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Un exemple de travaux d'écrémage poussés sur des produits à hautes viscosités

28 février 2011 Paru dans le N°339 à la page 44 ( mots)
Rédigé par : Hervé MONTACLAIR

Sur l'ancien site d'une usine à gaz, la dépollution des sols impactés par la présence de goudron et de dérivés hydrocarbonés lourds ainsi que la présence sur le toit de la nappe d'une forte épaisseur de produits surnageants (créosote, huiles lourdes, goudrons,?) a nécessité la mise en ?uvre d'un train de technologies de dépollution innovantes. Explications.

Le site, anciennement siège des activités d'une usine à gaz, a été désigné pour accueillir un projet immobilier comprenant 200 logements collectifs, une crèche, une maison de repos ainsi que de bureaux administratifs. Le planning de construction du site a nécessité un phasage adapté des opérations de dépollution pour pouvoir intégrer les contraintes liées aux travaux de réaménagement du site.

Il a été constaté un fort impact des sols et de la nappe par du goudron et des déri-

[Photo : Schéma n° 1 : Schéma d'implantation des ouvrages autour des gazomètres.]

Des hydrocarbures lourds ainsi que la présence d’une forte épaisseur de produits surnageants (créosote, huiles lourdes, goudrons,...) ont été constatés au droit des deux anciens gazomètres.

La présence à proximité du site d'une voie ferrée, de riverains ainsi que d’espaces verts a imposé le respect d’objectifs de réhabilitation sévères ainsi que de contraintes opérationnelles spécifiques (monitoring des émissions en contaminants volatils, monitoring des nuisances olfactives, mesures vibratoires des sols lors des opérations de démolition,...).

Une stratégie de traitement reposant sur une palette de technologies

Pour répondre aux exigences sévères du projet, Biogénie, en charge de la dépollution du site, a mis en place une stratégie de traitement complexe reposant sur une palette de technologies de plus en plus agressives :

  • - Pompage sélectif des dérivés pétroliers lourds surnageants ;
  • - Pompage/rabattement des eaux de la nappe pour canaliser le produit surnageant ;
  • - Chauffage conductif in situ des sols ;
  • - Extraction et traitement des gaz du sol ;
  • - Traitement complémentaire par lessivage par tensioactif des sols contaminés ;
  • - Traitement de finition par oxydation chimique in situ.

Par ailleurs, les estimations préalables aux travaux ont mis en évidence un volume de produit à récupérer d’environ 100 m³, principalement situé sous les fondations des anciens gazomètres. Pour accéder aux zones directement contaminées par les goudrons, une quarantaine d’ouvrages ont été forés à 6 mètres de profondeur et disposés tout autour des deux gazomètres. Dix autres ouvrages ont été implantés au centre des gazomètres. Le schéma n° 1 reprend l’implantation des ouvrages sur le site.

Un dispositif d’écrémage simple...

Du fait de la forte épaisseur de produit flottant présent sur le toit de la nappe souterraine (> 1,8 m), le traitement de la nappe souterraine du site a débuté par la mise en place d’un dispositif d’écrémage simple. Pour cela, 30 pompes pneumatiques avec système suiveur ont été mises en opération durant une période de 10 mois. Les pompes employées, de technologie extrêmement robuste, ont été conçues spécifiquement afin de pouvoir opérer sur des produits à haute viscosité (créosote, huiles lourdes, goudrons,...). Durant les trois premiers mois d’écrémage, l’efficacité de récupération a été maximale, avec des volumes journaliers de produit atteignant les 600 litres/jour. Au-delà de trois mois, la récupération de produit s’est trouvée amoindrie (avec un taux de récupération tombant sous 80 litres/jour).

...complété par un système de rabattement de la nappe

Compte tenu de la baisse des taux de récupération, il a été nécessaire d’améliorer le traitement afin de remobiliser les produits imprégnant les sols de façon plus tenace. Pour cela, un système de rabattement de la nappe par pompage a été ajouté au système d’écrémage initial. Ce procédé consiste à accumuler gravitairement les produits surnageants en une zone spécifique par abaissement localisé du niveau de la nappe (via une pompe de rabattement) et à récupérer les produits accumulés au moyen de pompes écrémeuses.

Le rabattement de la nappe a été mis en œuvre durant plus de quatre mois en parallèle des opérations d’écrémage. L'emploi de cette technique a permis de remobiliser un volume complémentaire de 40 m³ de flottant sur trois mois, avec une quantité moyenne passant de 40 litres/jour à approximativement 430 litres/jour.

Durant la phase de pompage et rabattement, un total de 352 m³ d’eau a été pompé et traité. Les analyses menées sur les eaux ont mis en évidence des concentrations en HCT, HAP et BTEX comprises entre 20 et 25 mg/l. Les eaux de pompage ont été traitées par passage au travers d’un séparateur d’hydrocarbures, suivi par un traitement de finition sur deux filtres à charbon actif. Les eaux traitées, respectant les seuils de rejet imposés, ont été réinjectées.

[Photo : Il a été constaté un fort impact des sols et de la nappe par du goudron et des dérivés hydrocarbonés lourds.]
[Schéma : Influence de la montée en température dans les ouvrages sur le taux de récupération de goudron.]

partie afin de lessiver quelques horizons d'accumulations préférentiels et augmenter les gradients vers les ouvrages d’écrémage ou envoyées vers le réseau d’eaux usées du site.

Lorsqu’il a été constaté une baisse des taux de récupération des produits flottants (après trois mois de traitement), il a été décidé de compléter le dispositif de traitement, par l'ajout d’une unité de chauffage conductif in situ des sols.

L’ajout d’une unité de chauffage conductif in situ des sols

Le procédé de chauffage conductif in situ (In Situ Conductive Heating – ISCH) a été mis en œuvre dans le but d’augmenter la température des sols, de réduire la viscosité des produits, d’augmenter leur disponibilité et d’améliorer le taux de récupération du dispositif. La chaleur a été apportée aux sols par immersion en zone saturée d’appareils résistifs spécifiques dans des ouvrages préférentiels.

Le chauffage des sols mis en œuvre durant quatre semaines a été réalisé en parallèle de l’écrémage et du rabattement de la nappe afin de garantir la récupération des produits mobilisés. Le schéma n° 2 lie l'augmentation des températures dans les ouvrages avec l’augmentation du taux de récupération par ouvrage. Celui-ci met en évidence que l’augmentation de la température dans les sols a eu un impact significatif sur les taux de récupération par ouvrage.

En complément du chauffage des sols, un dispositif d’extraction des vapeurs du sol a été installé pour prévenir toute nuisance olfactive générée par la montée en température des produits hydrocarburés.

Cinq ouvrages ont été équipés pour aspirer les gaz du sol et déplacés à la faveur des zones présentant le plus de risque de générer des nuisances. Après un mois de fonctionnement de l'installation d’ISCH, le taux de récupération de flottant s’est de nouveau stabilisé malgré les optimisations constantes apportées par les techniciens de Biogénie. Il a alors été décidé de mettre en place un procédé complémentaire de lessivage par tensioactif des sols.

Un procédé complémentaire de lessivage par tensioactif des sols

L’objectif de cette technologie est d’abaisser la tension interfaciale huile/sol et donc de favoriser la mobilisation des produits fortement adsorbés aux sols. De manière concomitante, cette technologie a également pour effet d’abaisser la tension interfaciale eau/huile et donc d'augmenter par voie de conséquence la teneur en contaminants dissous dans les eaux. Préalablement à la mise en œuvre de cette technique, des tests en laboratoire ont été menés afin de définir la solution de tensioactif la plus appropriée aux sols en place, à la contamination, et aux objectifs du projet. Le tensioactif retenu a été le QDS 5, un composé anionique et biodégradable.

En premier lieu, le niveau de la nappe au droit des deux gazomètres a été abaissé afin de s’assurer que la solution de tensioactif affecterait le maximum de sols contaminés. Un total de 2 000 litres de solution concentrée de tensioactif a été injecté dans les sols sous-jacents aux gazomètres via les ouvrages de pompage du site. Le schéma n° 3 reprend le principe de fonctionnement du procédé de lessivage des sols.

Parallèlement aux injections de tensioactif, les procédés d’écrémage, rabattement de la nappe, chauffage conductif des sols et extraction des vapeurs du sol ont été maintenus en opération afin de conserver le taux de récupération de produit le plus élevé. Le rabattement par pompage a également joué un rôle important dans la récupération de la solution de tensioactif.

[Schéma : Principe de traitement par lessivage des sols au tensioactif.]

Schéma n° 4 : Enchaînement des différentes phases de traitement sur le site.

Le lessivage des sols par tensioactif a permis de rehausser le taux de récupération de produit de goudron de 66 litres/jour à 1 085 litres/jour.

Des analyses laboratoire sur des échantillons d’eau prélevées dans cinq puits ont été réalisées tout au long des opérations d’injection de tensioactif.

Les analyses ont mis en évidence que les injections de surfactant ont permis d’augmenter les concentrations en HCT et BTEX dissous (les concentrations en HAP restant sensiblement identiques) d’un facteur 20 à 30 et donc de peaufiner le traitement mis en œuvre. Après environ un mois de lessivage, les analyses d’eau ont pu mettre en évidence une diminution globale des concentrations en HCT, HAP et BTEX. Après un mois d’opérations et de régulières optimisations du traitement, le taux de récupération de flottant s’est stabilisé autour d'une valeur nulle, montrant qu'il devenait impossible de récupérer davantage de produit depuis le sous-sol avec cette technologie. Il fut alors décidé d’entamer l'ultime phase de traitement par oxydation chimique in situ.

Ultime phase de traitement :l’oxydation chimique in situ

La dernière phase de traitement a consisté à mettre en œuvre un traitement par oxydation chimique in situ. Afin de traiter les derniers polluants dissous récalcitrants, 6,5 tonnes de solution de permanganate/persulfate ont été injectées dans les eaux de la nappe. Simultanément, le système de pompage et de recirculation des eaux de pompage a été mis en place afin de permettre une mise en contact optimale de l’oxydant dans les eaux de la nappe. Douze jours après la fin de la phase d’injection, des analyses de validation ont été menées dans trois ouvrages représentatifs de la zone traitée.

Les résultats ont mis en évidence les abattements suivants :

Contamination Concentration avant oxydation Concentration après oxydation Taux d’abattement
HCT 24 mg/L 4,96 mg/L 78 %
HAP 22,6 mg/L 1,9 mg/L 92 %
BTEX 24,6 mg/L 7,4 mg/L 70 %

Les mesures de flottant réalisées sur les ouvrages du site à l’achèvement des travaux n'ont pas permis de mettre en évidence de phase flottante dans les ouvrages avoisinant les gazomètres.

Sur l'ensemble de l’opération, un volume total de 115 m³ de produit surnageant a été mobilisé et récupéré avec un train de technologies de dépollution innovantes.

La courbe figurant dans le schéma n° 4 permet de synthétiser l’enchaînement des différentes phases de traitement sur site, tout en mettant en relation les volumes de produit récupérés.

[Photo : Schéma n° 4 – Enchaînement des différentes phases de traitement sur le site]
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