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Traiter les boues pour mieux s'en séparer

30 decembre 2003 Paru dans le N°267 à la page 33 ( mots)
Rédigé par : Marie-odile MIZIER

Les boues sont un véritable casse-tête pour les exploitants de station d'épuration. Qu'en faire ? Plusieurs voies se dessinent aujourd'hui : l'incinération, la valorisation agricole voire la mise en décharge. Pour choisir la meilleure solution, l'exploitant doit tenir compte du volume et de la qualité des boues produites

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Chaque Français consomme en moyenne 200 litres d’eau par jour. Cette eau, une fois utilisée, est rejetée dans l’égout puis traitée par la station d’épuration. Ce traitement génère en moyenne 5 litres de boues brutes comprenant elles-mêmes 15 grammes de matière sèche. Sur la totalité du territoire, ce sont 900 000 tonnes de matière sèche de boues qui ont été produites en 2001. Ainsi, 4,5 millions de tonnes de boues brutes sont à traiter lorsqu’on y réintègre l’eau. Compte tenu de l’augmentation du nombre des stations et de l’amélioration de la qualité des traitements nécessaires pour respecter la directive européenne de 1991, relative aux eaux usées urbaines, le volume de boues devrait continuer à croître dans les prochaines années.

Les boues sont constituées à 95 % d’eau ; leur fraction de matières sèches contient entre 65 et 70 % de matières organiques, le reste étant des matières minérales, ce qui leur confère un pouvoir calorique important, de l’ordre de 3 000 à 4 000 kW par tonne de matières sèches.

[Photo : VOMM propose la Turbo Technologie basée sur la création, dans le sécheur, d'une couche mince et extrêmement turbulente du produit. Elle permet à un produit de siccité de 22 % ou moins de ressortir à 25, 60, voire 90 % en un seul passage et sans aucune recirculation ni aucun mélange amont ou aval avec de la boue déjà séchée ou humide.]

être valorisées en agriculture par l'intermédiaire d'un plan d'épandage, voire incinérées.

Actuellement, trois filières d'évacuation

Actuellement, il existe trois filières principales pour évacuer les boues :

- La valorisation agricole, avec toutes les modalités techniques d'application ; les boues peuvent être hygiénisées, séchées ou compostées ; toutes les techniques de valorisation des boues ont un coût qu'il convient de prendre en compte dans l'évaluation comparée des différentes filières.

- L'incinération qui peut être faite en association avec d'autres déchets (c'est la co-incinération) ou qui peut être faite seule. Pour rendre la filière moins coûteuse, il est important de réduire le volume d'eau.

- Le stockage et la décharge : une voie normalement réservée aux déchets ultimes.

En 2001, 60 % de ses boues sont épandues sur des terres agricoles, 17 % sont incinérées seules ou co-incinérées avec des ordures ménagères, 20 % sont enfouies en décharge et 3 % en filières alternatives. Chacune de ces filières présente des avantages et des inconvénients. Il est donc nécessaire de prendre en compte l'ensemble des paramètres sanitaires, environnementaux et économiques, ainsi que la composition de la boue pour choisir sa filière.

Quelle que soit la solution retenue, le coût de la gestion des boues se répercute directement sur le prix de l'eau. Le choix de la filière de gestion est donc une contrainte économique qu'il faut prendre en compte.

[Photo : Sécheur BIOCON, station de Randers, Danemark.]
[Encart : La réglementation Le décret réglementaire du 8 décembre 1997 fixe les conditions d'épandage des boues issues du traitement des eaux usées sur les sols agricoles ou forestiers. L’arrêté du 8 janvier 1998 précise, quant à lui, les prescriptions techniques applicables à l'épandage en agriculture. Les principales dispositions sont les suivantes : • Les boues ont un caractère de déchet et doivent être traitées en conséquence. • La filière boue est réglementée et contrôlée par l'État (art. 9 du décret). • Les boues doivent être stabilisées et hygiénisées (art. 7 du décret). • La traçabilité des opérations doit être assurée (art. 9 du décret). • Le stockage ne doit pas engendrer de pollution ni de nuisance (art. 5 de l’arrêté).]

pour limiter l'augmentation. Ces coûts doivent être pris dans leur globalité en tenant compte, non seulement des traitements amont à mettre en œuvre pour conditionner le déchet en vue de son épandage, de son incinération ou de sa mise en décharge, mais aussi des coûts de contrôle éventuel, de transport.

Alors, que faire des boues en fin de traitement, comment s'en séparer le mieux possible en tenant compte à la fois des enjeux économiques et environnementaux ? Ce problème a été abordé à la conférence de citoyens organisée par le ministère de l'Écologie et du Développement Durable en novembre 2003 sur « le devenir des boues domestiques issues des stations d'épuration ». Ces journées, qui visaient à prendre en compte l'avis du citoyen, apportent un certain nombre d'éclairages sur la question. Notamment : « Dans l'état actuel des connaissances, on ne peut privilégier un mode d'évacuation plutôt qu'un autre. Les situations locales doivent être prises en compte avant tout. Toutefois à long terme, il convient de développer un épandage hygiénisé en intégrant les techniques de séchage, de chaulage ou de compostage quand cela est possible afin de faire des boues d'épandage les plus fertilisantes et les plus efficaces et acceptables possibles, tout en privilégiant pour les grandes agglomérations le recours à l'incinération ».

Cependant, avant d'envisager la filière de séparation, il est indispensable de réduire le volume des boues afin de résoudre les problèmes de stockage et de transport pour réduire les coûts. L'objectif est de rendre la boue pâteuse en augmentant sa siccité.

Déshydrater les boues

Pour Philippe Durieux de la société VOMM : « Il est intéressant de sécher les boues à 65 % pour une co-incinération avec les»

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Thermolyse et oxydation par voie humide

L’oxydation voie humide (OVH) est également et régulièrement proposée par OTV et Degrémont. Il s'agit d'une oxydation à une température de l'ordre de 250 °C et sous une pression comprise entre 50 et 100 bar. Avec un temps de séjour des boues dans le réacteur de moins d'une heure, l'OVH assure une oxydation de la matière organique sans générer de polluants. Elle transforme la boue en un résidu solide inerte qui peut être valorisé en génie des matériaux ou stocké en CET sans nuisance. Chez Veolia Water Systems, ce procédé, commercialisé sous le nom d’ATHOS®, est exploité industriellement depuis 5 ans sur la station de Toulouse. Le Sympesa (Syndicat Mixte du Pôle Environnement Sud Aquitain) soutient deux entreprises régionales HOO et Citba qui travaillent à son développement.

La thermolyse est la technique retenue par Sterau, la filiale ingénierie travaux du groupe Saur. Son principe repose sur la transformation de la matière organique en un résidu solide et en un gaz combustible. Cette opération est réalisée à une température de 600 °C en l'absence d’oxygène. Après ce traitement, le volume des boues est ainsi réduit au minimum par 40. Contrairement à l'incinération et à la gazéification, la thermolyse optimise la consommation d’énergie car elle produit un gaz qui est à son tour réutilisable pour le traitement d'autres boues. De plus, elle ne génère pas d'oxydation de la matière. Cette dernière est décomposée, limitant notablement l'émission de fumée et d'éléments volatils nocifs. Les polluants comme les métaux lourds lorsqu'ils sont présents sont captés puis stabilisés. Ils peuvent alors être mis en centre de stockage sans nuisance pour l’environnement.

… ordures ménagères, à 85 % pour une mise en centre d’enfouissement technique (CET), à 90 % pour un épandage agricole et pour une valorisation énergétique en cimenterie ou mélangée avec du charbon ». Cette déshydratation peut être réalisée par les procédés de séchage thermiques ou mécaniques.

[Photo : Héliantis, développée par l’Allemand IST et commercialisée par Degrémont, ce procédé de séchage solaire des boues d’épuration consiste à transformer tout type de boue déshydratée ayant une siccité de 15 % en un produit final sec de siccité ajustable entre 45 et 80 %]

Diverses techniques sont proposées par les constructeurs. VOMM, par exemple, propose la Turbo Technologie basée sur la création, dans le sécheur, d’une couche mince et extrêmement turbulente du produit. Elle permet à un produit de siccité de 22 % ou moins de ressortir à 25, 60, voire 90 % en un seul passage et sans aucune recirculation ni aucun mélange amont ou aval avec de la boue déjà séchée ou humide. Tema Équipements commercialise une essoreuse à glissement appelée Turbo-Cascade. Il s’agit de faire glisser individuellement les particules solides au-dessus du tamis cascade pour obtenir un meilleur essorage. Avec Girapac, Andritz Guinard combine tamisage et vis de compactage. Veolia Water Systems propose un sécheur à bande BIOCON. Il sèche la boue à basse température en toute sécurité en évitant la formation de poussières souvent à l'origine des incidents observés sur les sécheurs.

Certains équipements de déshydratation mécanique sont couplés au séchage thermique, ce qui limite les manutentions et hygiénise la boue.

Coupler déshydratation et séchage

De nombreuses solutions de déshydratation-séchage sont proposées par les équipementiers pour préparer les boues. Veolia Water Systems propose le système JVAP™ qui déshydrate la boue sur un filtre presse à…

[Photo : La Turbo Technologie de VOMM permet à un produit de siccité de 22 % ou moins de ressortir à 25, 60, voire 90 % en un seul passage et sans aucune recirculation ni aucun mélange amont ou aval avec de la boue déjà séchée ou humide]
[Photo : Procédé SOLIA, serre de Forbach]

membrane et sèche ensuite le gâteau formé par une circulation d'eau à 80 °C. Cet équipement travaille sous vide. Ceci permet d'assurer l'évaporation de l'eau à basse température et d'atteindre une siccité de 30 à 90 % en fonction du temps de séchage. Cette opération assure l'hygiénisation de la boue. Cette technologie de séchage sur filtre-presse est aussi commercialisée par NTE avec Rollfit. La station de traitement des eaux de Limoges (Haute-Vienne) a été inaugurée en juin 2000. D'une capacité de 235 000 EqH, elle a retenu la filière du séchage thermique-épandage ou co-incinération avec les ordures ménagères issues des technologies Degrémont. Pour sécher ses boues, elle met en œuvre le procédé Centridy. Il permet, à partir de boues liquides, d’effectuer de façon combinée la déshydratation mécanique par centrifugation intensive (technologie Centri-press). La boue déshydratée est alors éclatée en petites particules aptes à un séchage rapide. Cette déshydratation est complétée par un séchage thermique à air chaud combiné. Un courant de gaz chaud turbulent entraîne les particules de boues et assure le séchage en quelques secondes ; le produit obtenu a une concentration de 60 à 70 % de matières sèches. Les boues sont prêtes pour rejoindre une des filières finales.

Mais ce sont les technologies douces qui progressent le plus aujourd’hui. Peu gourmandes en énergie, elles permettent d’obtenir un produit pelletable et suffisamment concentré pour pouvoir rejoindre l'une des filières.

L’arrivée des technologies douces

Présenté en 2002, Héliantis, développé par l'Allemand IST, est commercialisé par Degrémont. Ce procédé de séchage solaire des boues d’épuration consiste à transformer tout type de boue déshydratée ayant une siccité de 15 % en un produit final sec de siccité ajustable entre 45 et 80 %. Les boues produites sont traitées en mode continu sans pré-stockage. Le séchage s’effectue sous serre. Une machine de retournement et de scarification des boues. La machine tournante fait alors avancer la boue vers la sortie de la serre par retournement successif. Pendant son transport, le lit de boue est aéré, scarifié et réchauffé par les rayons du soleil, l'eau qu’il contient est évaporée. Cette technologie consomme peu d’énergie et aucun combustible. Il faut compter entre un et quatre mois pour que la boue passe de 40 à 85 % de matière sèche. Pontarlier a investi dans la technique et construit 2 850 m² de serres pour sécher les boues de sa station d’épuration de 54 000 EqH.

Depuis un an, d’autres procédés sont arrivés sur le marché. Le procédé Solia®, proposé par Veolia Water Systems, utilise l’énergie solaire et l’énergie de fermentation aérobie de la boue pour permettre un séchage quelles que soient les conditions climatiques. AM Eco-Industries, précurseur en France du séchage solaire, commercialise lui aussi des équipements de séchage naturel des boues et propose la plate-forme Ecodryer.

Pour les municipalités entre 20 000 et 100 000 EqH, le traitement par compostage des boues est une solution intéressante mise en œuvre dans plusieurs municipalités. Ce procédé permet de stabiliser et d’hygiéniser de nombreux déchets organiques. Mis en place par Sede pour Artois Compost à Graincourt-lès-Havrincourt (Pas-de-Calais), l’installation s’étend sur 6,4 ha et produit annuellement 50 000 t de compost fabriqué à partir de boues biologiques et de déchets verts provenant de l'agglomération de Lens-Liévin (Pas-de-Calais) et de certaines entreprises industrielles telles Lamy Luti, La Tossée ou Auchelaine.

Pour atteindre son plein épanouissement, la filière a besoin de qualité et de reproductibilité dans la tenue de son process. Pour optimiser celui-ci, des équipements spécifiques permettant une meilleure maîtrise de toutes les étapes du procédé commencent à être commercialisés. Eco Compost d’Aces Envi-

[Photo : Agro Développement, spécialisée dans le recyclage agricole des matières fertilisantes et Lyonnaise des Eaux France, gestionnaire de la station d'épuration de la Communauté d'agglomération du Drouais (CadD) dans l’Eure, ont obtenu de SGS ICS la certification de services Qualicert pour la filière d'épandage agricole des boues.]

ronnement apporte une offre de prestations de service et un choix de procédés pour optimiser et réduire les coûts relatifs à la conception et à l’exploitation des plates-formes de compostage. Ainsi, une dalle aéraulique permet de supprimer les retournements. Et, un système de surveillance des process par l’oxygène sans recalibrage ni dérive et la mesure de la température, de l’humidité et de la pression permet d’optimiser le process.

Un autre procédé alternatif est également proposé aux petites communes avec le séchage des boues sur lits plantés de roseaux. Ce procédé est constitué d’un bassin étanche drainé et passivement aéré dans lequel des Phragmites sont plantés sur un massif de sable et de gravier. Cette installation nécessite peu de maintenance et d’exploitation et permet de stocker les boues pendant cinq à dix ans. Des essais sont actuellement en cours au Siaap sur le site d’Achères (Val d’Oise) (L'Eau, l’Industrie, les Nuisances - n° 263). Une fois la boue sèche, elle peut rejoindre l’épandage agricole ou l’incinération.

[Photo : La station d’épuration de la Communauté d’agglomération du Drouais (CadD) dans l’Eure, a une capacité de 80 000 EqH et produit 7 000 tonnes de boues chaulées par an. Celles-ci sont valorisées en agriculture sur deux campagnes d’épandage réalisées au printemps et en été.]

L'épandage agricole...

Les boues sont riches en matières organiques et en éléments fertilisants comme l’azote ou le phosphore. Elles présentent donc un intérêt certain pour la fertilisation des sols. Les travaux menés dans le cadre d’Agrede (agriculture et épandage de déchets urbains et agroindustriels) attestent de la bonne contribution au bilan environnemental de la filière d’épandage sous forme de boues ou de compost. Les résultats ont été présentés dans le numéro 260 de l’Eau, l’Industrie, les Nuisances. Autre avantage, l’épandage agricole est la filière la moins onéreuse surtout pour les petites collectivités qui représentent la majeure partie des communes françaises. Elle permet une gestion locale du produit. La réglementation mise en place depuis 1997 permet de maîtriser ces risques mais ne peut pas complètement les exclure. D’un point de vue environnemental et sanitaire, de nombreux seuils ont été établis pour garantir l’innocuité des boues épandues et des produits récoltés sur les terres ainsi fertilisées. La réglementation française est en ce sens plus contraignante encore que la réglementation européenne. En respectant la législation, l’épandage agricole est la filière environnementale la moins coûteuse et à moindre risque.

Malgré leurs qualités, les boues domestiques issues des stations d’épuration souffrent d’une image très négative auprès du grand public qui tend à s’opposer à leur épandage. En cause, les nuisances olfactives observées à proximité des sites d’épandage et les risques de contamination des sols par divers polluants toxiques (comme les composés métalliques, parasites et germes pathogènes) contenus dans certaines boues. De plus, ces problèmes peuvent être résolus par la stabilisation et l’hygiénisation des boues pendant la phase de déshydratation-séchage.

Pour garantir la qualité de la filière, les gestionnaires de stations d’épuration commencent à se tourner vers la certification de leur filière. Ainsi, dès 2001, Sede Environnement a obtenu une autorisation provisoire de vente (APV) pour quatre ans pour la fabrication du compost Terra del Carté à Saint Cyprien, en répondant aux trois critères : constance de composition, efficacité agronomique et innocuité pour l’environnement.

Plus récemment (au printemps 2003) Agro Développement, spécialisée dans le recyclage agricole des matières fertilisantes et Lyonnaise des Eaux France, gestionnaire de la station d’épuration de la Communauté d’agglomération du Drouais (CadD) dans l’Eure, ont obtenu de SGS ICS la certifica-

[Encart : Lurgi équipe le site de Lacq À Lacq, dans les Pyrénées-Atlantiques, le SMTB, syndicat mixte de traitement des boues qui réunit une communauté d’agglomération de Pau et des alentours, vient d’investir dans une unité clés en main de traitement thermique des boues de station d’épuration. Le marché attribué à Lurgi porte sur la fourniture de lits fluidisés denses appliqués aux traitements des boues. Implanté sur le site industriel de Lacq, ce complexe permet de traiter les boues issues des stations de traitement des effluents urbains du syndicat, mais aussi celles issues des traitements industriels non toxiques. À terme, les tonnages traités devraient atteindre 30 000 tonnes de boues brutes par an, soit environ 6 000 tonnes de matières sèches, dont un tiers auront une origine industrielle. Malgré cette diversité des origines des boues, aucun appoint énergétique n’est nécessaire, grâce à la récupération et au recyclage de la chaleur de combustion.]
[Photo : Le contrôle régulier des doses épandues par pesée des camions et étalonnage des épandeurs permet une information très précise sur la qualité du produit et la sécurité des conditions de mise en œuvre. Un comité de suivi réunit deux fois par an autour d'Agro Développement, Lyonnaise des Eaux (le producteur de boues), le prestataire du transport et des épandages, la CAdD, les organismes de contrôle (DDAS, Satese, Agence de l'Eau) et les agriculteurs.]

La certification de services Qualicert pour la filière d'épandage agricole des boues.

Elle devient ainsi le quatrième site français à obtenir le référentiel de qualité dans le domaine des boues d'épuration.

La station d'épuration de la CAdD a une capacité de 80 000 EqH et produit 7 000 tonnes de boues chaulées par an. Celles-ci sont valorisées en agriculture sur deux campagnes d'épandage réalisées au printemps et en été. Un stockage de sept mois permet de faire face aux périodes où l'épandage est interdit ou rendu impossible. Au-delà du simple respect de la réglementation, la certification instaure des normes qualitatives et quantitatives sur les boues épandues et les sols récepteurs. Cette démarche engage dans le respect des bonnes pratiques de la fertilisation et de la sécurisation de la filière. La traçabilité est assurée par une gestion des lots identifiés des boues produites et des analyses réalisées suivant un protocole d'échantillonnage respectant le référentiel de la certification.

[Encart : Limiter la production de boue à la source Le principe consiste à agir sur le procédé de traitement de l’effluent pour qu'il produise moins de boue. Aujourd'hui, tous les traiteurs d'eau travaillent sur la question. Degrémont a par exemple développé un procédé de réduction des boues intégré au cœur même du système. Installé au niveau du bassin biologique, ce procédé peu encombrant agit sur la production de boues. Baptisé Biolysis, il permet de réduire de 30 à 80 % la production des boues. Biolysis se décline en deux procédés : Biolysis O® qui stresse les bactéries à l'aide d'une oxydation chimique à l'ozone et Biolysis® E qui utilise des bactéries présentes dans le milieu naturel. Elles s'activent dans le réacteur thermophile et libèrent des enzymes capables de dégrader la boue. De son côté, Saur a développé MycET, une technique nouvelle qui permet de réduire jusqu’à 30 % le volume des boues issues des stations d’épuration. Pour le mettre au point, les chercheurs de Saur utilisent la compétition naturelle qui existe dans la nature entre les différentes espèces que sont les champignons et les bactéries. En isolant certains micro-organismes, des souches mycéliennes présentes en partie dans les boues, il s'opère une réduction naturelle du volume. La matière réduite est totalement oxydée sous forme d'éléments gazeux et d'eau. Elle ne génère aucun résidu et aucune pollution secondaire. Biosep de Veolia Water associe dans un même bassin les performances d'un traitement biologique par boues activées et d’un traitement physique de séparation par membranes immergées. C’est un procédé compact et simple à mettre en œuvre qui ne génère que peu de boues. Développés pour les eaux résiduaires urbaines, ces procédés trouvent aussi des applications dans l’industrie. Veolia Water]

L'épandage des boues liquides n'étant plus une solution pérenne, il devient nécessaire de les déshydrater, voire de les sécher. Ce traitement peut être complété par une stabilisation de la boue, pour limiter les nuisances olfactives.

Pour les boues non conformes ou pour les agglomérations trop importantes, une autre solution peut être mise en œuvre : l'incinération.

Cette technique permet d'offrir une alternative à l'épandage agricole et de résoudre le problème des boues non conformes. Une solution consiste à injecter les boues humides dans les fours d'incinération d'ordures ménagères, mais la quantité traitée est faible. Une autre solution repose sur une étape de déshydratation mécanique pour porter la siccité d'environ 25 % jusqu'à 32 à 40 %, voire plus, de façon à augmenter le PCI pour dépenser moins d'énergie pour l'incinération. Les boues peuvent alors être incinérées seules ou co-incinérées avec les ordures ménagères. La siccité à obtenir dépend de la technologie du four et de la température du gaz comburant utilisé.

Un autre choix est ici possible avec un séchage en ligne en entrée d'incinérateur en utilisant l'incinération sur lit fluidisé. Plusieurs techniques sont actuellement disponibles chez FMI Process (avec Sun Sand),

[Photo : Four PYROFLUID à la station de Colombes.]
[Photo : Le procédé Sun Sand BR de FMI Process : permet comme tous les procédés à lit fluidisé de réduire les boues de faible siccité (le procédé accepte des boues à partir de 5 % de siccité) à leur fraction minérale inerte. Il s'installe sur le site des stations d’épuration, sans transporter les boues. Ce procédé repose sur deux étapes complémentaires, le séchage et la combustion]

Lurgi (procédés LFD, LFR et LFC), Degrémont (et Niro HTFB), Veolia Water (avec Pyrofluid)...

Prenons l'exemple du procédé Sun Sand BR de FMI Process : il permet comme tous les procédés à lit fluidisé de réduire les boues de faible siccité (le procédé accepte des boues à partir de 5 % de siccité) à leur fraction minérale inerte. « Le procédé BR, monté sur skid, s’installe sur les stations d'épuration sans génie civil, sous 48 heures », explique G. Faure, FMI Process. « Il est adapté pour traiter entre 1 000 et 3 000 tonnes de boues par an. Il vient compléter la gamme existante du Sun Sand TB, adaptée pour traiter de 3 000 à 20 000 tonnes de boues par an à partir de 15 % de siccité. Il s'installe sur le site des stations d’épuration, sans transporter les boues. Notre procédé repose sur deux étapes complémentaires, le séchage et la combustion. »

Un poids prédéfini de boues est introduit dans le mélangeur sécheur en rotation. Une vanne introduit le sable à 850 °C. L'énergie contenue dans le sable transforme l'eau de la boue en vapeur. Le mélange sable plus boues est ensuite transporté dans le silo de régulation pour alimenter le lit fluidisé en continu. La combustion de la matière organique à 850 °C a lieu à cette étape. En brûlant, les matières organiques fournissent un apport énergétique au sable. La matière minérale résiduelle est entraînée par les gaz de combustion. Ces fumées sont refroidies puis traitées de façon à récupérer, d'une part l'énergie des gaz de combustion pour réchauffer l'air de fluidisation, d'autre part la fraction minérale. Une telle installation équipe la station d'épuration de Romans-sur-Isère (Drôme – 90 000 EqH) ou encore celle de Saint-Chamond (Loire) – 70 000 EqH – et traite 8 000 tonnes de boues brutes par an.

Veolia Water Systems propose depuis plus de 30 ans son four PYROFLUID® pour l'incinération des boues. Ce traitement permet la combustion totale des boues en quelques secondes dans un four porté à haute température. Associé avec une unité de traitement des fumées, ce procédé garantit un rejet exempt de dioxines et de furannes conformes aux normes les plus sévères. Il permet également d'assurer une valorisation énergétique de la matière organique de la boue ainsi qu'une valorisation matière des cendres. Généralement réservée aux grandes villes, la technique de l'incinération devient accessible à tous par la commercialisation du concept BIOCON de Veolia Water Systems qui couple le séchage avec une unité d’incinération des boues séchées qui fournit ainsi l'énergie nécessaire au séchage.

À Valence, la nouvelle station de Mauboule (Drôme) a opté pour une incinération directe de ses boues sur le site à l’aide de la technologie Niro HTFB de Degrémont. Dédié à l'incinération des boues, ce four réalise la combustion de la matière organique dans une enceinte verticale en acier garni de réfractaire de section pratiquement cylindrique. Son cœur est constitué de sable fluidisé par l’air de combustion et porté à haute température.

Le mélange intensif et rapide entre l’air, le sable et la boue dans le lit fluidisé conduit à une incinération quasi-immédiate et homogène sans résidus dans le lit. « Le taux d’imbrûlés est inférieur à 3 % dans les cendres et une teneur en oxygène supérieure à 6 % en volume sur les gaz secs », souligne-t-on chez Degrémont.

[Encart : Optimiser la déshydratation des boues Pour réduire les coûts, l'exploitant a toujours intérêt à concentrer au mieux la matière sèche pour ne pas payer pour l'évacuation de l'eau restant dans la boue. Il doit donc compléter ses traitements pour obtenir un produit plus concentré. Traditionnellement, ce sont les systèmes de déshydratation mécanique par filtre-presse, table vibrante, table d’égouttage... qui agissent sur la boue préalablement conditionnée en fin de filière. EMO, Tefsa, Andritz-Guinard, NTE, Faure Équipements ou ATR Créations proposent par exemple une vaste gamme de filtres-presses, filtres à bandes et autres matériels d’épaississement. Pieralisi, Tefsa, Alfa-Laval ou Andritz Guinard proposent également des décanteurs centrifuges. Enfin, une meilleure déshydratation peut être obtenue à l'aide d’additifs tels qu’Aquatal de Luzenac : sa nature hydrophobique accélère la séparation solide/liquide pendant l’égouttage et favorise l'extraction de l'eau libre pendant le pressage. L'amélioration de la floculation obtenue supprime les problèmes de fluage, de colmatage et de collage des gâteaux. Un faible dosage en amont de la déshydratation des boues permet d'optimiser le conditionnement des boues en vue d’augmenter le flux sur machine et la siccité finale des boues. Ce gain permet alors de réduire le volume et la masse de la boue humide à évacuer. Pour pousser plus loin la concentration de matières sèches, l'exploitant doit mettre en œuvre des procédés de séchage.]
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