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Réduction et élimination des boues biologiques en industrie : le procédé BioControl

30 decembre 2003 Paru dans le N°267 à la page 59 ( mots)
Rédigé par : Claude DELPORTE et Sébastien CORBEIL

Le procédé décrit dans cet article permet de réduire la quantité de boue en excès et donc de résoudre à faible coût une partie des problèmes causés par l'évacuation des boues de stations d'épuration. Il importe d'évaluer l'ensemble de la filière boue pour arriver à une solution pérenne tenant compte des contraintes technico-économiques propres à chaque site.

On le sait, les boues provenant de stations de traitement d'eau industrielle sont et seront de plus en plus problématiques. D’une part, l'augmentation du traitement des effluents dictée par la réglementation est intrinsèquement responsable de l'augmentation de la quantité totale de boues générée. D'autre part, la disparition et la saturation de certains exutoires (la valorisation agricole par exemple) crée un manque à gagner important auquel les industriels devront faire face dans les années à venir.

Pour bien aborder ce problème et optimiser les solutions, il est important de considérer la problématique boue dans sa globalité. Avant même de penser aux exutoires possibles, il convient de se poser la question : comment réduire le volume des boues générées tout en respectant les normes de rejet ? Comme le montre la figure 1, les solutions de réduction sont multiples et interviennent à différents endroits sur la filière de traitement. Selon les principes de base de génie chimique, les solutions les plus pérennes sont celles qui s’attaquent au problème au plus près de la base. Les techniques de recyclage et de réutilisation d'eau à l'intérieur du process sont donc les premières à prescrire. Cet exercice doit bien sûr être fait avec des

[Photo : Figure 1 : L'optimisation des boues en industrie.]
[Photo : Ajout de BioControl™ au procédé existant.]

Outils de benchmarking précis permettant d'identifier toutes les possibilités et de les optimiser.

Viennent ensuite les procédés de réduction de boues in-situ dans lesquels s’inscrit le procédé BioControl™ dont nous discutons dans cet article. La majorité des techniques utilisées aujourd’hui utilisent des stress thermiques, des enzymes ou des oxydants, tels que l’ozone pour diminuer la croissance organique dans les bassins de traitement et ainsi réduire la quantité de boue en excès. BioControl™ se positionne différemment par rapport à ces procédés puisqu’il utilise des techniques de base, anoxie, aérobie et anaérobie, pour contrôler la croissance bactérienne. Nous avons choisi de présenter le procédé BioControl™ au travers d’une étude de cas de l’installation de ce procédé chez un de nos clients.

Étude de cas : le procédé BioControl™ chez Cogesal-Miko, Groupe Unilever

L’usine de Cogesal-Miko de Saint-Dizier (52) produit essentiellement des crèmes glacées. La pollution carbonée moyenne correspond à celle d’une station d'épuration de 60 000 équivalents-habitants.

Attentif et soucieux du respect de l’environnement, Cogesal-Miko a équipé l’usine de Saint-Dizier d'une installation de traitement des eaux usées afin de respecter les normes très strictes pour un rejet dans le milieu récepteur.

La station existante comprend 3 étapes de traitement et l’atelier de déshydratation des boues en excès :

1. Le traitement primaire par flottation permet l’élimination des graisses ; ces graisses sont ensuite hydrolysées et éliminées par voies biologiques.

2. Le traitement biologique de la pollution dissoute des eaux usées est réalisé par le procédé de boues activées ; il comporte principalement une phase de mise en contact de l’eau à épurer avec un floc bactérien en présence d’oxygène : oxygène de l'air ou éventuellement oxygène pur, suivi par une étape de séparation du floc par clarification.

Les fortes concentrations en micro-organismes permettent d’optimiser les réactions biologiques et l’activité bactérienne qui se déroulent classiquement dans le milieu naturel.

Pour maintenir la masse bactérienne en suspension, et préserver la quantité de microorganismes nécessaire pour assurer un niveau optimum d’épuration, une agitation artificielle est indispensable ainsi qu’un dispositif de recyclage pour garantir le retour vers le bassin d’aération des boues biologiques décantées dans le clarificateur.

Le traitement conduit à la formation de composés simples tels que l’eau et le gaz carbonique ainsi qu’à la production de boues en excès. Schématiquement on peut écrire les deux réactions de base pour l’élimination de la pollution carbonée.

Synthèse :

6C₆H₁₂O₆ + 4NH₃ + 16O₂ → 4C₅H₇NO₂ + 16CO₂ + 28H₂O

Auto-oxydation ou respiration endogène :

4C₅H₇NO₂ + 20O₂ → 20CO₂ + 4NH₃ + 8H₂O

3. Le traitement tertiaire par décantation, assisté éventuellement par coagulation/floculation, a pour but d’améliorer les caractéristiques de l’eau traitée en réduisant au maximum la concentration en matières en suspension.

L’injection de réactifs permet d’affiner la qualité du rejet final par l’élimination du phosphore et par l’élimination d’une part de la DCO non biodégradable.

4. La déshydratation et la stabilisation des boues en excès sont réalisées par centrifugation et dosage de chaux. Les boues sont ensuite évacuées vers une plate-forme de compostage.

Le cahier des charges de Cogesal-Miko, défini en 2002, correspondait au renouvellement du contrat d’exploitation incluant le personnel, les réactifs, les analyses et la réalisation des travaux.

En plus de l’approche standard « exploitation et maintenance », le site souhaitait améliorer le fonctionnement de l’outil d’épuration pour réduire la quantité de boue produite et ainsi améliorer l'impact environnemental et réduire ses coûts.

En partenariat avec Cogesal-Miko, nous avons proposé le procédé BioControl™ et

[Photo : Bassin de contrôle de la croissance bactérienne.]

L’optimisation du traitement et de la filière boue pour une période de 5 ans permettant de réduire le volume des boues à évacuer et d’autre part d’augmenter la capacité de traitement de l’installation

Mise en place du procédé BioControl™

En juillet 2003, le procédé BioControl™ a été démarré après une période de 6 mois de construction. La mise en place consistait en l’addition d’un bassin, d’aérateurs et de pompes au procédé existant, tel que démontré dans la figure 2. Le procédé convenait aux demandes de Cogesal-Miko puisqu’il requiert peu de capitaux, un encombrement faible et est très simple à mettre en œuvre.

Le principe consiste à introduire un déséquilibre physiologique des processus biologiques qui limite les réactions de déshydrogénation (fixation d’hydrogène sur un transporteur) et vise ainsi à empêcher le stockage d’énergie sous forme ATP, principalement responsable de la croissance bactérienne. Ce déséquilibre est obtenu grâce à des alternances entre zones d’anoxie, d’anaérobie et d’aérobie.

La réduction de la quantité de biomasse produite dépend de la composition des effluents et des normes de rejet.

Dans le cas présent, les caractéristiques de l’effluent et des normes ont permis une réduction de la production de boues de 50 % tel que démontré en figure 4.

[Photo : Figure 4 : Évolution des volumes mensuels de boues en excès.]

Après 5 mois d’exploitation, le bilan demeure très positif puisque outre la diminution des volumes de boues en excès, le procédé a permis une réduction des coûts opérationnels de l’ordre de 35 % et une augmentation de la capacité de traitement de la DBO₅.

Cette étude de cas démontre qu’il est possible de largement réduire la production de boues in situ lors du traitement des effluents. Il convient, par contre, de tabler sur un maximum de réduction de l’ordre de 80 % avec ce type de procédé.

Le traitement des boues et leur évacuation

Comme mentionné précédemment, après avoir réduit au maximum la quantité de boue en excès, il convient de penser aux procédés de traitements de boues et d’exutoires adaptés. Le choix de l’une ou l’autre technologie de traitement doit se faire en adéquation avec la sélection d’exutoires. Par exemple, la mise en cimenterie ne demandera pas le même traitement que l’oxydation par voie humide, etc. Dans tous les cas, il convient de savoir jusqu’où pousser la déshydratation et de déterminer la forme de boue finale désirée.

Le choix de traitement des boues doit donc passer par une étude approfondie des besoins et contraintes qui permettront de déterminer un optimum technico-économique parmi un vaste choix de technologies tels que la centrifugation, le séchage thermique ou solaire, la pelletisation…

[Photo : Figure 5 : Le choix de traitement des boues doit passer par une étude des besoins et contraintes et être en adéquation avec le choix de filière d’évacuation.]

Les exutoires aussi sont nombreux : mise en décharge, compostage, incinération, valorisation en cimenterie, OVH… et nécessitent une étude approfondie. Dans la majorité des cas, les facteurs qui influenceront la décision concernent le type de boue, la réglementation, le coût, la sécurité, la pérennité et la flexibilité de la filière d’évacuation. L’approche multi-filières est de plus en plus prônée aujourd’hui puisqu’elle permet d’optimiser les coûts tout en offrant une sécurité et une flexibilité supplémentaire. Encore une fois, une analyse concrète des besoins et contraintes permettront de définir la ou les filières les plus adaptées.

Conclusion

Le procédé BioControl™ s’inscrit dans la problématique globale des boues et du traitement des effluents. Il permet de réduire la quantité de boues en excès et donc de résoudre à faible coût une partie des problèmes causés par l’évacuation des boues de stations d’épuration. Cette technologie est au centre de l’approche globale d’optimisation de la filière boues que les industriels doivent avoir pour arriver à une solution pérenne rencontrant les contraintes technico-économiques et environnementales propres à chaque site.

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