Les Structures alvéolaires ultra-légères (SAUL) sont de plus en plus utilisées pour la prise en charge des eaux pluviales. Elles assurent la rétention temporaire ou la réinfiltration locale. Ni panacée ni exception, elles doivent avant tout être correctement dimensionnées, installées et entretenues en fonction des situations locales. Leur pérennité et le service rendu dépendront du soin accordé à chacune de ces étapes.
Les inondations répétées du printemps un peu partout en France et en Europe montrent la récurrence de ce risque. La législation pousse depuis peu au traitement local (à la parcelle) des eaux de pluie. Les réseaux séparatifs se développent ainsi que les techniques « alternatives » d’infiltration. Mais le traitement de l’eau de pluie doit se concevoir de manière globale au niveau du bassin-versant (zonage pluvial). L’idée primordiale est de retenir les eaux de pluie le plus
en amont possible pour éviter des pics de ruissellement à l’aval et répartir le débit d’un événement violent d’une heure ou deux sur une période décuplée.
Quatre niveaux de service avec des objectifs précis ont été définis pour les systèmes de traitement, de N1 à N4.
N1 et N2 correspondent aux pluies faibles et moyennes (pluie de retour inférieur à 10 ans) et relèvent de la maîtrise de la pollution et du bilan hydrologique local (N1) et de la maîtrise du ruissellement (N2). N3 relève de la maîtrise des inondations (pluies fortes, 10 à 50 ans de retour). N4 correspond à la gestion des inondations dues à des pluies exceptionnelles (retour supérieur à 50 ans).
Des principes généraux bien définis
Les SAUL relèvent des niveaux 2 et 3. « L’important dans la conception d’un système d’assainissement est de réfléchir à son fonctionnement vis-à-vis de tous les types de pluie et d’anticiper ce qui se passera pour les pluies dépassant les capacités de l’ouvrage en prévoyant un écoulement à moindre dommage. Il n’existe pas de meilleure solution dans l’absolu ; chaque fonctionnement d’un ouvrage hydraulique génère ses propres conditions de conception, sachant que les SAUL sont utilisables soit en infiltration locale soit en rejet à débit limité » explique Aurélie Gérolin du CETE Est. Les SAUL sont donc un moyen technique parmi d’autres de gérer les eaux pluviales dans le cadre d’une vision globale. Il n’existe pas de normes sur ces dispositifs mais les principes généraux sont très bien définis dans le guide technique des SAUL produit par l’IFSTTAR (http://structures-alveolaires-saul.fr).
Les SAUL s’utilisent sous forme de bassin compact ou de manière plus linéaire sous chaussée et sous des noues. Elles peuvent être étanches (fonction stockage), avec vidange à débit contrôlé ou perméables pour infiltrer les eaux et recharger les nappes de manière diffuse. Dans tous les cas, les modules sont enveloppés par des géotextiles de protection et, pour la rétention temporaire, d’une membrane étanche ; le stockage peut se compléter d’une fonction supplémentaire : arrosage, réserve pour l’incendie.
Les volumes concernés vont de quelques mètres cubes sur une partie privative pour récupérer des eaux de toiture à plusieurs milliers de mètres cubes. « La limite est essentiellement économique, au-delà de 4 000 m³ d’autres solutions deviennent meilleur marché » indique Raphaël Vite chez Funke.
Une large gamme de produits
Produit apparu en 1990 (le guide 1998 du LCPC mentionnait seulement deux produits, Nidaplast et Geolight), le nombre de fournisseurs croit ainsi que les réponses tech–
Au niveau de l’élément modulaire, une SAUL doit présenter un taux de vide supérieur à 90 %, beaucoup atteignent voire dépassent 95 %. Il existe deux conceptions : structure nid d’abeilles et caisses empilables. Les premières sont utilisées depuis près de 25 ans (premières références en 1990/92) et portent pour nom Nidaplast et GEOLight respectivement (sociétés Nidaplast et Hamon).
« Avec le recul on constate que ces structures se comportent très bien », précise Aurélie Gérolin. Nidaplast revendique plus de 1 million de mètres cubes installés.
Les secondes sont apparues début 2000. Les producteurs sont plus nombreux : Aco (produit Stormbrixx), Funke (D-Raintank), Fränkische (Rigofill et produits annexes), Graf, Nicoll (Waterloc), PipeLife (Stormbox), Pluviaeau (Drain-Max), Rehau (Rausikko Box), Sotra Seperef (Rainbox II), Wavin (Q-Bic, Impluvio pour les volumes inférieurs à 10 m³ sur terrain privé)…
Au niveau des modules unitaires, il faut être attentif à leur résistance à l’écrasement vertical. Ceci conditionne la hauteur possible d’empilement des modules et, selon le remblaiement, la classe de résistance (utilisation en espace vert, sous chaussée etc.). Nidaplast revendique le fait d’avoir quatre classes de résistances différentes, Rehau propose une version renforcée (Box H). Sotra Seperef, quant à elle, propose une large gamme d’applications, allant du tunnel pour une installation sous des noues, aux caissons noirs résistants aux charges roulantes en passant par les caissons verts adaptés sous espaces verts.
Bien souvent, il n’existe qu’une référence unique. La résistance relève du matériau choisi et de la géométrie retenue. La majorité des produits sont en polypropylène. Mais on trouve également du polyéthylène et plus rarement du PVC. L’important est la résistance à long terme (minimum 50 ans), fonction du fluage du matériau et de son éventuelle dégradation. Les plastiques…
utilisés, de plus en souterrain (pas d’ultraviolet), sont quasiment inaltérables chimiquement. Pour le fluage, tout dépendra du niveau des contraintes appliquées réellement, donc du soin à calculer l’ouvrage (génie civil et mécanique) et à le réaliser dans les règles de l’art.
Choisir un SAUL adapté aux fonctionnalités de l’ouvrage
Au niveau de l’ouvrage lui-même, le point majeur est la conservation de sa fonctionnalité à stocker, et si c’est le cas, à infiltrer l’eau. Un tel ouvrage ne doit pas recevoir de macrodéchets qui l’encombrent, ni de fines qui se déposent pour éviter le colmatage. Ceci dépend de la provenance des eaux : toit uniquement, ruissellement, apport de feuilles mortes, etc. En cas de ruissellement, la présence d’ouvrage amont de décantation est fortement conseillée. Certains constructeurs en proposent, d’autres s’en remettent aux dispositifs existants que le bureau d’études devra intégrer.
« Nous prônons une gestion intelligente des eaux pluviales par la ré-infiltration des eaux dans le sol support quand c’est possible, explique Julien Pery chez Fränkische. Il nous est donc apparu comme naturel de mettre en place des systèmes de décantation compacts des eaux pluviales qui captent et traitent la pollution et les déchets en amont des structures de rétention. Ainsi, on focalise l’entretien sur ces structures amonts, on garantit une pérennité et une plus grande longévité des structures SAUL et on permet ainsi aux concepteurs de pouvoir mettre en place une infiltration directe plutôt qu’un simple “stockage”, notion largement dépassée par les besoins de qualité exigée par la DCE et son objectif de bon état écologique des eaux pour 2015. » Armel
Vasseur, chez Sotra Seperef, insiste sur l’accompagnement : « Il nous semble important d’accompagner les maîtres d’œuvre et pour cela nous avons un service technique qui conseille et aide dans le choix voire le dimensionnement de la solution la plus adaptée aux contraintes de l’ouvrage. De même, nous pouvons être amenés à assurer à l’entreprise une assistance sur chantier ».
Ensuite, le débat porte sur la notion d’ouvrage visitable ou pas, hydrocurable s’il le faut. Nidaplast a choisi une alimentation par le fond par drain en tranchée (donc extérieur aux modules) remplie de graviers. « Par construction, notre bloc n’est pas visitable, mais avec notre diffuseur externe, la structure reste toujours propre. Le drain est visitable et hydrocurable s’il le faut : aucun colmatage n’est possible dans la structure », explique Claire Ducreux, responsable marketing.
Dans le cas des casiers, les drains d’alimentation sont disposés de manières différentes selon les fabricants. Dominique Anceaux, chez Rehau, met l’accent sur les avantages de leur solution avec un canal fermé en partie basse où les fines, s’il y en a, peuvent sédimenter, évitant ainsi leur diffusion dans le volume ; elles sont ensuite éliminées par hydrocurage si un diagnostic par caméra (structure visitable) révèle le besoin. Joseph Miquel, chez ACO, insiste sur la prise en compte du cycle complet de l’eau de ruissellement : collecte, prétraitement, rétention et restitution au milieu naturel. Ainsi, systématiquement, ACO propose avec ses modules Stormbrixx des équipements annexes tels : débourbeurs, dégrilleurs, séparateurs, de façon à simplifier la maintenance du bassin et à restituer en sortie une eau de qualité. Julien Pery, de Frankische, met l’accent sur la conception qui évite l’entrée des fines dans l’ouvrage : le Sedipipe qui présente une contrepente favorise la rétention des fines (MES qui véhiculent la pollution) notamment à l’occasion des pluies faibles qui sont les plus fréquentes. On dépasse ainsi la pure fonction hydraulique de l’ouvrage pour intégrer une dimension dépollution. Frankische propose une solution intégrée depuis l’entrée avec le Sedipipe, à la sortie avec le régulateur de débit Rigo-limit en passant par l’ouvrage de stockage proprement dit Rifofill Inspect et le regard Quadro-control. Frankische a présenté lors de Pollutec 2012 le Sedipipe XL Plus, capable de gérer des accidents d’épandage sur voie. Chez Wavin, la gamme de décanteurs hydrodynamiques Certaro est adaptée à la pollution particulaire des eaux pluviales. Ces systèmes de sédimentation permettent de répondre aux obligations qualitatives réglementaires des rejets d’eaux pluviales aux exutoires.
Raphael Vite, chez Funke, insiste sur le fait que l’important est de bien prendre en compte la situation réelle d’installation et ses dangers (sols argileux et sableux, proximité d’arbres, etc.) pour définir les systèmes décanteurs et dégrilleurs à installer.
Ne pas négliger la pose ni l’entretien régulier de l’ouvrage
Autre élément différenciant, la logistique et la pose. Raphael Vite insiste sur la qualité du lit de pose du système. Les éléments modulaires légers sont manipulables à bras (15 à 70 kg au plus).
Nidaplast revendique des éléments de grande taille ce qui favorise la vitesse de
pose, ainsi que l’absence d’éléments de liaison, souvent utilisés sur les casiers. Mettre des clips, des chevilles sont des opérations qui prennent du temps mais qui sont indispensables si la structure de l’ouvrage les impose. Certains constructeurs comme Aco, Rehau, Nicoll avec des demi-casiers empilables et emboîtables insistent sur l'économie logistique (volume divisé par trois lors du transport), améliorant le bilan carbone du produit. Aco annonce par exemple jusqu’à 300 m³ par camion contre de 70 à 75 m³ par camion pour la plupart des SAUL du marché et des vitesses de mise en œuvre élevées grâce à des demi-modules de grandes dimensions très légers (10 kg). Wavin Q-Bic est le seul module SAUL à disposer d'une Fiche de Déclaration Environnementale et Sanitaire (FDES), conforme à la norme NF P 01-010, certifié par tierce partie et consultable sur Ines.fr. « Ce document permet de réaliser un réel bilan environnemental détaillé (bilan carbone notamment) d’un bassin de rétention/infiltration des EP avec le module SAUL Wavin Q-Bic, voire de le comparer avec d'autres solutions, à partir de données normées » souligne Baptiste Roland chez Wavin.
In fine, la pérennité de l’ouvrage dépendra bien souvent de sa maintenance. Raphaël Vite insiste sur le fait que pour un investissement efficace et pérenne, « il faut travailler sur chacune des phases de conception, réalisation et entretien. Or, la grande majorité des Saul ne sont pas entretenues ». Tous les fabricants le disent : il faut inspecter au moins une fois par an l'ouvrage et après chaque épisode pluvieux important. « Les maîtres d’ouvrage et les exploitants doivent en être bien conscients ».
Eluvio, une jeune société basée en Normandie, a développé une autre solution qui ne constitue cependant pas une SAUL, celles-ci étant définies au paragraphe 1.2.4. du Guide Technique « Les Structures Alvéolaires Ultra-Légères (SAUL) pour la gestion des eaux pluviales », IFSTTAR, CERTU, décembre 2011. « Quand nous avons développé notre produit, nous sommes partis du constat que les bassins enterrés étaient très peu entretenus en raison du manque d'accès et de la dispersion des boues dans les structures, explique Nicolas Costil, Gérant d’Eluvio. Nous avons pensé à l’agent qui doit nettoyer le bassin. Si l’opération est complexe et longue, il y a peu de chances qu’elle soit réalisée plus d’une fois (un ouvrage est prévu pour durer au minimum 50 ans) et il ne sert à rien de prescrire un entretien tous les 6 mois s’il n’y a aucune chance d’être effectif. Les équipes d’entretien ont des plannings très chargés, il faut être efficace. Nous privilégions la simplicité. Notre système est donc visitable humainement comme un tuyau de diamètre 1200. Il est équipé de trous d’hommes et d’une ligne de décantation concentrant les pluies de niveau 1 et 2. La surface à nettoyer est divisée par 5 et reste facilement accessible et curable. En suivant les recommandations du SETRA, nous avons choisi un système de décantation extensif et non compact. Ce dernier demande un entretien trop fréquent et peut entraîner un risque de relargage des boues stockées ». Le bilan carbone est amélioré : il est possible de placer 560 m³ sur un camion. La structure en arche, qui reprend le principe des ponts et des cathédrales, permet d’obtenir une bonne tenue mécanique, permettant le passage d’engins lourds en phase chantier et ensuite une circulation de type voirie lourde. Eluvio propose trois classes de résistances : espaces verts, voirie légère et voirie lourde (pour des poses jusqu’à 9 m de profondeur).