduites par les arrêtés ministériels du 13 décembre 2004 ; ces règles, qui sont présentées ci-après, sont à quelques détails près les mêmes, quel que soit le régime administratif. L’obligation générale de résultat imposée à l'exploitant est de maintenir la concentration de l'eau en légionelles à un niveau inférieur à 1 000 UFC/L.

L’examen de ces règles révèle très vite l'importance accordée au traitement du risque de prolifération de Legionella dans les eaux dispersées : peu d'installations classées, en particulier pour le régime déclaratif, sont soumises simultanément à des obligations telles que :

  • la justification d'un management du risque de type démarche de progrès documentée ;
  • l'actualisation régulière de l’analyse méthodique des risques de prolifération de la bactérie (AMR), à l’aune des résultats des différentes analyses, diagnostics, audits, incidents réalisés ou constatés durant l'année ;
  • la justification d'un plan de prévention ;
  • la justification d'un plan de surveillance ;
  • l'arrêt annuel pour nettoyage et désinfection de l'installation ;
  • l'audit périodique des installations par un auditeur spécifiquement accrédité et agréé.

Sur le plan des mesures opérationnelles, les obligations réglementaires introduites par les arrêtés ministériels du 13 décembre 2004 sont fondées sur le processus susceptible de conduire à la prolifération de légionelles dans le circuit d’eau dispersée, puis à leur émission dans l’air. La stratégie imposée de maîtrise du risque est en deux étapes :

  1. Prendre des mesures préventives afin de ne pas créer des conditions favorables à la prolifération et à l’émission de légionelles, avec notamment des dispositions « de fond » pour la biodispersion et la désinfection de l'eau, sous la forme d’instructions écrites (plan de prévention) ;
  2. Prendre des mesures complémentaires, sous la forme de plusieurs barrières de défense superposées, permettant de détecter et de corriger les défaillances éventuelles des mesures préventives. Ces mesures sont regroupées dans des instructions écrites (plan de surveillance) :
  • barrières P1 et P2 pour limiter la croissance du biofilm. P1 : arrêt périodique (au moins annuel) de nettoyage « mécanique ». P2 : surveillance de « l'encrassement » du circuit et actions correctives, le plus souvent en modifiant les paramètres du traitement préventif ;
  • barrière P3 pour la surveillance de la qualité biologique de l’eau et actions correctives ;
  • barrière S1, que nous appellerons barrière « de sauvegarde » dans la mesure où il s'agit là de s'assurer par une analyse périodique (période maximale fixée à 1, 2 ou 3 mois suivant les cas) de l’efficacité des mesures de pilotage de la TAR (préventives et correctives) par rapport à l’objectif général évoqué plus haut. En cas de constat de dépassement du seuil de 1 000 UFC/L, les arrêtés ministériels donnent des instructions précises sur les actions à mener dans différentes configurations, avec en particulier l'arrêt immédiat de la TAR en cas de dépassement du seuil de 100 000 UFC/L.
[Photo : Prendre des mesures préventives afin de ne pas créer des conditions favorables à la prolifération et à l’émission de légionelles.]

Rappel des connaissances scientifiques sur l’écologie des Legionella

Depuis les années 1980, il est établi que les Legionella comme nombre d'autres bactéries dans l'environnement ont pour principal réservoir les eucaryotes et les amibes en particulier. Les bactéries du genre Legionella, ubiquitaires des milieux humides en général, prolifèrent comme un parasite dans les amibes qui peuplent les biofilms des cir-

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cuits d’eaux. Des travaux récents de Rafael Garduño et Sharon Berk au Canada montrent que la legionella possède un cycle de vie complexe avec une forme réplicative dans l'amibe et une forme mature riche en réserves nutritives qui peut survivre plusieurs centaines de jours dans des environnements très pauvres en nutriments.

Nous avons également montré que la population des Legionella spp croît dans les eaux naturelles superficielles et souterraines à l’échelle d'un bassin-versant depuis l’amont vers l'aval. Cet accroissement est expliqué par la prolifération dans les circuits d’eaux chaudes à usage domestique et industriel et par le rejet de ces eaux usées dans l’environnement sans abattement significatif par les stations urbaines d’épuration.

Les techniques de biologie moléculaire (PCR temps réel, FISH etc.) ont permis de constater que pneumophila est une espèce minoritaire de Legionella dans les eaux de l'environnement. Cette dernière étant considérée à ce jour comme la plus dangereuse, les méthodes de référence (NF T 90 431 et ISO 11837) pour la détection et la quantification des Legionella sont plus particulièrement adaptées et efficaces pour l’espèce pneumophila.

Si la population pneumophila n’est pas toujours détectable dans les circuits d’eaux, il est très rare de ne pas détecter le genre Legionella spp en utilisant une méthode de quantification non sélective comme la PCR temps réel. Les eaux froides naturelles contiennent de quelques centaines à plusieurs millions de Legionella par litre. Ces eaux froides sont très souvent utilisées sans précautions particulières pour alimenter les circuits de TAR.

Le biofilm des surfaces en contact avec l'eau est le plus souvent riche en Legionella spp même si ce genre n’est pas majoritaire dans les biofilms la plupart du temps. La quantité de biomasse totale fixée sur les surfaces est variable, depuis quelques milliers de bactéries par centimètre carré jusqu'à plusieurs dizaines de millions de bactéries. L'évaluation quantitative des bactéries du biofilm est réalisable très facilement et rapidement par ATP-métrie. Une mesure par PCR temps réel sur ces biofilms permet d’évaluer la population bactérienne du genre Legionella ou spécifiquement l'espèce pneumophila.

Les biofilms installés libèrent de manière naturelle (maturation et relargage) ou sous l'effet d'un choc mécanique ou encore sous l’effet d’un traitement de nettoyage, des paquets de bactéries dans la phase liquide circulante. Dans l'eau, les méthodes d’évaluation par ATP-métrie et PCR temps réel estiment très efficacement la quantité de biomasse planctonique et la fraction « legionella spp et pneumophila » de cette biomasse.

[Photo : Figure 4 : Dans chacune des deux zones il est nécessaire de distinguer les éléments particuliers qui peuvent avoir un impact sur l’écologie de la legionella. Légende des points de prélèvement : - Pt de prélèvement eau froide - Pt de prélèvement surface - Pt de prélèvement eau circuit]

Sur un circuit d’eau de TAR, il faut de manière générale distinguer deux zones principales qui sont : l’appoint en eau froide et le circuit de refroidissement. Ce dernier est à une température propice au développement microbien (entre 25 et 40 °C). Cette deuxième zone est considérée par la réglementation comme la plus importante puisque le risque d’aérosolisation des legionella se situe dans cette partie. Dans chacune des deux zones, il est nécessaire de distinguer des éléments particuliers qui peuvent avoir un impact sur l’écologie de la legionella (figure 4).

[Photo : Figure 3 : Prendre des mesures complémentaires, sous la forme de plusieurs barrières de défense superposées, permettant de détecter et de corriger les défaillances éventuelles des mesures préventives.]

Les circuits sont très différents les uns des autres de par leur conception (longueur, volume, temps de séjour de l'eau etc.) et leur fonctionnement. Dans tous les cas, la biologie comme la physico-chimie n'est pas homogène sur l'ensemble du circuit. L’évaluation et l'analyse de l’écosystème doivent tenir compte de la conception, de l'exploitation, de la maintenance de l'installation dans le cadre d’une analyse méthodique des risques.

Les mesures préventives destinées à éviter de créer des conditions favorables à la prolifération et à l’émission de légionelles, notamment les procédures de biodispersion et de désinfection de l'eau, sont évaluables par les outils modernes de monitoring.

Le monitoring biologique

C'est dans ce contexte (réglementaire, scien-

[Photo : Figure 5 : Les méthodes et moyens de mesure adaptés à la surveillance des défaillances conduisant à l'émission d’aérosols contaminés.]

tifique et technologique) que GL-biocontrol a mis au point une démarche “DIADEM” de diagnostic des écosystèmes microbiologiques et de monitoring du risque Legionella.

Combinant les outils de mesure les mieux adaptés, la démarche d’analyse méthodique du risque, les exigences de la réglementation, DIADEM permet de mettre en place le plan de surveillance en cohérence avec le dispositif des barrières réglementaires.

  • barrières P1 et P2 pour limiter la croissance du biofilm.
  • barrière P3 pour la surveillance de la qualité biologique de l'eau et actions correctives.

Les points de prélèvement sont définis par l'analyse méthodique des risques, de façon à surveiller l'impact d’une éventuelle défaillance de l’exploitation ou au contraire l'effet d'une action préventive ou corrective. En fonction de l’effet prévisible attendu de l’action ou de la défaillance, l’outil de mesure approprié est choisi :

  • ATP-métrie (kits Aqua-tools) pour estimer des variations de biomasse planctonique ou sessile (encrassement des surfaces du circuit et relargage de biomasse),
  • PCR spp pour apprécier les fluctuations de la population Legionella totale dans les biofilms et dans l'eau,
  • PCR pneumophila pour la population considérée comme la plus dangereuse (kits IQ Check Legionella Bio-Rad),
  • Comptage d’amibe pour évaluer le potentiel de prolifération des Legionella intra-cellulaires.

Les actions préventives et correctives proposées par Odyssée Environnement

En plus du nettoyage mécanique périodique (barrière P1) Odyssée Environnement développe une stratégie de prévention de la croissance du biofilm et de maintien de la qualité microbiologique de l'eau.

Le but des traitements d’eau était principalement d’éviter toute présence de dépôts dans les TARs (tartres, résidus de corrosion, …) et ainsi obtenir des rendements optimums au niveau des surfaces d’échanges.

Mais depuis quelques années, avec l’obligation d’analyser la Legionella pneumophila dans les échantillons d'eau, l'utilisation de biocides oxydants et non oxydants est venue compléter les traitements antitartre et anticorrosion. Avec le renforcement des contrôles (rubrique 2921), la consommation de biocide en tout genre a considérablement augmenté et le coût associé a explosé.

Avec le recul, l'ajout excessif de biocide n’a jamais permis d’assurer la pérennité des installations car l'eau présente dans les TARs n'est et ne sera jamais “stérile”, c'est-à-dire exempte de tout micro-organisme vivant. Par contre, l'utilisation importante de biocides a une incidence négative sur le milieu naturel (rejet AOX, …).

Odyssée Environnement, qui a établi sa gamme de produits de traitement des eaux dans le respect de l'environnement, notamment dans le choix des molécules anti-tartre et anticorrosion (faible DCO, …), base ses recherches sur le développement de nouvelles solutions permettant de réduire l'injection de biocide tout en maîtrisant l’écosystème présent dans les TARs.

En effet, il est montré que les biofilms matures, source de contamination permanente des réseaux et lieux de développement des legionelles, sont résistants aux biocides aux doses généralement pratiquées. C'est pourquoi, Odyssée Environnement a

[Photo : Figure 6 : Avec comme bilan comparatif.]

développé une gamme de produits à base de biodispersants organiques et enzymatiques empêchant la formation des biofilms et le dépôt.

Cette méthode peut être résumée par l’association :

Un produit combiné Antitartre-Anticorrosion-Biodispersant enzymatique → Éviter la formation de dépôt en tout genre

Un biocide – si besoin → Neutraliser les résidus de biofilms décrochés et mis en suspension dans l'eau, le cas échéant permettant de les éliminer.

Il s'agit d'un traitement complet (figure 6) très performant avec l’injection de deux produits où la quantité de biocide injecté est considérablement réduite par rapport au traitement usuel pratiqué (barrière P2).

Les analyses physico-chimiques associées à des tableaux de suivis sont utilisées pour maîtriser le risque d’encrassements chimiques des TAR. Pour la surveillance et le contrôle de l'efficacité des traitements vis-à-vis de l’écosystème, Odyssée Environnement utilise l'ATPmétrie et la démarche DIADEM qui constituent aujourd’hui d’excellents outils pour maîtriser à moindre coût les installations.

Bilan du management du risque Legionella

a/ La qualité de l'eau d’appoint est surveillée tout au long du circuit d’appoint ; celui-ci est nettoyé par biodispersant lorsque le diagnostic démontre l’encrassement par la biomasse et surtout l'accroissement des populations de Legionella.

b/ Le circuit de refroidissement est nettoyé, par injection de biodispersant en continu et mécaniquement pendant les périodes d’arrêts ; l'efficacité de la lutte contre le développement du biofilm et ses conséquences sur la prolifération des Legionella est surveillée par ATP-métrie et PCR temps réel. Les barrières P1 et P2 sont en place.

c/ Les populations Legionella planctoniques résiduelles sont maîtrisées par injection de désinfectant en quantité minimale en fonction des résultats de mesures quantitatives spécifiques (PCR temps réel). La barrière P3 est en place.

d/ La barrière de sauvegarde S1 est confiée à un laboratoire de contrôle accrédité pour la méthode réglementaire NF T 90 431.

Compléments d'information sur le management du risque Legionella dans les tours aéroréfrigérantes : Formation LEGIOSTOP dispensée par l'École des mines d’Alès avec le concours de la DRIRE LR. @

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