Pour que les traitements de potabilisation et d'épuration soient performants, il est indispensable de bien contrôler des paramètres comme le pH, le potentiel redox et certains ions. Les constructeurs améliorent régulièrement les performances de leurs capteurs et analyseurs pour les rendre plus simples, plus fiables, avec une maintenance réduite.
Les paramètres des procédés sont nombreux et nous nous limiterons à l’acidité (pH), au potentiel d’oxydo-réduction (redox) et à des ions spécifiques, sans traiter des paramètres synthétiques comme la turbidité, les matières organiques et autres polluants.
Pour l'eau potable, la surveillance s’exerce au niveau de la ressource utilisée, du fonctionnement des procédés de potabilisation et de l'eau préparée.
Le même genre de problèmes se retrouve dans le traitement des eaux usées avec une surveillance à l’entrée, dans les bassins d’aération et au
La régulation des procédés est importante, notamment dans les bassins d’aération des stations d’épuration : la qualité du traitement mais aussi les consommations d’énergie et de réactifs sont en jeu.
Le besoin en analyses est varié dans sa nature (espèce analysée), la sensibilité, la précision, la rapidité d’analyse (cadence de mesure). En eau potable on recherchera une valeur absolue puisqu’il existe des normes de potabilité. En assainissement, les paramètres relevés sont plus relatifs. La variété réside aussi dans la manière d’exploiter la mesure : s’agit-il d’obtenir une valeur de contrôle sur site, dans l’environnement ou d’exploiter cette donnée pour réguler un procédé ? Les méthodes électrochimiques et spectrométriques conviennent particulièrement.
La qualité du traitement, les consommations d’énergie et de réactifs sont en jeu
La régulation du procédé est très importante, notamment dans les bassins d’aération des stations d’épuration : la qualité du traitement mais aussi les consommations d’énergie et de réactifs sont en jeu. Bien réguler, c’est consommer moins, il faut donc des capteurs de qualité. Depuis quelques années apparaissent des électrodes spécifiques pour les ions nitrate et ammonium qui viennent en complément et en substitution de la mesure plus globale, donc indirecte, du potentiel d’oxydo-réduction réalisée jusqu’à maintenant. « En mesurant spécifiquement l’ion, on est au plus près de la réalité » explique Olivier Pichon d’Endress+Hauser. Propos comparables chez Hach Lange avec Jean-Pierre Molinier qui souligne aussi l’importance sur ces capteurs de la fiabilité et d’une dérive aussi faible que possible : « une mesure sans dérive permet d’être conforme sur les rejets, tout en consommant moins de réactifs ». Dans tous les cas, mais particulièrement en station d’épuration, il faut être vigilant sur l’encrassement du capteur lorsque l’on utilise des électrodes de mesure. Crison Instruments propose ainsi une sonde avec filetage PG13,5 qui permet le nettoyage automatique des électrodes de pH ou redox standard.
En effet, une électrode donnera toujours une tension, mais que représente-t-elle si les conditions de mesure ne sont pas respectées ? C’est le reproche fait notamment à la mesure redox avec sonde de platine où il faut régulièrement (toutes les semaines) raviver la surface du platine qui s’est polluée en adsorbant différents composés. De fait, certains exploitants passent à une mesure d’oxygène dissous moins fine, quand ce n’est pas tout simplement un retour à un déclenchement horaire de l’aération. L’utilisation de capteurs haut de gamme, à faible entretien, se heurte malgré tout à des politiques d’achat encore trop axées sur le seul prix unitaire alors que la mesure doit être vue dans la globalité du service rendu : coût d’exploitation et économies réalisées par une mesure de qualité. Certains fournisseurs d’équipements font parfois un constat amer.
Une utilisation facilitée
La température modifie les valeurs mesurées des potentiels électrochimiques ; mais aujourd’hui, la plupart des capteurs dispo-
…bénéficient d'une compensation de température intégrée. Autre cause d’incertitude sur la mesure, les interférences entre espèces au sein du milieu analysé (typique des membranes ioniques sélectives) dont les constructeurs tiennent compte. Il peut exister aussi des dérives au fil du temps dans les caractéristiques du capteur d’où la nécessité de procéder régulièrement à des étalonnages dont on veut s'affranchir. Tous les développeurs tiennent compte de ces facteurs dans la conception de leurs capteurs et appareils de mesure. Ceci facilite d'une part la prise de mesure et assure aussi une plus grande fiabilité. Jean-Pierre Molinier, Hach Lange, souligne aussi l'importance de l’adéquation du principe de mesure et de la sensibilité d'une méthode de mesure à l'usage visé : eau potable, épuration d'eau usée, rejet, eau industrielle, chacune a ses impératifs. Mais pour lui, « la demande du marché exprime plus de simplicité d'utilisation, de fiabilité avec une dérive minimum et une maintenance allégée ».
Les principes mis en jeu dans les capteurs sont aujourd'hui bien établis et l'on n'en voit pas apparaître de nouveaux. La mesure du pH proposée par de nombreux fabricants comme ABB, Aqualyse, Bamo, Endress+Hauser, Hach Lange, Hanna Instruments, Horiba, Datalink, Heito, OTT, Proanatec, SDEC, Swan, Mettler-Toledo Analyse Industrielle, Crison Instruments ou Thermo Fisher Scientific est basée sur la référence à potentiel connu, aujourd'hui essentiellement le couple argent-chlorure d'argent. Cette référence est sensible notamment aux ions sulfures et au vieillissement du pont ionique (dispositif qui assure la continuité électrique entre la cellule de mesure et le milieu à mesurer). D'où la nécessité de changer périodiquement le capteur, généralement une fois par an.
Pour s’en affranchir, Aqualyse (avec l'Eldiff) et Hach-Lange ont développé une mesure différentielle du pH. « Plutôt qu’une référence par couple électrochimique, la mesure est faite par rapport à une autre électrode de mesure de pH placée dans une solution tampon très stable. Il suffit de changer celle-ci une fois par an avec le pont ionique (une cartouche céramique). Les électrodes durent plus longtemps (jusqu’à trois fois plus) » explique Jean-Pierre Molinier. Toute une gamme de capteurs numériques différentiels pHD est apparue en 2004. La société généralise ce principe à ses autres capteurs électrochimiques : redox (ORP potentiel d’oxydo-réduction), ammonium, nitrates. Cela entraîne une modification des dimensions d’électrodes. Tous les fabricants ne suivent pas cette évolution mais la plupart ont développé des parades à la contamination (pièges à sulfure par exemple). L’abandon de la référence argent/chlorure d'argent n'est pas programmé. Autre innovation de ces dernières années chez Endress+Hauser, « la technologie numérique Memosens et sa connectique sans contact métallique qui apporte plus de tranquillité à l'utilisation sans risque d'erreur. »
teur en fiabilisant la mesure, notamment par rapport au problème lié à l’humidité », affirme Olivier Pichon. Le potentiel redox d'une solution est mesuré entre une électrode (platine ou or) plongeant dans le milieu et une cellule à potentiel fixe. C’est une mesure globale qui intègre tous les couples chimiques d’oxydo-réduction présents dans l'eau testée. Elle est proposée par des fabricants tels qu’ABB, Aqualyse,
Endress+Hauser, Hach Lange, Hanna Instruments, Heito, Jumo, Neosens, OTT, Proanatec ou Swan. Le reproche fait à cette mesure est sa dérive en fonction de l'état de la surface de platine. « Il faut la raviver périodiquement, une fois toutes les deux semaines, sous peine de voir dériver le signal. Mais cela reste une bonne mesure indicative, plus efficace que le taux d’oxygène dissous pour l’optimisation du déclenchement/arrêt des aérateurs dans les bassins d’aération » indique Séverine Goulette de Neotek-Ponsel.
Autre mesure électrique, la conductivité électrique représente la capacité de tous les ions (cations et anions) présents dans l’eau testée à conduire le courant ; elle est pratiquée en réseau d’assainissement, entrée de stations d’épuration ou bassins d’orage. Là encore, cette mesure est influencée par la température, la concentration globale en ions. Un principe de mesure utilisé est l’induction : un bobinage torique excité à fréquence fixe excite un autre bobinage, le couplage entre les deux est fonction de la conductivité plus ou moins grande du milieu où est plongé le capteur. La mesure peut être aussi plus directe par mesure d'un courant entre électrodes. Dans les deux cas, la maintenance est faible.
L’apparition des électrodes spécifiques
Concernant les stations d’épuration, une tendance émerge avec la mesure directe de l’ammonium et du nitrate par électrode spécifique. L’idée est de réguler le procédé au plus près des phénomènes de nitrification et dénitrification.
Deux ans, et seulement quelques grosses stations sont équipées aujourd'hui mais cela peut s'appliquer sur des stations moyennes. Nous proposons un support immergeable sur lequel on place les électrodes spécifiques et l’électrode de compensation ; avec le transmetteur, l'investissement est divisé par deux par rapport à un analyseur colorimétrique ou optique », précise Matthieu Bauer d'Endress+Hauser.
Franck Cussemane de Proanatec, qui propose ces électrodes spécifiques ammonium depuis trois ans, ne sent pas vraiment de tendance marquée en France, peut-être plus en Grande-Bretagne.
Dans ces électrodes, une membrane perméable à l'ion à déterminer est mise en jeu. Elle sépare le milieu à mesurer de la cellule de mesure. La représentativité de la mesure est donc directement liée à la sélectivité de la membrane par rapport à cet ion. Ceci se passe au niveau moléculaire, et si deux ions différents présentent le même « profil » ils ne seront pas discriminés, c’est ce que l’on appelle une interférence. La plus typique est celle des ions potassium. On s’affranchit de cela en réalisant en parallèle une analyse spécifique du potassium et en faisant une différence entre signaux. Hach Lange a intégré tout cela dans son système Cartrical sur la sonde NH4Dsc : les trois électrodes (référence, ammonium et potassium) sont intégrées et étalonnées les unes par rapport aux autres. Comme il s'agit en plus de capteur numérique, avec les valeurs d’étalonnage et les caractéristiques stockées, il suffit, lors du remplacement, d’entrer le code du capteur et il est prêt à fonctionner. Ce genre de capteur s’installe directement sur le bassin avec, si besoin, une tête nettoyante à l’air comprimé.
D'autres ions relèvent d'électrodes spécifiques. Proanatec propose des analyseurs de chlore résiduel. Franck Cussemane évoque le « Crius 3500, basé sur une mesure potentiométrique du chlore résiduel. Il est doté d’un étalonnage automatique et peut fonctionner 4 mois sans passage d’un opérateur, nous l'avons vérifié sur le terrain. L’appareil coûte environ 5 000 € mais il coûte très peu en entretien (pas d’étalonnage comme avec les mesures ampérométriques) et rien en réactifs indispensables aux méthodes colorimétriques. L’entretien se limite à un changement de capsule à 100 € une fois par an et la sonde est garantie 5 ans. Mais tout le monde n'est pas sensible à ces avantages ».
La société propose aussi des électrodes spécifiques pour métaux. Ceux-ci sont souvent analysés par des analyseurs portables. Ainsi Fondis Electronic propose le Senso+ qui détecte plomb, cuivre, nickel, fer, cadmium, chrome grâce à des électrodes à usage unique. Les gammes de mesure sont très étendues, par exemple de 5 µg/l à 20 g/l pour le plomb et le cuivre (10 µg/l mini). L'appareil ne nécessite pas de recalibration ; il est prêt à fonctionner immédiatement.
Le multiparamètre portatif HI 98185 de Hanna Instruments permet, outre la mesure de pH, de redox et de la température, la mesure des ions spécifiques en potentiométrie directe tels que l’ammoniaque, les bromures, le cadmium, le calcium, le cuivre, les fluorures... Un dispositif de contrôle d'étalonnage et de diagnostic de la condition de l’électrode Calibration Check assure une mesure de pH très sûre.
comporte un port USB pour échanger les données avec un PC. Hanna Instruments propose aussi une large gamme d’analyseurs de terrains multiparamètres. Aqualyse, sur ce type d’appareil, met l’accent sur les capteurs intelligents directement opérationnels et le soin apporté à la connectique anti-chocs.
La spectrométrie
Un autre principe utilisé pour déterminer la concentration d’espèces chimiques présentes dans l’eau est la spectrométrie, appelée aussi photométrie ou colorimétrie lorsque l’on utilise la lumière visible. La mesure est basée sur l’interaction d’une espèce chimique avec de la lumière visible, UV, infrarouge selon la nature de l’espèce. Mesure physique, elle ne nécessite pas de réactifs et est immédiate. Pour s’affranchir d’éventuelles interférences, on utilise souvent deux longueurs d’onde différentes, l’une qui sert à établir une base, l’autre l’absorption totale ; la différence entre les deux correspond à l’espèce mesurée. Plus la concentration est élevée, plus il y aura d’atténuation de la lumière, idem pour l’épaisseur de liquide traversée. C’est le cas de l’ion nitrate qui absorbe dans l’ultraviolet (exemple le capteur Nitrax de Hach Lange, s:can de Bamo, UV400 de Tethys Instruments ou le NT200 de Datalink).
Si l’espèce à mesurer n’interfère pas avec la lumière, on contourne cela en utilisant un réactif qui, en se liant avec l’espèce à déterminer, va créer un composé sensible à la lumière. Il faut alors prélever, mettre le réactif, déplacer la solution en cellule de mesure. Des automates sont conçus pour cela. C’est ainsi que l’on détecte le phosphate soit avec du vanadate qui va donner une couleur jaune, soit avec du bleu de molybdène (norme EN 1189). « La première solution donne de bons résultats à coût raisonnable et convient pour les stations d’épuration. Si les teneurs sont faibles (eau industrielle, ou de rivière) la seconde méthode est préférable car plus précise », précise Jean-Pierre Molinier. Il faut parfois préparer l’échantillon pour être sûr de la nature des espèces mesurées (cas du phosphate sous forme orthophosphate), ce qui allonge le temps d’analyse.
L’ammonium peut aussi être dosé par spectrométrie UV. C’est ce que fait l’AM200 de Datalink. Il utilise le fait qu’en ajoutant de la soude (réactif non spécifique), l’ammoniac se dégage, ce qui permet de s’affranchir d’interactions.
Le constructeur met en avant le très faible coût de fonctionnement puisque le seul réactif est la soude et que la lampe xénon utilisée dure plus de 10 ans.

