La prévention du développement microbien dépend de l'identification et du contrôle de la source de la bactérie. La gestion des risques passe par une bonne maîtrise de l'eau dans les systèmes favorisant la prolifération de Legionella (ex : tour aéroréfrigérante, réseau d'eau chaude sanitaire, brumisateur?) mais aussi dans l'utilisation d'un traitement performant et efficace en situation qui peut aider à contrôler la multiplication et la dissémination de la bactérie. L?étude présentée dans cet article a pour but d'évaluer l'efficacité d'un procédé de traitement UV-c à photocatalyse sur la qualité microbiologique d'une eau et plus particulièrement sur la bactérie Legionella.
Bien implantée sur le marché de la brumisation, la société D.I.D. Clim a développé, dans le cadre de ses recherches, un module de traitement des eaux propres destinées à la brumisation d’ambiance. Ce procédé, baptisé DID BIO Protect, a été élaboré dans le but de réduire la charge microbienne des eaux destinées à la consommation humaine de catégorie RT1 et à usage technique de catégorie RT2 par association d’un traitement physique par rayonnement ultraviolet et chimique par photocatalyse et oxydation (production de peroxyde d’hydrogène : H₂O₂). La société D.I.D. Clim a fait appel à la société GL Biocontrol pour évaluer l’efficacité de ses différents modules de traitement sur la bactérie Legionella précisément.
Créé en octobre 2006, GL Biocontrol est un bureau d’étude spécialisé en ingénierie sanitaire et en stratégie de surveillance biologique des eaux. Cette société dispose d'un département de prestations de service et d’un département Recherche & Développement. À travers ses deux pôles de compétences, GL Biocontrol :
- * Développe de nouvelles solutions d’analyse, originales, destinées à faciliter la gestion en temps réel du risque microbien dans les ressources en eaux, les réseaux industriels, les réseaux urbains et les réseaux privés ;
- * Utilise les méthodologies et les outils modernes de la biologie pour étudier le monde microbien ;
- * Étudie les écosystèmes microbiens de l’environnement pour anticiper et prévenir les risques sanitaires ;
- * Conseille les acteurs de « la filière eau ».
dans la conduite de leurs installations pour réduire le risque sanitaire et l'empreinte écologique (économie d'eau, de produits de traitement et d’énergie).
Méthode de validation et indicateurs d’efficacité
Le premier paramètre analytique utilisé est la quantification de la flore totale par bioluminescence. Toute cellule vivante produit et consomme de l’ATP (Adénosine Triphosphate). L’ATP est l’intermédiaire énergétique majeur et obligatoire de très nombreuses réactions du métabolisme cellulaire. Ce coenzyme est donc spécifique des milieux vivants. Dans l'eau, quantifier l’ATP revient à quantifier le nombre de bactéries totales. Pour effectuer ce type de dosage, on va mesurer la lumière émise (via un luminomètre) par la réaction enzymatique de bioluminescence utilisant la luciférine et la luciférase de luciole. L’ATP intervient dans l'étape d’activation du complexe luciférase-luciférine, dont l'oxydation est à l'origine d'une émission lumineuse (mesurée en Unité Relative de Lumière : RLU). Une règle issue d’un consensus international scientifique permet d’établir la relation entre les RLU, la quantité d’ATP et le nombre de bactéries totales présentes dans l'échantillon (1 picogramme d’ATP correspond en moyenne à 1000 bactéries). Le kit de mesure utilisé est Dendridiag® SW développé par la société Colcom. Les résultats sont exprimés en bactéries par millilitre (bact./ml).
Le second indicateur utilisé est la quantification des légionelles totales par PCR temps réel. La technique PCR (Polymerase Chain Reaction) est une méthode normalisée (norme NF T90-471). Elle permet de dénombrer de manière rapide et fiable les Legionella spp et Legionella pneumophila totales. La méthode PCR utilise un procédé technologique reconnu depuis plusieurs années dans des domaines aussi différents que le médical, l’environnement, l’agroalimentaire ou encore le vétérinaire. C’est un processus de duplication biochimique in vitro de l’ADN de Legionella. Plus précisément, cette technique repose sur la quantification d'un message de fluorescence émis par l'ADN de Legionella, lorsque celui-ci est reconnu par des sondes spécifiques. Avec la PCR, les résultats sont disponibles en 48 h maximum. Les kits PCR iQ-Check de la société Bio-Rad ont été utilisés dans cette étude pour la détection et le dénombrement des légionelles. Les résultats sont exprimés en Unité Génomes par litre (UG/l).
Le troisième et dernier indicateur utilisé est la technique de quantification des légionelles cultivables selon la méthode NF T90-431. Elle doit être réalisée par un laboratoire accrédité par le Cofrac. La méthode par culture est la technique normalisée et reconnue par l’ISO (Organisation internationale de normalisation), le CEN (Comité Européen de Normalisation) et l’Afnor. Cette méthode est très largement utilisée pour le contrôle réglementaire des eaux (eau froide sanitaire, eau chaude sanitaire, eau de circuit de refroidissement...). La méthode NF T 90-431 permet de détecter et de dénombrer les Legionella « cultivables » selon les conditions strictes fixées par la norme. Ces conditions sont les suivantes : les légionelles cultivent à 37 °C, c’est-à-dire se reproduisent jusqu'à former des colonies, dans un délai de 3,5 à 10 jours sur un milieu de culture spécifique. Ces colonies doivent être examinées sur 3 milieux de culture différents afin de garantir l'appartenance de bactéries au genre Legionella.
À l'issue de ces étapes, il reste à déterminer par sérotypage s'il s’agit de l'espèce pneumophila. Il existe 50 espèces répertoriées, pneumophila étant une des plus dangereuses. À l'intérieur de l'espèce pneumophila, on distinguera les bactéries du sérogroupe 1 ou 2 à 14. Avec cette méthode, les résultats sont obtenus au bout de 10 à 13 jours. Ce délai est incompressible puisqu’il est nécessaire aux bactéries pour cultiver et former des colonies. Les résultats sont exprimés en Unités Formant Colonies par litre (UFC/l).
Élaboration du protocole
D.LD. Clim a souhaité tester l’efficacité de cinq modules de traitement DID BIO Protect (DBP16, DBP18, DBP36, DBP55 et DBP95) sur les bactéries Legionella spp et Legionella pneumophila. Ces modules (photo 1) sont basés sur le principe de deux technologies de traitement des eaux bien connues : l’UV et l’oxydation. L’eau brute passe au travers du module de traitement et subit l’action des UV-C. Parallèlement, ces UV-C oxydent un média interne ; dont la composition est propre à la technologie brevetée D.LD. CLIM, du peroxyde d'hydrogène est alors produit. Le module de traitement génère donc deux actions biocides :
- • Traitement physique « choc » des UV-C (la puissance de la lampe UV pouvant varier selon le modèle du module : de 16 Watts pour le DBP16 à 95 Watts pour le DBP95) ;
- • Traitement chimique oxydant rémanent du peroxyde d’hydrogène.
Avant toute campagne d’analyses microbiologiques, de nombreuses mesures de la concentration en peroxyde d’hydrogène (H₂O₂) généré par les différents modules ont été réalisées sur une eau ultra-pure (données non présentées). Elles nous ont permis de définir le fonctionnement des
Appareils, de valider la production de H₂O₂, et de caractériser une production « choc » de H₂O₂. Le protocole d’évaluation de l’efficacité des procédés de traitement sur les Légionelles a été élaboré en trois étapes distinctes :
- • Étape 1 : évaluation de la transmittance de l’eau brute. Dans le cas d’une évaluation de l’efficacité d’un traitement UV, il est impératif de connaître la transmittance (dans l’UV) de l’eau brute à traiter et d’en adapter un procédé de filtration en amont si nécessaire. Une mesure de transmittance de l’eau brute utilisée dans cette étude sera effectuée avec une longueur d’onde située dans l’UV (254 nm).
- • Étape 2 : validation du débit maximal efficace. Un débit maximal efficace doit être évalué pour chacune des puissances de lampe montée sur le module DID BIO Protect : 16 W, 18 W, 36 W, 55 W et 95 W. Les mesures de flore totale en sortie des modules nous permettront d’évaluer, en temps réel, ce débit maximal efficace.
- • Étape 3 : évaluation de l’efficacité du module sur Legionella (efficacité immédiate & efficacité différée). La dernière étape de validation portera sur l’efficacité directe des modules de traitement sur le microorganisme considéré : Legionella. Les prélèvements seront réalisés à débit constant (débit maximal efficace précédemment établi), pour chacune des puissances de lampe. Les analyses effectuées sur les prélèvements à J0 permettront d’établir l’efficacité immédiate du module. Les analyses effectuées sur les prélèvements à J+7 permettront d’établir l’efficacité différée du module (tenant compte d’une éventuelle action temporisée du rayonnement UV).
Installation
Les essais microbiologiques ont été réalisés sur une eau de forage chargée naturellement en légionelles (site pilote) ; le module de traitement est raccordé au réseau de distribution d’eau (schéma 2). L’eau « brute », présentant une concentration naturelle en Legionella spp habituellement située entre 40 000 et 80 000 UGI environ, est stockée dans une bâche en ciment d’une capacité de 24 m³ environ. Elle est acheminée au module de traitement à tester par le biais de trois pompes sanitaires « Hydropress CF 4/80 » permettant de distribuer un débit maximal de 6 m³/h (soit 100 l/mn env.). En amont du module, un filtre « Cintropur NW62 » (seuil de coupure : 25 µm) est disposé afin de limiter l’apport de matières en suspension dans le réacteur UV. Des points de prélèvements sont créés en amont et en aval strict du module.
Validation des procédés
Évaluation du débit maximal efficace
La comparaison des mesures de biomasse totale réalisées en amont et en aval strict du module de traitement permettra d’évaluer le débit maximal efficace pour chaque puissance de lampe UV équipant le module (16 W, 18 W, 36 W, 55 W et 95 W). L’efficacité sera déterminée en fonction de l’abattement des valeurs de biomasse observé entre l’entrée du module et sa sortie. Ces analyses ont été effectuées in situ avec le kit Dendridiag® SW sur un luminomètre Kikkoman C-110. Chaque prélèvement est réalisé dans un flacon stérile de 60 ml. Cette première étape compte au total 55 mesures d’ATP.
Les mesures de biomasse réalisées ont permis d’établir, in situ, un débit maximal efficace (immédiat) sur la flore totale de l’eau brute (5 200 bact./ml) et pour chaque puissance de procédé. Le temps d’exposition (ou temps de contact) d’une bactérie au rayonnement UV semble être un facteur limitant sur l’efficacité du module de traitement. Cet élément est directement proportionnel au débit de passage d’une eau brute dans les modules de traitement. Nous pouvons dès à présent établir un débit maximal efficace immédiat pour chaque puissance de procédé (DBP16, DBP18, DBP36, DBP55 et DBP95), respectivement : 4 l/mn, 10 l/mn, 25 l/mn, 30 l/mn et 45 l/mn.
Évaluation de l’efficacité immédiate des modules sur la bactérie Legionella
Lors de la précédente étape, nous avons évalué le débit maximal théorique d’efficacité immédiate applicable pour l’utilisation des modules de traitement. Ce débit « limite » assure un abattement significatif de la biomasse présente dans l’eau brute. L’étape suivante consiste donc à évaluer
L’efficacité des procédés sur les bactéries Legionella spp & pneumophila au débit maximal efficace établi a été évaluée. Deux types d’analyse ont été utilisés : la méthode PCR et la méthode réglementaire par culture. Elles permettent de quantifier respectivement les légionelles totales et les légionelles cultivables. L’eau brute sera caractérisée selon les mêmes paramètres analytiques. Chaque prélèvement est réalisé dans un flacon stérile de 1 litre.
Cette troisième étape compte au total 6 analyses PCR et 6 analyses par culture, les résultats sont rassemblés dans les graphiques 2 et 3.
Les résultats obtenus ont permis d’observer, après passage dans les modules DID BIO Protect, un abattement significatif de la population Legionella présente dans l’eau brute, pour chaque puissance de procédé testée et à débit maximal efficace. Cet essai a permis d’évaluer l’efficacité immédiate des procédés sur la bactérie Legionella et d’en déduire les données suivantes :
Débit maximal efficace sur Legionella – Réacteur DID BIO Protect :
• DBP16 : limite d’utilisation validée sur Legionella à 4 l/mn (soit 0,24 m³/h)
• DBP18 : limite d’utilisation validée sur Legionella à 10 l/mn (soit 0,6 m³/h)
• DBP36 : limite d’utilisation validée sur Legionella à 25 l/mn (soit 1,5 m³/h)
• DBP55 : limite d’utilisation validée sur Legionella à 30 l/mn (soit 1,8 m³/h)
• DBP95 : limite d’utilisation validée sur Legionella à 45 l/mn (soit 2,7 m³/h)
Évaluation de l’efficacité différée des modules sur la bactérie Legionella
Lors du précédent essai, nous avons validé l’efficacité immédiate des modules pour un débit maximal théorique efficace et pour chaque puissance de procédé.
Afin d’observer l’action biocide différée du rayonnement UV dans le temps, un doublon de chaque prélèvement réalisé en vue des analyses PCR (NF T90-471) et biomasse totale a été conservé durant 7 jours à 5 °C. La différence observée entre les résultats à J0 et à J+7 permettra d’évaluer l’efficacité différée du module de traitement. Chaque prélèvement est réalisé dans un flacon stérile de 1 litre contenant du thiosulfate de sodium. Cette dernière partie de l’étude compte au total 5 analyses PCR et 5 mesures de biomasse.
Tableau 1 : résultats de l’évaluation de l’efficacité différée du procédé.
DPB + UV 16 W (débit = 4 l/mn) : | Non détectée | | Non détectée | | 1214 |
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DPB + UV 18 W (débit = 10 l/mn) : | Présence inférieure au seuil de quantification | | Présence inférieure au seuil de quantification | | 1167 |
DPB + UV 36 W (débit = 25 l/mn) : | Non détectée | | Non détectée | | 856 |
DPB + UV 55 W (débit = 30 l/mn) : | Non détectée | | Non détectée | | 861 |
DPB + UV 95 W (débit = 45 l/mn) : | 3 800 | | Présence inférieure au seuil de quantification | | 1 043 |
Les résultats à J+7 obtenus sont rassemblés dans le tableau 1. Les mesures réalisées sur les échantillons stockés durant 7 jours à 5 °C n’ont pas permis de démontrer un abattement significatif supplémentaire dont la rémanence des traitements pourrait en être la cause. Les essais différés n’ont pas permis de réévaluer le débit maximal efficace établi précédemment.
Qualification et validation
L’étude réalisée par GL Biocontrol a eu pour but d’évaluer l’efficacité des procédés de traitement, issus de la technologie de la société D.I.D Clim, sur les légionelles présentes dans une eau en circulation. Ce procédé de désinfection allie d'une part un traitement physique par rayonnement UV-C et, d'autre part, une production de peroxyde d’hydrogène.
Cette étude a été menée en parallèle pour cinq puissances de procédés DID BIO Protect : 16 W, 18 W, 36 W, 55 W et 95 W. Il nous a été permis de constater qu'un facteur capital limitait l’efficacité des modules de traitement sur la biomasse totale : le débit de passage dans le réacteur.
Nous avons donc établi, entre autres, un débit maximal efficace pour chaque puissance de procédé. Les modules DID BIO Protect présentent un abattement significatif sur la biomasse et sur la quantité de légionelles présentes dans l'eau brute et ont été considérés comme efficaces selon les caractéristiques techniques suivantes (graphique 4).