Les eaux de surface de la ville de Moulay Yacoub située au centre du Maroc sont souvent réutilisées dans l'irrigation des cultures, et comme boisson pour les animaux sans aucun traitement préalable, ce qui pourrait présenter une atteinte à la santé et l'environnement. Dans ce cadre, un suivi durant la saison printanière et estivale (mars juin) a permis de caractériser du point de vue physico-chimique et bactériologique cinq retenues d'eau dans cette ville. Les résultats les plus alarmants des analyses physico-chimiques et bactériologiques des eaux de surface, sont une pollution organique en terme de DCO moyenne de 307,6 mg/l enregistrée au grand canal et DBO5 moyenne de 72,6 mg/l enregistrée à Oued Fès 2 et une contamination bactérienne de 3,6x105 CT/100 ml, 1,9x105 CF/100 ml et 3,8x104 EI/100 ml enregistrée au grand canal. Selon les normes marocaines des eaux de surface, les retenues d'eau étudiées peuvent être classées de bonne à mauvaise qualité.
Sur les 13 600 millions de km³ d'eau qui couvrent notre planète, seulement 0,014 % est de l'eau douce utilisable par l'homme sous forme d’eaux de surface (Oudalal, 1977). Si cette quantité est suffisante pour répondre aux futurs besoins de l’humanité, l’altération de la qualité de l'eau rend la part compatible avec les utilisations humaines de plus en plus petite (Wheal, 1991). En effet, la qualité de l'eau est altérée par une surcharge en matières organiques, par des substances toxiques provenant des activités agricoles et par des effluents industriels et domestiques rejetés dans le milieu récepteur sans traitement préalable (Bousaab et al., 2007). L’évaluation de la qualité des eaux repose à la fois sur l’analyse physico-chimique de l'eau, sur l’analyse biologique de ces écosystèmes, sur la morphologie et l’hydrologie des cours d’eau. Ces approches sont complémentaires et indispensables.
Le présent travail fait le point sur l'information obtenue par l’analyse physico-chimique et bactériologique des eaux de surface de la ville de Moulay Yacoub, située au centre Nord du Maroc. En effet, ces retenues d'eau sont souvent utilisées par la population autochtone pour le lavage de la laine et de certains légumes (carottes, betteraves, tomates, radis, laitue…) avant qu’ils ne les commercialisent sur le marché local et national et également comme eau de boisson pour leurs bétails. La proximité de ces
Retenues d’eau des sites agricoles et/ou industriels impose le risque croissant de contaminer la santé et l'environnement de la population avoisinante par la pollution de ces eaux par des produits chimiques et microorganismes pathogènes.
Cette étude nous a permis d’évaluer la qualité de ces eaux de surface, réutilisées pour d'autres activités humaines et animales, ainsi que de prévoir leur impact sur la santé et l'environnement.
Matériels et méthodes
Zone d’étude
Notre étude a concerné les retenues d’eau de la ville de Moulay Yacoub. Cette dernière est située à 25 km au N-O de la ville de Fès et s’étend sur un territoire de 1 700 km². Elle héberge une population de 157 435 habitants et est limitée au nord par la province de Taounate, à l’est et au sud-est par la préfecture de Fès, au sud par les provinces de Sefrou et El Hajeb, à l'ouest par la préfecture de Meknès et la province de Sidi Kacem.
La ville de Moulay Yacoub est caractérisée par plusieurs activités industrielles (agro-alimentaires, textiles...) et touristiques, notamment à proximité des sources thermales de Moulay Yacoub et celle d’Aïn Alah.
La pluviométrie dans la région de Moulay Yacoub est généralement assez élevée en hiver et quasi nulle en été. La moyenne annuelle pluviométrique est de l’ordre de 600 mm/an.
Les précipitations annuelles pendant les quinze dernières années ont varié entre 185,6 mm (1994/1995) et 564,2 mm (1995/1996). Ces pluies jouent un rôle très important dans la formation et le remplissage des retenues d'eau.
La province de Moulay Yacoub comporte 40 retenues d’eau (recensement de l’année 2008). Parmi ces 40 lacs, cinq ont été choisis (figure 2) pour la réalisation de cette étude du fait de leur proximité et de leur utilisation coutumière par la population autochtone, en particulier les agriculteurs.
- – Oued Aïn Chkef : oued permanent situé à 382 m d'altitude, 33°59,467' de latitude et 5°01,163' de longitude, d'une superficie de 6 000 m². Il est entouré par quatre localités limitrophes (Aïn Chkef, Oueled Maaref, Coop Rajae, Tlissa) totalisant une population de 3 682 habitants.
- – Oued Nja : oued permanent situé à 783 m d'altitude, 33°59,649' de latitude et 5°12,11' de longitude, d'une superficie de 12 000 m². Il est entouré par deux localités limitrophes (Coopérative Hilal, Douar Laachara) totalisant une population de 1 719 habitants.
- – Le Grand Canal : canal d’eau situé à 1 225 m d'altitude, 34°02,46' de latitude et 5°08,138' de longitude, d’une superficie de 27 000 m². Il est entouré par deux localités limitrophes (Intissar, Douiyet) totalisant une population de 1 075 habitants.
- – Oued Fès 2 : oued permanent situé à 348 m d’altitude et 5°03,671' de longitude. Il est entouré par huit localités limitrophes totalisant 26 407 habitants.
- – Galtat Laarais : lac permanent situé à 367 m d’altitude, 34°01,696' de latitude et 5°05,106' de longitude, d’une superficie de 56 000 m². Il est entouré par trois localités limitrophes (Machree Krim, Mahaka, Douiyat) totalisant une population de 1 848 habitants.
Échantillonnage
Les prélèvements des eaux destinées aux analyses physico-chimiques et bactériologiques ont été effectués durant la saison printanière et estivale (mars-juin) à raison d'un prélèvement par mois.
Analyses de l’eau
Analyses physico-chimiques de l’eau
Les prélèvements des eaux destinées à
Tableau 1 : Méthodes d’analyses des différents paramètres physico-chimiques
| Température |
| pH |
| Oxygène dissous |
| Conductivité électrique |
| Nitrate |
| Ammonium |
| Orthophosphate |
| DCO |
| DBO₅ |
L’analyse bactériologique ont été effectués en même temps que les eaux destinées à l’analyse physico-chimique et transportées au laboratoire dans une glaciaire à 04 °C. La méthodologie et les procédures des analyses physico-chimiques utilisées sont celles de (Rodier, 1996) adoptées par le laboratoire de biotechnologie à la Faculté des Sciences Dhar El Mahraz de Fès. Neuf paramètres physico-chimiques ont été analysés dans les eaux et quatre sur le terrain (tableau 1).
La température, le pH, l’oxygène dissous et la conductivité ont été mesurés sur le terrain par un appareil de marque WTW Multiline P4 Universal.
Analyses bactériologiques
Les prélèvements de l’eau ont été effectués à raison de deux prélèvements par mois à la surface de l’eau dans des flacons stériles en verre de capacité 500 ml et transportés au laboratoire dans une glaciaire à 04 °C. La méthodologie et les procédures des analyses bactériologiques utilisées sont celles adoptées par le Laboratoire Régional de Diagnostic Épidémiologique et d’Hygiène de Milieu (LRDEHM) et publiées dans le Bulletin officiel n° 5062 (Normes marocaines des eaux de surface, 2002).
Dénombrement des coliformes totaux (CT)
La méthode utilisée pour le dénombrement des coliformes totaux est celle décrite dans la norme marocaine (NM 03.7.001, 2006). Nous avons procédé à la filtration de 100 ml d’eau à analyser sur membrane filtrante de 0,45 µm de diamètre, qui a été placée sur le milieu de culture Tergitol au TTC. Les boîtes sont ensuite incubées à 36 °C pendant 24 heures. La lecture consiste à calculer le nombre de germes en Unités Formant Colonies (UFC) par 100 ml en comptant le nombre de colonies typiques jaune-orange des coliformes totaux.
Dénombrement des coliformes fécaux (CF)
Nous avons procédé de la même façon que pour les coliformes totaux (NM 03.7.001, 2006), sauf que l’incubation est effectuée pendant 24 heures à 44 °C. Nous avons calculé le nombre des UFC par 100 ml en comptant les colonies typiques de couleur jaune.
Dénombrement des entérocoques intestinaux
Après la filtration de 100 ml de l’eau à analyser sur membrane filtrante, cette dernière est déposée sur le milieu de Slanetz et Bartley, puis incubée à 36 °C pendant 48 heures (NM 03.7.001, 2006). Nous avons compté toutes les colonies typiques bombées montrant une couleur rouge, marron ou rose, soit au centre soit sur l’ensemble de la colonie. Nous avons exprimé les résultats en UFC par 100 ml.
Résultats et discussion
Pour les résultats d’analyses physico-chimiques et bactériologiques, nous avons comparé nos valeurs aux normes marocaines définissant la grille de qualité globale des eaux de surface publiée dans le Bulletin officiel n° 5062 de l’année 2002. Les résultats des analyses physico-chimiques et bactériologiques sont présentés comme suit :
Résultats des analyses physico-chimiques
Les analyses physico-chimiques consistent à comparer les concentrations des polluants mesurées dans l’eau aux critères reconnus comme assurant la protection du milieu aquatique (Berryman, 1990).
La température : la température est un paramètre très important à étudier. Elle joue un rôle dans la solubilisation des sels et surtout des gaz, dans la détermination du pH et pour la connaissance de l’origine de l’eau (Rodier et al., 1996). Elle permet aussi de caractériser les différents biotopes (Elbouhali, 2001). La température des eaux des lacs étudiés varie entre 16,5 °C enregistrée le 16/03/08 au lac Oued Fès 2 et 31,3 °C le 05/05/08 à Oued Nja. Nous avons constaté que la température de Oued Nja, du grand canal et de Oued Fès 2 a connu une augmentation importante jusqu’au 30/05/08, date à laquelle elle a chuté. Par contre, à Galtat Laaraiss, durant la période d’étude, nous avons constaté une baisse importante puisque c’est un lac ouvert et influencé par les conditions climatiques. À Oued Ain Chkef, la température est restée presque constante.
La différence entre la température maximale et minimale (écart thermique) est de 2,4 °C à Oued Ain Chkef puisqu’il s’agit d’un lac entouré par une couverture végétale assez dense, ce qui bloque l’ensoleillement. À Oued Nja et à Oued Fès 2, l’écart thermique est de 12,8 °C ; ceci s’explique par le fait que ce sont des lacs ouverts et pourvus d’espèces végétales moins hautes, ce qui permet un bon ensoleillement. À Galtat Laaraiss, l’écart thermique est de 5,9 °C et, au grand canal, de 9,5 °C. Concernant la température, les eaux des lacs étudiés peuvent donc être considérées comme allant d’excellente à mauvaise qualité selon les périodes de prélèvement.
Le pH : le pH est un paramètre très sensible à divers facteurs environnementaux. Il dépend aussi des variations de la température, de la salinité, du taux d’oxygène dissous et de la nature géologique du terrain (Azami Hassani, 1996). Il est influencé également par l’assimilation chlorophyllienne.
lienne, de la respiration des organismes et du métabolisme des bactéries et des champignons inférieurs (Louah, 1995).
Les lacs étudiés présentent un pH neutre à légèrement alcalin. Il varie entre 6,85 enregistré le 26/03/08 au grand canal et 8,81 enregistré le 30/05/08 à Oued Fès 2. Selon la norme marocaine des eaux de surfaces (6,5 - 9,2), ces eaux peuvent être classées de bonne à moyenne qualité (figure 4).
La conductivité électrique :
la conductivité électrique mesure la capacité d’une solution à conduire un courant électrique et elle est exprimée en µs/cm. Cette composante renseigne sur le taux de minéralisation des eaux. Une conductivité élevée témoigne d’une forte minéralisation des eaux (Louah, 1995).
Nous remarquons que la valeur de la conductivité électrique est presque constante dans tous les lacs : au grand canal elle est de l’ordre de 919 µs/cm, à Oued Nja de 532 µs/cm, à Oued Fès 2 de 1232 µs/cm et à Oued Ain Chkef de 737 µs/cm, sauf à Galta Laaraiss où elle a connu une augmentation le 05/05/08 pour atteindre la valeur de 10 073 µs/cm (figure 5).
Selon la norme marocaine des eaux de surfaces, nous pouvons dire que les eaux des lacs peuvent être classées parmi les eaux d'excellente à moyenne qualité du point de vue teneur en sels minéraux.
L’oxygène dissous :
la teneur en oxygène dissous est influencée par la solubilisation de ce gaz dans l'eau à partir de l’atmosphère et par l'activité biologique des êtres vivants aquatiques (photosynthèse et respiration). Tous les lacs connaissent une augmentation d’oxygène dissous, sauf Oued Ain Chkef où la concentration d’oxygène reste presque constante (0,24 mg/l). Nous avons constaté que l’oxygène dissous augmente avec une pente raide au lac Galta Laaraiss dans lequel nous avons enregistré la valeur minimale de 0,01 mg/l le 23/04/08 et la valeur maximale de 0,31 mg/l le 05/05/08. Les trois autres lacs présentent une variation légèrement importante (figure 6).
Selon la norme marocaine des eaux de surfaces, nous pouvons dire que les eaux des lacs peuvent être classées parmi les eaux de très mauvaise qualité.
Les nitrates :
les nitrates résultent de l’oxydation de toutes les formes d’azote (azote organique, ammoniaque, nitrites...). Ils sont plus abondants quand l'eau est oxygénée. En effet, en période de faible oxygénation, les nitrates peuvent jouer le rôle de donneur d’oxygène et éviter ainsi l’anaérobie (Rodier et al., 1996).
Dans les lacs étudiés, la teneur en nitrates varie entre 0,02 mg/l enregistrée le 26/03/08 au lac grand canal et 7,75 mg/l enregistrée le 30/05/08 à Oued Nja. Les teneurs en nitrates présentent des fluctuations importantes. Selon la norme marocaine des eaux de surfaces nous pouvons les classer parmi les eaux d’excellente qualité du point de vue teneur en nitrates (figure 7).
L’ammonium :
la présence de l'ammonium témoigne d'un processus de dégradation incomplète de la matière organique. L’origine de l'ammonium dans les eaux superficielles peut être la matière végétale, la
matière organique animale ou humaine (Rodier et al., 1996), les rejets industriels et les engrais...
Les teneurs en ammonium présentent des fluctuations importantes et varient entre 0,003 mg/l enregistrées le 30/05/08 à Oued Fes 2 et 1,643 mg/l enregistrées le 30/05/08 au grand canal. Leur présence peut être expliquée par une grande activité de rejet de matières organique dans le lac Oued Fes 2 (lavage de la laine) et dans le lac Oued Ain Chkef (lavage de la carotte), une forte activité agricole, industrielle et les excréments d’animaux pour le lac Oued Nja, lac Galtat laaraiss et lac Grand canal.
Selon la norme Marocaine des eaux de surfaces, nous pouvons les classer d’excellente (< 0,1 mg/l) (lac Oued Fes 2) à moyenne qualité (0,5-2 mg/l) (lac grand canal) (figure 8).
Nous avons observé que la teneur en nitrate est inversement proportionnelle à celle de l'ammonium dans toutes les retenues d'eau.
L’orthophosphate : les orthophosphates peuvent avoir deux origines : une naturelle due à la décomposition de la matière organique au lessivage de minéraux, et une origine synthétique liée aux engrais, aux détergents et à l'industrie chimique (Azami Hassani, 1996).
Les concentrations de l'orthophosphate des eaux des lacs étudiés sont variables entre 0,032 mg/l enregistré le 19/05/08 à Galtat laaraiss et 2,426 mg/l le 26/04/08 au grand canal.
Selon la norme Marocaine des eaux de surfaces, les eaux des lacs peuvent être classées d’excellente (cas de Gueltet laaraiss) à mauvaise qualité (cas du grand canal). Nous avons remarqué que la concentration en orthophosphate au lac grand canal et à Oued Fes 2 varie de la même manière avec des valeurs plus faibles à Oued Fes 2 qu’au grand canal dans tous les prélèvements, sauf le prélèvement du 30/05/08 où la concentration à Oued Fes 2 dépasse la valeur du grand canal. Ces fortes valeurs enregistrées au lac grand canal sont élevées par rapport aux normes Marocaines des eaux de surfaces ; ceci peut être lié aux rejets des détergents dans cette eau, alors qu’à Oued Fes 2 les valeurs peuvent être expliquées par les activités du lavage de la laine.
Les concentrations à Oued Ain Chkef et Galtat laaraiss varient aussi de la même manière et presque avec les mêmes proportions où ils enregistrent une valeur maximale le 26/03/08 avant de diminuer par la suite dans tous les prélèvements. Les valeurs enregistrées à Oued Ain Chkef et à Galtat laaraiss peuvent être expliquées par la décomposition de la matière organique comme elles peuvent être liées aux engrais utilisés dans les terrains agricoles avoisinants. À Oued Nja, nous avons enregistré des valeurs faibles et cela dans tous les prélèvements durant la période d’étude. Ces teneurs faibles pourraient être expliquées par une faible activité humaine et animale à proximité de cet oued (figure 9).
Demande chimique en oxygène : la demande chimique en oxygène (DCO) est la quantité d’oxygène consommée par les matières existant dans l’eau et oxydables dans des conditions opératoires définies. Elle correspond à une estimation des matières oxydables présentes dans l’eau, quelle que soit leur origine organique ou minérale (Rodier et al., 1996). Les concentrations de la DCO varient entre 0 mg/l dans tous les lacs enregistrées le 30/05/08, due à la pluie qui a précédé le prélèvement et qui a contribué à la dilution de l’eau des lacs, et 948 mg/l enregistrées le 23/04/08 au grand canal. Ceci pourrait être expliqué par la présence des matières organiques qui polluent le lac et qui proviennent d’une eau rejetée dans le grand canal. Les valeurs élevées enregistrées dans les autres retenues d’eau peuvent être expliquées de la même manière. En général, selon la norme Marocaine des eaux de surfaces, nous pouvons dire que les eaux des lacs sont de moyenne (34-40 mg/l) à très mauvaise qualité (> 80 mg/l) (figure 10).
Demande biochimique en oxygène : la demande biochimique en oxygène (DBO₅) dépend de la nature des matières organiques dissoutes, de la teneur en oxygène dissous, ainsi que de la présence ou de l’absence d’éléments inhibiteurs de la flore microbienne (métaux lourds, hydrocarbures, détergents, etc.) (Azami Hassani, 1996). Les résultats des analyses montrent que la valeur de la DBO₅ oscille entre 0 mg/l enregistrée le 19/05/08 à Galtat laaraiss et 320 mg/l enregistrée le 23/04/08 à Oued Fes 2 où le lavage de la laine contribue à la pollution organique de ce gîte. Selon la norme marocaine des eaux de surfaces, les eaux sont considérées comme polluées lorsque leur DBO₅ dépasse 10 mg/l. D’après cette norme, nous pouvons dire que les eaux de surface étudiées sont polluées par un
apport de matières organiques. Les résultats des analyses montrent que la valeur de la DBO5 au lac grand canal oscille entre 10 mg/l enregistrées le 19/05/08 et 35 mg/l enregistrées le 05/05/08, ce qui montre que l’eau de ce lac contient une pollution organique plus ou moins biodégradable. À Oued Nja, la teneur en DBO5 est relativement faible, ceci pourrait être expliqué par une dégradation importante de la matière organique. À Galtat laaraiss, la teneur en DBO5 varie d’un prélèvement à l’autre, mais les valeurs restent relativement faibles, ce qui pourrait être expliqué par la présence de matière organique facilement biodégradable, alors qu'à Oued Fes I et Oued Ain Chkef, la teneur en DBO5 fluctue d’une période de prélèvement à l’autre. Cette fluctuation pourrait être expliquée par une fluctuation de l’alimentation de ce lac par la matière organique (figure 11).
Résultats des analyses bactériologiques
Dénombrement des coliformes totaux
Dénombrement des coliformes totaux : la plus importante contamination par les coliformes totaux (CT) est enregistrée le 30/05/08 au grand canal (11,33 × 10⁶ ufc/100 ml), tandis que la valeur minimale est enregistrée le 26/03/08 au grand canal (30 ufc/100 ml). Nous pouvons dire que depuis le 26/03/08, les eaux du grand canal répondent à la norme d’excellente qualité, alors au-delà de cette date, ces eaux deviennent de très mauvaise qualité. Ceci pourrait être expliqué par une pollution fécale engendrée par les rejets domestiques avoisinants, alors que pour Oued Nja, nous avons remarqué que la contamination par les CT ne subit pas de très grandes variations le long de la période d’étude. Les lacs de Galtat laaraiss et Oued Ain Chkef ont subi presque la même variation où nous avons constaté une augmentation de la concentration le 05/05/08, puis une diminution le 19/05/08 avant d’augmenter une autre fois le 30/05/08. À Oued Fes 2, nous avons remarqué qu'il a subi une diminution importante entre le 26/03/08 et le 30/05/08. En général, au niveau de tous les lacs, la concentration des CT subit une diminution le 21/05/08 (figure 12).
Dénombrement des coliformes fécaux
Les coliformes fécaux (CF) permettent de mettre en évidence une pollution d’origine fécale. Les valeurs des CF varient entre 3 ufc/100 ml enregistrées le 23/04/08 à Oued Ain Chkef et 6,66 × 10⁵ ufc/100 ml enregistrées le 23/04/08 au grand canal. Nous avons remarqué que le grand canal, Oued Nja et Oued Fes 2 ont enregistré une augmentation importante le 23/04/08, tandis que Oued Fes 2 et Oued Ain Chkef ont enregistré une diminution de la pollution fécale le 05/05/08. Après le 3ᵉ prélèvement, nous avons remarqué une baisse importante de la concentration des CF dans tous les lacs, ceci pourrait être expliqué par une diminution de la charge polluante apportée par les rejets domestiques avoisinants avant de subir tous une augmentation le 30/05/08 (figure 13). Les valeurs élevées des CT et des CF pourraient être expliquées par une pollution fécale très importante d’origines domestiques des régions avoisinantes.
Dénombrement des entérocoques intestinaux
Le nombre des entérocoques intestinaux (EI) est directement lié à la quantité de la matière fécale animale qui se trouve dans les eaux. Le nombre des EI varie d'une période de prélèvement à l’autre avec un maximum de 16,66 × 10⁴ ufc/100 ml enregistré le 26/03/08 au grand canal et un minimum de 33 ufc/100 ml enregistré le 21/05/08 à Galtat laaraiss.
À Oued Nja, nous avons remarqué que durant la période d’étude, les valeurs des EI sont presque constantes. Alors qu’au grand canal, nous avons enregistré une valeur maximale le 26/03/08 puis cette valeur a tellement diminué pendant le 2ᵉ
et le 3ᵉ prélèvement avant de subir une augmentation pendant le 4ᵉ et le 5ᵉ prélèvement. À Galtat laaraiss, Oued Fes 2, Oued Ain chkef, nous avons enregistré une diminution importante des EI le 23/04/08 avant de subir une augmentation importante durant les autres prélèvements, sauf à Galtat laaraiss qui a enregistré une diminution très importante le 21/05/08.
La contamination au grand canal, Oued Nja, Galtat laaraiss, Oued Ain chkef peut être expliquée par la présence du bétail à proximité de ces lacs.
À Oued Fés 2, la contamination peut être liée aux activités du lavage de la laine dans l’eau du lac (figure 14).
Le rapport entre les valeurs minimales des CF et les EI au lac grand canal est de 0,35 et entre les valeurs maximales est de 3,9. Ces valeurs expliquent que l’origine de la contamination est mixte. À Oued Nja, le rapport varie entre 0,57 et 1, ce qui indique que l’origine de la contamination est animale.
À Galtat laaraiss, le rapport varie entre 0,18 et 43,47, ce qui indique que l’origine de la contamination est mixte. À Oued Fes 2, le rapport varie entre 11 et 25,61, ce qui indique que l’origine de la contamination est humaine alors qu’à Oued Ain chkef, le rapport varie entre 0,01 et 0,1, ce qui indique que l’origine de la contamination est animale.
En conclusion, nous constatons d’après l'étude microbiologique que les eaux des retenues d’eau étudiées présentent une contamination bactérienne d'origine humaine et animale de faible à importante.
Conclusion
D’après l’étude physico-chimique et bactériologique des eaux de surface étudiées, dans la ville de My Yacoub, nous pouvons déduire selon les normes marocaines relatives à la qualité des eaux de surface, publiées au bulletin officiel n° 5062 de l’année 2002 que :
- - Le lac Grand canal présente une température élevée, un pH alcalin, une teneur importante en ammonium et une conductivité électrique faible et que les valeurs enregistrées pour l'ammonium, l’orthophosphate, la DCO, la DBO, l’O₂ dissous, les CT, CF et EI montrent également une pollution organique importante et classent l’eau de ce lac de mauvaise qualité.
- - L'Oued Nja présente une température élevée, une teneur faible en ammonium, une teneur élevée en orthophosphate et une concentration élevée en coliformes totaux. Les valeurs trouvées pour l'ensemble des paramètres physico-chimiques et microbiologiques sont en faveur d'une eau de bonne qualité.
- - Le lac Galtat laaraiss présente une température élevée, une teneur faible en orthophosphate, en CF et EI. Les valeurs trouvées pour l'ensemble des paramètres physico-chimiques et microbiologiques sont en faveur d'une eau de bonne à moyenne qualité.
- - L'Oued Fés 2 présente une température élevée, une teneur faible en ammonium, en orthophosphate, une concentration faible en CT et en CF. Les valeurs trouvées pour l'ensemble des paramètres physico-chimiques et microbiologiques sont en faveur d’une eau de bonne à mauvaise qualité selon le temps de prélèvement, ce qui indique qu'il y a une pollution qui n’est pas constante dans le temps.
- - L'Oued Ain chkef est caractérisé par une température élevée, une teneur faible en orthophosphate, en nitrate et en ammonium et un nombre élevé en CT. Les valeurs trouvées pour l’ensemble des paramètres physico-chimiques et microbiologiques sont en faveur d’une eau de bonne à moyenne qualité.
Les retenues d'eau étudiées peuvent être réutilisées pour l'irrigation et pas comme eau d’alimentation, à l'exception du lac grand canal qui présente une pollution chimique et bactérienne importante et que l'utilisation de ses eaux à des fins agricoles ou par la population avoisinante présentera sans doute un danger pour la santé et l’environnement.
En effet, la contamination bactérienne, de moyenne à importante et d'origine humaine et animale, des retenues d’eau de la ville de Moulay Yacoub pourrait provoquer la propagation de nombreuses maladies infectieuses et parasitaires à transports hydriques notamment : le choléra, la typhoïde, l’hépatite, la bilharziose, le paludisme (OMS, 1990) et des toxi-infections alimentaires collectives par la consommation des cultures irriguées par ces eaux (Talouizte et al., 2007) (El Ouali Lalami et al., 2008). Il faut donc envisager le traitement de ces eaux notamment celle du lac Grand Canal avant leur réutilisation.

