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Traiter les ressources en eau par les UV

28 novembre 2003 Paru dans le N°266 à la page 109 ( mots)
Rédigé par : Christian WILLIAMSON et Adam FESTGER

On constate une prise de conscience générale de la présence de produits chimiques dans les ressources mondiales en eau. Des études récentes ont révélé l'existence d'une grande diversité de produits chimiques à de très faibles concentrations dans les rivières, les fleuves, les lacs, et les nappes souterraines partout dans le monde. Parmi ces produits chimiques, on trouve des sous-produits industriels, des pesticides et des produits pharmaceutiques. Beaucoup de ces produits chimiques ont un effet cancérigène et/ou perturbateur du système endocrinien, même à de faibles concentrations. Il n'existe sans doute pas de solution miracle pour aider les opérateurs de stations de traitement d'eau potable à combattre ce problème. Une technologie, le rayonnement ultraviolet (UV), commence à trouver des applications en tant que barrière à ce type de micropolluants. La PWN Water Supply Company (Pays-Bas) ainsi que Orange County Water District (Californie, États-Unis) ont tous les deux choisi pour leurs installations le traitement par UV pour la désinfection et comme barrière aux contaminants chimiques sur une grande échelle.

UV a démontré sa capacité à désinfecter de façon efficace, et à éliminer parmi d'autres les pathogènes Cryptosporidium et Giardia. La même technologie, appliquée seule ou avec un oxydant tel que le peroxyde d'hydrogène, est aussi une technique de traitement efficace contre un grand nombre de contaminants chimiques. Parmi ces contaminants on peut citer le N-nitrosodiméthylamine (NDMA), 1,4-dioxane, les produits pharmaceutiques, les produits d'hygiène et de beauté, les solvants industriels (tels que le trichloroéthylène) et des additifs aux carburants comme l'éther méthyltertiobutyle.

L'étendue de la contamination de l'environnement

Beaucoup d'études ont mis en évidence la présence de contaminants dans l'eau. Lors d'une récente étude sur les cours d'eau aux États-Unis, le service géologique des États-Unis (USGS) a testé des eaux à la recherche de plusieurs contaminants dans l'environnement. Dans les bassins hydrographiques vulnérables, à l’aval de zones urbaines ou d'installations d'élevage d'animaux, un ou plusieurs de ces contaminants ont été détectés dans 80 % des échantillons prélevés. À titre d'exemple, parmi les contaminants détectés on peut citer : le stéroïde coprostérol, l'insectifuge N, N-diéthyl-3-méthylbenzamide, et la caféine.

Un autre exemple de la présence d'un type de contaminant dans l'environnement est fourni par les études menées également aux États-Unis pour déterminer l'ampleur de la migration de pesticides dans les cours d'eau, les lacs et les nappes phréatiques. Par exemple, le Programme national d'évaluation de la qualité des eaux, coordonné par l'USGS, a depuis 1989 recueilli des données sur les concentrations de pesticides dans les cours d'eau américains. Une partie de cette observation, effectuée entre 1992 et 1996, a concerné la recherche de 76 pesticides dans

[Photo : L’UVphox de TROJAN à Alamitos Barrier Recycled Water Facility de Long Beach, Californie, USA traitant le NDMA de façon économique pendant la désinfection.]

Plus de 8 000 échantillons prélevés dans les cours d'eau, rivières et nappes phréatiques dans 20 grands bassins hydrographiques aux États-Unis. Les résultats de cette étude montrent qu'un pesticide au moins a été détecté dans 95 % des échantillons prélevés dans des cours d'eau et des rivières et dans 50 % des échantillons d'eau souterraine. Les pesticides les plus fréquemment découverts étaient les herbicides atrazine et métolachlore (les deux pesticides les plus utilisés aux États-Unis), suivis de près par la cyanazine et l'alachlor.

En France, des études similaires ont été menées. Dans une étude conduite par l'Institut français de l'environnement (IFEN), des pesticides ont été détectés dans 90 % des échantillons d'eau de surface analysés et dans 58 % des échantillons d'eau souterraine. Parmi les pesticides les plus fréquemment détectés, on a trouvé des désherbants de la famille des triazines (tels que l'atrazine) et d'autres tels que le dinoseb et le lindane.

La recherche continue à démontrer à quel point les contaminants de l'environnement se sont infiltrés dans l'ensemble de nos ressources. Les fournisseurs d'eau doivent rester vigilants afin de protéger les consommateurs des effets éventuels sur la santé.

Comment fonctionnent les UV ?

La lumière UV peut agir comme une barrière contre les contaminants dans l'eau. Les actions photochimiques qui décomposent les contaminants chimiques sont la photolyse UV et l’oxydation UV. Elles agissent de la manière suivante.

La photolyse UV est le processus par lequel les liaisons chimiques des contaminants sont détruites par l'énergie de la lumière UV.

Lorsque la lumière frappe un objet, les photons peuvent être réfléchis, transmis ou absorbés. Lorsque des photons UV rentrent dans un élément (l'eau, par exemple), ils sont à la fois transmis et absorbés par le milieu et ses composants (espèces dissoutes comprenant des substances organiques et inorganiques). Les photons qui sont absorbés peuvent provoquer une réaction photolytique. Une molécule contaminante va être soumise à une réaction photolytique si les molécules contaminantes dans l'eau ont la capacité d'absorber les photons UV (mesurée par le coefficient d'absorption molaire du contaminant) et si l'énergie qui maintient les liaisons chimiques dans la molécule est moins élevée que l'énergie des photons UV absorbés. La photolyse UV ne nécessite pas l'adjonction de peroxyde d'hydrogène.

L’oxydation UV est une réaction photochimique qui décompose les composants organiques dans l'eau par un processus d'oxydation. En termes généraux, « l'oxydation » fait référence à la perte d'électrons par une molécule impliquée dans une réaction chimique. En chimie organique, la plupart des oxydations s'accompagnent d'une augmentation de l'oxygène et/ou d'une perte d'hydrogène et de celle d'un ou deux électrons associés. La réaction oxydation UV est initiée par la photolyse UV du peroxyde d'hydrogène (ou d'un autre agent oxydant). Lorsque les photons UV sont absorbés par le peroxyde d'hydrogène dissous dans l'eau, des radicaux hydroxyles sont formés. Les radicaux hydroxyles sont des agents chimiques hautement réactifs qui attaquent la molécule contaminante. Après le fluor (gaz toxique, corrosif et nauséabond), le radical hydroxyle est l'un des agents connus les plus réactifs.

Certains produits chimiques sont traités de préférence par le procédé de photolyse ; pour d'autres, on préférera l'oxydation UV. Dans la plupart des cas, la photolyse UV et l'oxydation UV agissent simultanément en décomposant les contaminants chimiques. Dans une station de traitement, l'eau qui traverse un réacteur UV optimisé est à la fois désinfectée et traitée contre les produits chimiques organiques. L'UV a donc la capacité d'agir en tant qu'élément multifonctionnel dans un système à multi-barrières. Un tel système peut inclure des étapes de traitement classiques telles que la coagulation et la filtration, et peut également comprendre des traitements plus avancés tels que l'osmose.

[Photo : Le réseau de réacteurs UV traitant le NDMA à l’Agence de l’eau du comté d’Orange.]

inverse (OI), la microfiltration (MF) ou l'ultrafiltration (UF), le tout associé aux UV.

Exemples d’application des UV

La PWN Water Supply Company North-Holland est l'un des leaders dans l'application de la technologie d'oxydation UV en Europe. PWN va installer un système d'oxydation UV “Trojan UVSwift™ ECT” dans son usine à Andijk, aux Pays-Bas. L'installation PWN va fournir jusqu’à 4000 mètres cubes d'eau potable par heure à plus d'un demi-million d'habitants. PWN va prélever l'eau de la Mer IJssel, puis la faire passer à travers un système de traitement comprenant la coagulation, la filtration, et l'oxydation UV (UV avec du peroxyde d'hydrogène). L’UVSwift™ TROJAN ECT sera la première méthode de désinfection et servira comme barrière à des contaminants organiques. « Nous avons étudié de façon approfondie l'utilisation des UV et nous les avons choisis à la fois pour la désinfection et comme barrière aux micropolluants », « Nous trouvons que l'oxydation UV est une méthode de traitement très efficace », précise Joop Kruithof, Chief Scientist chez PWN. Les UV ont été préférés à l'ozone pour leur plus grande capacité de désinfection, leur capacité à détruire les contaminants, et parce qu'ils ne produisent pas de bromate, une substance cancérogène dangereuse qui résulte de la réaction de l'ozone avec le bromure. Une indication de la toxicité du bromate est donnée par l'Integrated Risk Informations System (IRIS), de l’United States Environmental Protection Agency, qui évalue le risque cancérogène à un pour un million pour le bromate à une concentration de 0,05 ppb. L'oxydation UV

[Photo : Un réacteur UV à oxydation traitant 1,4-dioxane.]

sera la pierre angulaire du traitement dans les installations PWN, protégeant ainsi les utilisateurs d'eau des contaminants sans formation de bromate. Quand elle entrera en service en 2004, l'usine sera parmi les plus grandes stations de production d'eau potable à traiter les contaminants chimiques par la technologie UV.

Cette technologie est également appliquée aux États-Unis dans Orange County Water District (OCWD) en Californie du sud. Dans une région connue pour son manque d'eau, l'OCWD met en place un projet pour traiter des millions de gallons d'eaux usées par jour pour augmenter les ressources en eau souterraine au niveau régional. Ce projet, nommé Groundwater Replenishment System (GWRS), est le plus grand de ce type au monde et remplacera à terme l'usine actuelle qui s'appelle Water Factory 21. Après un traitement secondaire, les eaux usées vont subir un traitement avancé comprenant la microfiltration, l'osmose inverse, et l'oxydation UV avec le Trojan UVPhox™. Ces étapes de traitement vont éliminer tous les contaminants

[Photo : Une illustration graphique du procédé d’oxydation par UV. Les photons UV sont absorbés par les molécules d’H2O2. Dissous dans l’eau, les radicaux hydroxyles sont formés (phases 1 à 3 dans l’illustration). Ces derniers sont hautement réactifs et attaquent les contaminants et les brisent en composants simples (phases 4 à 7).]

présents dans l'eau, assurant ainsi un traitement d'excellente qualité. Les étapes de filtration, de microfiltration et d'osmose inverse enlèvent les composés de masse moléculaire élevée, tandis que l'oxydation UV élimine tous les autres composés de moindre masse moléculaire, tels que le NDMA ou le 1,4-dioxane, tout en désinfectant. Le NDMA est à la fois un sous-produit chimique industriel et un sous-produit de la désinfection qui résulte de la réaction entre le chlore ou les chloramines et des composés chimiques naturels souvent présents dans l'eau. Le 1,4-dioxane est un composant de solvants industriels et c'est un polluant organique persistant. Ces deux composés chimiques sont insuffisamment éliminés par la microfiltration et l'osmose inverse. TrojanUV de London Ontario au Canada, a beaucoup travaillé avec l'OCWD afin de proposer une solution d'oxydation UV pour traiter simultanément de tels composés organiques résiduels et désinfecter. Afin de surmonter toutes les objections publiques à l'aboutissement du GWRS, l'OCWD a combiné un système de traitement qui fournira une eau conditionnée d'une qualité largement supérieure aux normes déjà strictes pour l'eau potable en Californie.

Le GWRS va assurer une alimentation en eau à toute épreuve, même en périodes de sécheresse, dans une région de la Californie en pleine croissance.

L'oxydation UV se présente donc comme une technologie puissante, capable de jouer un rôle multifonctions dans un système de traitement de l'eau à multi-barrières. En plus de son rôle dans la désinfection, elle peut s'appliquer à plusieurs endroits dans le réseau de distribution d'eau afin de protéger les consommateurs contre les effets éventuels des contaminants de l'environnement.

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