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Phosphore dans les eaux usées, un potentiel à exploiter

30 mai 2012 Paru dans le N°352 à la page 83 ( mots)
Rédigé par : Maëlle FONTENEAU et Samuel MARTIN

Le phosphore est indispensable au monde vivant et vital pour notre agriculture. Mais cette ressource stratégique doit faire face à l'épuisement progressif des gisements de phosphate qui entraîne l'augmentation des prix des minerais phosphatés. La récupération et la valorisation des phosphates contenus dans les eaux usées s'avèrent donc nécessaires pour contribuer à la gestion de la ressource et préserver l'environnement. Soutenues par ce contexte économique et environnemental favorable, les solutions alternatives de récupération des phosphates issus des eaux usées se sont multipliées ces dernières années. Face à la diversité des technologies présentes sur le marché, Degrémont s'appuie sur le développement de partenariats technologiques et sur l'expertise et les connaissances acquises par la R&D du groupe Suez Environnement pour intégrer ces technologies dans les filières de traitement des eaux usées et proposer ainsi une gamme complète de solutions de récupération des phosphates des eaux usées.

Soutenues par ce contexte économique et environnemental favorable, les solutions alternatives de récupération des phosphates issus des eaux usées se sont multipliées ces dernières années. Face à la diversité des technologies présentes sur le marché, Degrémont s’appuie sur le développement de partenariats technologiques et sur l’expertise et les connaissances acquises par la R&D du groupe Suez Environnement pour intégrer ces technologies dans les filières de traitement des eaux usées et proposer ainsi une gamme complète de solutions de récupération des phosphates des eaux usées.

Élément chimique, le phosphore est naturellement présent à l’état combiné dans de nombreux minéraux.

Du fait de son pouvoir fertilisant et nutritif, 80 % des quantités extraites des gisements mondiaux est consommé dans la production d’engrais; il s’utilise aussi dans la fabrication des détergents, intervient dans l’alimentation du bétail et dans quelques applications de chimie de spécialités.

Facilement exploitables mais non renouvelables, les gisements de roches phosphatées dont sont extraits 75 % de la production du phosphate, sont inégalement répartis dans le monde, avec une production concentrée au Maroc, en Chine, au Moyen-Orient et aux États-Unis.

[Photo : Figure 1 : Répartition de l’utilisation du phosphore dans les activités humaines.]

Pour répondre à la demande et s’affranchir des risques de pénurie, de volatilité du marché et de la hausse des prix, les industriels s’orientent vers d’autres sources d’approvisionnement. « La récupération du phosphore des eaux usées constitue une des solutions les plus prometteuses », explique Samuel Martin, Responsable du Département R&D, Pôle Assainissement & Environnement du CIRSEE, avant de rappeler que « Le phosphore contenu dans les eaux usées et son pouvoir fertilisant est déjà

[Photo : Figure 2 : Evolution du prix du phosphate en 50 ans (1960-2010).]
[Photo : Billes de struvite obtenues lors de tests pilotes.]

Indirectement valorisé via l’épandage des boues d’épuration en agriculture. Face aux controverses sur l'épandage notamment dans certains pays d'Europe du Nord et en Suisse qui craignent l’éventuelle contamination par des micro-polluants et des métaux lourds, de nouvelles technologies d’extraction du phosphore des eaux usées se sont développées ; elles permettent des ajouts ciblés de phosphore en fonction des besoins. Face à la volatilité du marché et à l’accroissement prévisible du coût de cette matière première, ces technologies devraient rapidement devenir économiquement pertinentes. Une récente étude menée par le CSIRO (Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation) indique que 22 % de la production d’engrais pourrait être assurée par la récupération du phosphore issu des eaux usées urbaines (urine + excréta).

Partenaire du traitement de l’eau, Degrémont intègre cette problématique dans la conception de ses usines de traitement des eaux résiduaires. « Nous disposons d'une gamme complète de solutions de récupération du phosphore ; la technologie la plus adéquate, en fonction de la situation, est mise en œuvre en satellite aux filières principales de traitement des eaux et/ou des boues », explique Marc Chevrel. « Il n’existe pas de technologie unique applicable à toutes les stations d’épuration mais plutôt un ensemble de solutions technologiques correspondant à des mises en œuvre et des objectifs de récupération de phosphore différents », souligne-t-il.

Un ensemble de solutions correspondant à des objectifs de récupération différents

« La cristallisation sous forme de struvite (MgNH₄PO₄) est particulièrement indiquée pour les stations de taille moyenne possédant une étape de digestion et une déphosphatation biologique », précise Mathieu Delahaye, Responsable Innovation chez Degrémont.

La mise en œuvre de la réaction de cristallisation est une technologie simple et mature : du chlorure de magnésium est injecté en amont d'un réacteur à lit fluidisé dans lequel circule l’effluent à traiter. Au contact du magnésium, le phosphore précipite spontanément sous forme de cristaux de struvite.

Ces cristaux vont croître progressivement au cours de leur séjour dans le réacteur jusqu’à former des billes blanches de struvite. Une injection de soude peut également être nécessaire pour contrôler le pH de la réaction qui conditionne le taux de récupération du phosphore.

Cette technologie s’applique à des effluents chargés en phosphore dissous (typiquement les retours de digestion) et permet de récupérer le phosphore sous forme de

[Photo : Pilote d'un réacteur à lit fluidisé.]

billes de struvite directement valorisables en tant qu’engrais à libération lente.

Le principe de cristallisation présente l’avantage d’une mise en œuvre simple mais possède un potentiel limité de récupération du phosphore. En effet, les retours de digestion ne contiennent dans le meilleur des cas que 40 % du flux total de phosphore entrant sur la station d’épuration. Avec un taux de cristallisation maximum de 90 % du phosphore dissous présent dans l’effluent à traiter, le taux de récupération réel du phosphore ne dépasse pas 36 % du flux de phosphore total entrant sur la station.

Pour les stations de petites tailles, l’alternative porte sur un filtre planté de roseaux développé par l’IRSTEA¹ et le CIRSEE² (centre de recherche de Suez Environnement) dans le cadre du projet MAREVAP (MAtériaux pour la REtention et la VAlorisation du Phosphore dans les effluents urbains) en partenariat avec la SINT³ et le CNRS⁴.

1 : Institut national de Recherche en Sciences et Technologies pour l’Environnement et l’Agriculture. 2 : Centre International de Recherche sur l’Environnement et l’Eau. 3 : Société d'Ingénierie NATURE & TECHNIQUE. 4 : Centre National de la Recherche Scientifique.

Cette technologie repose sur le principe d’adsorption et de précipitation progressive du phosphore dissous sur un média spécifique. Ce média est en fait constitué d’apatite, autre nom donné aux minerais phosphatés extraits des gisements naturels de phosphore. Au-delà du simple traitement tertiaire du phosphore, l’apatite pourrait probablement être valorisée comme engrais au bout des dix ans de vie du filtre.

Le plus grand potentiel de récupération du phosphore se situe au niveau des boues qui peuvent concentrer jusqu’à 90 % de la charge en phosphore entrant sur la station. Plusieurs sociétés développent actuellement des technologies plus complexes de traitement des boues ou des cendres d’incinération par voie chimique (utilisation d’acides ou de bases fortes) et par voie thermique (températures de traitement supérieures à 1 000 °C).

Ces technologies, encore au stade pilote, permettent de maximiser le rendement de récupération du phosphore mais nécessiteront des investissements plus importants et entraîneront des coûts d’exploitation plus conséquents.

Pour Degrémont, « l’objectif reste d’optimiser l’intégration de ces technologies sur les filières de traitement des eaux usées grâce à notre expertise, aux connaissances acquises avec la R & D de Suez Environnement et au développement de partenariats technologiques », précise Christophe Cassant, Directeur Technique et Innovation de Degrémont.

Quant à la valorisation du phosphore ainsi extrait des eaux usées, elle dépend du procédé de récupération : elle est soit indirecte en tant que matière première dans les procédés de production industriels d’engrais, soit directe en tant qu’engrais.

La revente est gérée par des sociétés spécialisées extérieures sous deux formes :

  • des solutions locales de revente à étudier au cas par cas ;
  • des solutions intégrées de commercialisation reposant sur un réseau de revente.

Dans tous les cas, Degrémont s’engage à respecter les réglementations en vigueur dans la valorisation du phosphore, et propose d’accompagner ses clients dans les procédures d’agrément des productions revendues.

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