Les opérations de collecte sélective en milieu rural sont encore rares en France. Afin de se forger sa propre expérience, le Conseil Général de l'Eure a entrepris, dès 1992, une opération-pilote de collecte sélective multi-matériaux en porte-à-porte sur le canton de Neubourg (24 communes de 10 000 habitants). Il a confié la définition et le suivi de ce projet au bureau d'études Organisation et Environnement. Différents circuits de collecte en milieu rural ont permis de comparer les résultats obtenus.
Les modes traditionnels d’élimination des déchets ne sont plus suffisants pour digérer les quantités de plus en plus importantes de déchets ménagers produits par les Français.
Face à des coûts de traitement et d’élimination de plus en plus élevés, à des centres d’enfouissement saturés et amenés à disparaître, il devient nécessaire d’adopter des solutions de valorisation et de recyclage permettant la réduction du volume de déchets ultimes à éliminer. Parmi les solutions à mettre en place, le tri à la source et la collecte sélective sont un préalable indispensable à une gestion efficace et globale des déchets ménagers. Cependant, en cette matière, le savoir-faire ne repose que sur les résultats de quelques rares expériences menées en France et dont les mises en œuvre trop récentes ne permettent pas d’en généraliser les principes.
Dans le cadre de la réalisation de son schéma départemental d’élimination des déchets ménagers, le Conseil Général de l’Eure a souhaité entreprendre, dès le début de l’année 1992, une opération de collecte sélective, en vraie grandeur sur 24 communes, afin d’apporter la preuve des réalités économiques, techniques et sociales de ce mode d’élimination, testé sur une partie du gisement ménager.
Le SIVOM du Neubourg s’est porté volontaire pour appliquer les dispositions de ce projet de collecte sélective en porte-à-porte ; Organisation et Environnement a été chargé par le Conseil Général de la logistique et du suivi de l’opération.
Les objectifs à atteindre sont de trois sortes :
- Économiques : il s’agit de mesurer les coûts d’une collecte sélective multi-matériaux en porte-à-porte sur un canton comprenant un secteur urbain et rural.
- Techniques : recueillir des éléments chiffrés sur les rendements et les fréquences de la collecte sélective en porte-à-porte.
- Sociaux : il s’agit de tester l’efficacité d’une entreprise d’insertion sur cette activité et d’apprécier les attitudes de la population face à de nouvelles habitudes de tri.
Présentation de l’opération
Le canton du Neubourg a été divisé en quatre secteurs de collecte : un secteur urbain de 3 000 habitants et trois secteurs ruraux couvrant 7 000 habitants, comprenant 24 communes regroupant 10 104 habitants.
La collecte est réalisée une fois par semaine pour la ville du Neubourg et une fois tous les 15 jours dans les secteurs ruraux. Cette collecte sélective multi-matériaux(1) des emballages en porte-à-porte a débuté le 10 février 1992 et se poursuit. Elle porte sur le verre, les papiers-cartons, les bouteilles en plastique (PVC et PET) et les métaux. Chaque foyer a reçu une information préalable et dispose pour le stockage ou la précollecte des matériaux recyclables de sacs en plastique transparent.
La collecte a été confiée à l’association d’insertion professionnelle Halte Atelier d’Évreux. Une vingtaine de tournées sont effectuées par mois pour le ramassage des sacs spécifiques déposés par les habitants devant leur porte. À leur retour, les véhicules sont déchargés et un tri des matériaux recyclables est effectué par sous-gisement.
Le recueil des données permettant le suivi de l’opération s’est effectué pendant les onze premiers mois, du 10 février 1992 au 29 décembre 1992, à l’aide de fiches remplies par le personnel de l’association :
- – fiche de collecte remplie pendant les tournées indiquant le temps passé et les kilomètres parcourus ;
- – fiche de manutention et de tri indiquant le nombre de personnes employées, leur temps de travail et le temps d’utilisation des différentes machines.
(1) Multi-matériaux signifie que l’ensemble de la fraction recyclable est collecté en mélange dans un récipient unique. Ce type d’organisation suppose un tri de second rang pour séparer chaque famille de produit.
Campagne d'information du public
Quinze jours avant le début de l'opération, une lettre du SIVOM a été adressée à chaque foyer et des articles ont été publiés dans la presse. L’opération pilote a également été présentée à la télévision régionale. Cette campagne d'information a permis de préciser le but de l'opération, les modes et les jours de collecte et les consignes de tri.
Pour mobiliser davantage la population, deux relances publicitaires par tracts ont été menées :
- la première, réalisée en mai, a permis d’apporter des précisions sur les consignes de tri,
- la seconde, réalisée en septembre, a permis d’informer les usagers sur les quantités récupérées durant les six premiers mois.
Mise à disposition de sacs
Pour le stockage des matériaux recyclables, le SIVOM a fourni à chaque foyer des sacs en plastique d’une capacité de 48 litres, dont la transparence a pour but d’assurer une parfaite identification de leur contenu.
Sur chacun d’eux sont inscrits : le nom de l’opération, les quatre circuits de collecte, la fréquence de collecte et les jours de collecte pour chaque circuit, les matériaux à trier et les matériaux indésirables.
Les sacs contenant des produits non conformes aux consignes de tri ne sont pas ramassés. Un autocollant apposé sur le sac en indique la raison.
Après le tri, ces sacs sont à leur tour recyclés en sacs poubelles par leur fournisseur.
Les résultats
L’analyse des données concerne 104 collectes.
Les temps de collecte
Il est intéressant de connaître la charge de travail correspondant à la collecte, notamment pour le calcul de la charge financière de ce poste ; elle correspond au nombre d’heures de travail total de tout le personnel participant à l’opération de collecte, la durée représentant le temps réel de la collecte (tableau I).
Les quantités globales collectées et les taux de récupération sont indiqués sur les tableaux II et III.
Le tonnage collecté sur douze mois a été de 428,3 tonnes, ce qui représente un tonnage collecté mensuel de 37,5 tonnes, soit 11 kg par foyer et par mois.
Sur les 428,3 tonnes de déchets récupérés, 368 tonnes sont recyclées (avec 14 % de refus de tri), ce qui représente un peu plus de 11 % des ordures ménagères produites dans l’année. Les papiers-cartons et le verre représentent à eux seuls 70 % en poids des déchets récupérés.
Les taux de récupération pour le verre et le papier-carton peuvent paraître faibles, mais il faut tenir compte de la partie collectée par apport volontaire en conteneurs (90 tonnes/an pour le verre).
Ces deux modes de collecte sont complémentaires ; le tonnage de verre récupéré dans les conteneurs installés sur Le Neubourg n’a pas diminué depuis le début de la collecte.
Quantités collectées en secteurs rural et urbain
Les taux de récupération sont plus faibles en milieu rural (tableau IV). En milieu urbain, la quantité de matières recyclables collectées est supérieure de 25 % :
- d’une part, la fréquence de la collecte peut jouer un rôle non négligeable. En effet, il est plus difficile de stocker pendant quinze jours les déchets que pendant une semaine, et les fréquences de collecte rapprochées provoquent un effet mobilisateur plus important ;
- d’autre part, les modes de vie et de consommation ainsi que les comportements face aux déchets peuvent varier d’un milieu à l’autre et avoir une incidence sur la composition des déchets, ce qui peut par conséquent expliquer cette différence.
Bilan financier
Les dépenses
Elles couvrent : le transport et les trajets « haut-le-pied », la collecte, le tri et le conditionnement, la manutention et la distribution des sacs.
Le coût du tri et du conditionnement est relativement élevé par rapport à la collecte (tableau V) qui représente plus de 40 % du coût total. Le rendement de travail du personnel est peu élevé : 0,85 tonne triée/poste/jour.
Le personnel de l’entreprise est constitué de personnes en période de réinsertion. Le coût du personnel indiqué dans le tableau est calculé sur la base d’un salaire normal (il n’est pas tenu compte des subventions du Conseil général pour la réinsertion).
Le coût de tri et de manutention pourrait être diminué par une meilleure gestion du personnel, notamment en améliorant l’organisation de telle façon à diminuer le coût important lié à la manutention : quatre heures de manutention sont nécessaires pour une tonne de déchets triés (tableau VI).
L’analyse plus détaillée du bilan financier indique un coût à la tonne plus élevé en milieu rural qu’en milieu semi-urbain (tableau VII).
On constate un écart de 23 F/hab/an entre le milieu urbain et le milieu rural, différence qui s’explique par le fait que le trajet de la collecte est plus long en milieu rural et que les quantités collectées sont moins importantes. Au-delà, cela démontre la nécessité de mettre en place la collecte sélective en tenant compte des spécificités de chaque collectivité, en recherchant des principes d’organisation adaptés conduisant à un optimum économique.
Les recettes
Il convient de distinguer les recettes correspondant, d’une part, à la vente des matières, matériels et conditionnés aux filières de récupération et, d’autre part, au soutien d’Eco-Emballages à la prestation de tri.
La revente des matières
Les recettes correspondantes, qui atteignent 23 068 F pour l’année, figurent dans le tableau VIII.
Le soutien financier apporté par Eco-Emballages
Mise en place depuis le 1ᵉʳ janvier 1993, la société Eco-Emballages a pour mission de transformer l’emballage usagé en nouvelle source de matière et d’énergie, et de valoriser 75 % des emballages ménagers usagés en 2002. Elle a pour fonction d’aider les collectivités qui organisent des collectes sélectives en leur assurant à la fois un soutien financier à la prestation de tri (afin d’obtenir des matériaux de qualité) et une garantie de reprise.
Le SIVOM de Neubourg n’ayant pas encore passé de convention avec Eco-Emballages, le bilan financier ci-après constitue un état prévisionnel. Le soutien financier est directement appliqué aux quantités réellement collectées, triées et conditionnées.
Tableau IDurées de la collecte (période du 11 mars au 29 décembre 1992)
| Circuit | Nombre de collectes | Durée moyenne du trajet (h) | Durée de ramassage (h) | Durée moyenne de la collecte (%) | Charge (h) |
|---|---|---|---|---|---|
| 01 Le Neubourg | 48 | 2,26 | 5,20 | 31 % | 7,46 |
| 02 Saint Aubin | 23 | 1,43 | 5,16 | 25 % | 6,59 |
| 03 Willé Marbeuf | 20 | 1,39 | 5,46 | 22 % | 7,28 |
| 04 Vitot Villez | 18 | 1,54 | 6,28 | 23 % | 8,22 |
| Totaux | 104 | 1,90 | 5,36 | 27 % | 7,38 |
Tableau IIProduction moyenne des ordures par secteur de collecte
| Circuit | Population | Ratio moyen (kg/hab/j) | Tonnage annuel (t) |
|---|---|---|---|
| 01 Le Neubourg | 6 639 | 1,84 | 1 381 |
| 02 Saint Aubin | 2 114 | 0,80 | 625 |
| 03 Willé Marbeuf | 1 410 | 0,81 | 417 |
| 04 Vitot Villez | 2 210 | 0,80 | 645 |
| Totaux | 12 373 | 1,41 | 3 068 |
Ratio de collecte sélective : 13 % des OM brutes en poids
Tableau III
Quantités collectées par matière et taux de récupération ramenés sur 12 mois
| Produits | Part en % | kg/hab/an | t/an | Taux de récupération OM brutes en % | Rendement en % |
|---|---|---|---|---|---|
| Papiers-cartons | 33,89 | 14,37 | 145,17 | 4,44 | 13,88 |
| PVC-PET | 6,98 | 2,96 | 29,88 | 0,91 | 70,00 |
| Métaux | 3,60 | 2,25 | 22,72 | 0,70 | 17,50 |
| Verre | 38,55 | 16,35 | 165,15 | 5,05 | 42,10 |
| Sacs recyclables | 1,20 | — | 5,14 | 0,16 | — |
| Refus de tri | 14,07 | 5,30 | 0,28 | 1,85 |
Tableau IV
Quantités collectées par circuits et par matières et taux de récupération ramenés sur 12 mois
| Circuit | Quantités collectées t/an | kg/hab/an | kg/foyer/an | Récupération OM brutes en % |
|---|---|---|---|---|
| 01 Le Neubourg | 210,79 | 57,93 | 166,26 | 15,27 |
| 02 Saint Aubain | 68,36 | 31,93 | 91,63 | 10,93 |
| 03 Iville Marbeuf | 75,24 | 35,59 | 102,15 | 12,19 |
| 04 Vitot Villez | 73,95 | 33,46 | 96,04 | 11,46 |
| total zone rurale | 217,55 | 33,66 | 96,61 | 11,53 |
| Total général | 428,34 | 42,40 | 121,69 | 12,89 |
Tableau V
État financier par poste sur 12 mois
| Postes | Personnel (F) | Matériel (F) | Véhicule (F) | Total (F) | en % |
|---|---|---|---|---|---|
| Collecte / trajet | 33 340 | 0 | 120 204 | 153 544 | 23,5 |
| Collecte / ramassage | 148 866 | 0 | 84 857 | 233 723 | 35,8 |
| Tri et conditionnement | 172 568 | 14 016 | 0 | 186 584 | 28,6 |
| Manutention | 70 493 | 8 371 | 0 | 78 864 | 12,1 |
| Totaux | 425 267 | 22 387 | 205 061 | 652 715 | 100,0 |
Tableau VI
Coûts ramenés à la tonne et à l’habitant
| Postes | Personnel (F/t) | Matériel (F/t) | Véhicule (F/t) | Total (F/t) | en F/hab/an |
|---|---|---|---|---|---|
| Collecte / trajet | 77,83 | 0,00 | 280,63 | 358,46 | 15,20 |
| Collecte / ramassage | 357,84 | 0,00 | 198,11 | 555,43 | 23,13 |
| Tri et conditionnement | 402,88 | 32,72 | 0,00 | 435,60 | 18,47 |
| Manutention | 164,57 | 19,54 | 0,00 | 184,12 | 7,80 |
| Totaux | 992,83 | 52,27 | 478,74 | 1 523,83 | 64,50 |
Tableau VII
Comparaison des coûts unitaires en milieu rural et urbain
| Circuit | Coût (F/hab/an) |
|---|---|
| Le Neubourg | 79 |
| Saint Aubain | 57 |
| Iville Marbeuf | 56 |
| Vitot Villez | 53 |
| Total milieu rural | 56 |
| Total pour le SIVOM du Neubourg | 64,5 |
La collecte sélective doit porter sur les matériaux suivants : verre, plastique - PVC, acier, papier-carton, aluminium.
L'application prochaine du contrat à passer avec Eco-Emballages correspond aux recettes portées sur le tableau IX, s'élevant à 112 502 F.
Les papiers-cartons concernent les matériaux d’emballage. Les quantités soutenues représentent 30 % du gisement de matières collectées.
Le bilan provisoire s’établit comme suit :
- - Dépenses totales : 652 715 F
- - Recettes sur vente : + 23 068 F
- - Soutien financier d’Eco-Emballages : + 112 502 F
- - Coût total : – 517 144 F
Dans les conditions actuelles d’organisation, le coût de la collecte sélective en porte-à-porte sur le SIVOM du Neubourg serait de 1 129 F par tonne, soit 51 F par habitant et par an.
Il convient de rapprocher ce coût à celui annoncé dans le Schéma Départemental sur l'ensemble de la filière de destruction par valorisation énergétique, soit environ 1 100 F la tonne.
Commentaires
La collecte sélective multi-matériaux organisée en porte à porte sur le SIVOM du Neubourg a permis de récupérer et recycler, sur l'année 1992, 368 tonnes de matières premières secondaires et 90 tonnes de verre supplémentaires collectées en apport volontaire, portant à 458 tonnes le gisement de matières recyclées, ce qui représente au total 16,5 % du poids des ordures ménagères.
Au plan financier, les coûts de collecte et de tri sont élevés car ils sont directement liés à la faible productivité du personnel d'insertion sur les étapes de collecte et de tri (rappelons que les coûts de personnel sont l’application de charges salariales classiques aux temps d’exécution réellement mesurés).
D'autre part, les coûts de collecte et de tri sont le reflet d’une organisation « rustique » : locaux et chaîne de tri provisoires, matériel et circuit de collecte non optimisés. Les coûts de collecte et de manutention pourraient facilement diminuer avec un minimum d’investissement. L’économie annuelle correspondante peut être chiffrée comme suit :
- - un camion mieux adapté pour la collecte permettrait d’éviter, sur le circuit du Neubourg, un aller-retour pour le déchargement ; l’économie serait de l'ordre de 65 000 F ; le nombre de suiveurs pourrait être réduit à deux : 20 000 F d'économies ;
- - un local plus grand et un équipement plus performant amélioreraient le rendement du personnel pour le tri (20 %) et la manutention (50 %) ; l'économie réalisée serait de 70 000 à 80 000 F ;
- - soit une économie totale prévisionnelle de : 145 000 F par an.
Le coût résultant à la tonne recyclée s’établirait alors à 812 F, soit 36,8 F par habitant et par an.
Bilan sociologique
Après les six premiers mois de collecte sélective, une enquête en porte à porte a été réalisée auprès de la population pour cerner les taux de participation et l'impact de la collecte sélective sur les habitudes du « jeter » des usagers.
L'objectif initial était de sonder 350 foyers, soit 10 % du total des foyers concernés par l'expérience pilote. Pour des raisons pratiques, seulement 220 foyers ont répondu au questionnaire, soit 7 % des foyers du canton.
Taux de participation à la collecte
La participation des habitants du SIVOM du Neubourg à l’expérience-pilote a été très élevée : près de 90 % des personnes sondées y ont participé et affirment ne pas avoir été gênées par cette contrainte supplémentaire ; plus de 95 % d’entre elles estiment que le tri est un acte simple.
Dans plus de 80 % des cas, les personnes interrogées participent elles-mêmes au tri sélectif dans leur foyer.
Plus de 95 % des personnes interrogées savent préciser les matériaux faisant l'objet du tri (il est à noter que la ferraille n’a été citée que dans 85 % des cas).
Les sacs, mis à la disposition de la population par le SIVOM, sont effectivement utilisés dans plus de 95 % des cas, et 83 % des foyers sont favorables à l'utilisation de ces sacs plastiques.
Tableau VIII
Recettes liées à la revente des matériaux.
| Produits | Quantités collectée en tonnes | Prix de revente en F/t | Recettes en Francs |
|---|---|---|---|
| Papiers - cartons | 145,17 | 110,82* | 16 087 |
| PVC-PET | 29,88 | 337,50* | 10 085 |
| Métaux | 22,72 | 500,00 | 11 362 |
| Verre | 165,15 | 50,00 | 8 257 |
| Sacs recyclables | 5,14 | 0,00 | 0 |
| Refus de tri | 60,28 | 0,00 | 0 |
| Totaux | 428,34 | 53,85 | 23 068 |
nb : les prix de revente sont ceux indiqués par la Halte Atelier au premier trimestre de 1993
*: prix moyen pour les différents matériaux
Tableau IX
Recettes liées au soutien financier d'Eco-Emballages.
| Matériaux | soutien ECO-EMBALLAGES en Francs/Tonne | Quantité Tonnes | Recettes en F |
|---|---|---|---|
| Verre | 150 | 255,15 | 38 272 |
| Plastique-PVC | 1 500 | 22,41 | 33 615 |
| Acier | 350 | 22,72 | 7 982 |
| Papiers ‑ cartons | 750 | 43,50 | 32 663 |
| Total | 343,78 | 112 502 |
de leur côté pratique. Cependant, ce type de récipient ne fait pas l'unanimité en ce qui concerne ses capacités de stockage ; 45 % des personnes interrogées signalant que son volume est insuffisant, ce qui peut constituer un facteur limitant à la quantité de déchets pouvant être collectés. Les sacs étant distribués un par un lors du ramassage par les suiveurs, ils seront donc dorénavant distribués par rouleaux de 20.
Les matériaux triés
Dans 85 % des cas, la population a bien assimilé les gestes du tri à la source ; cependant, on note certaines hésitations au niveau de quelques produits constitués de plusieurs matériaux : c’est le cas des boîtes de lait, des bombes aérosols, des piles...
On peut noter qu’un peu plus de 30 % des gens souhaiteraient étendre ce tri à d'autres matériaux et principalement aux fermentescibles et 55 % des personnes interrogées seraient même prêtes à accepter un troisième sac pour les stocker. Ce pourcentage est assez élevé si l'on considère que bon nombre d’habitants d’habitations individuelles ou de fermes utilisent ces déchets pour réaliser du compost ou pour nourrir les bêtes.
Au niveau du type de matériau trié, ce sont essentiellement les plastiques (38,9 % des cas) et le verre (37,4 %) qui sont séparés prioritairement du reste des ordures ménagères. La fréquentation des conteneurs à verre reste toujours importante (47 % des cas) et ce type de collecte sélective est complémentaire à la collecte en porte-à-porte.
Les papiers-cartons, triés prioritairement dans 15,2 % des cas, et les ferrailles citées à 5,6 %, font l'objet d’un tri moins poussé ; plusieurs observations peuvent être formulées à ce sujet :
- les usagers ne savent pas quel type de ferraille trier,
- les ferrailles présentent trop de contraintes de nettoyage notamment pour les boîtes de conserve,
- les papiers et les cartons peuvent être brûlés.
Perception de l’opération
Parmi l'ensemble des moyens de communication engagés dans la mise en place de cette expérience-pilote de collecte sélective, c’est la lettre adressée par le SIVOM qui a été, dans 84 % des cas, la plus déterminante pour le démarrage de l'opération. Elle a entre autres permis de préciser la nature des matériaux faisant l'objet du tri.
Informer la population sur la collecte est une étape importante et indispensable afin de motiver les habitants pour y participer ; aussi, en plus des informations complémentaires sur les consignes de tri, les personnes sondées souhaitent un suivi de l'opération : elles désirent être informées de manière régulière sur les résultats de l'opération et sur le devenir des matériaux triés. Les usagers sont prêts à participer à des projets d'intérêt collectif dans la mesure où l’efficacité du tri à la source pour l'élimination des déchets peut leur être prouvée et où ils sont réellement associés à l’opération.
Conclusion
L'opération de collecte sélective mise en place sur le SIVOM du Neubourg a permis de recueillir des données sur le rendement de la collecte et sur la participation des usagers au tri à la source en milieu rural et ainsi de dégager quelques enseignements pour la mise en place de futures opérations.
Le taux de récupération de la fraction recyclable représente 16 % des ordures ménagères brutes. Les quantités récupérées sont constantes sur l'ensemble de l'opération. Il n’y a donc pas eu d'effet de lassitude de la part des participants, malgré un effort de communication assez faible de la part du SIVOM.
Le taux de récupération s'avère cependant relativement faible : il faut tenir compte de la ruralité du SIVOM du Neubourg, les taux de récupération étant plus faibles en milieu rural. Quelques améliorations peuvent être apportées à l’opération : elles reposent sur une meilleure distribution de sacs de capacité suffisante, sur une information (nécessaire) régulière et complète de ses résultats (tonnages récupérés, matières recyclées, économies sur l’élimination...) auprès de la population et sur le développement de l’apport volontaire en conteneurs, complémentaire de la collecte sélective en porte-à-porte.
L’enquête sociologique a mis en évidence les préoccupations des usagers face aux problèmes d’environnement et de déchets : 90 % des personnes interrogées ont participé à l’opération de collecte sélective et sont prêtes à poursuivre leurs efforts et changer leur comportement s’il permet une meilleure gestion des déchets.
La collecte sélective en porte-à-porte a détourné du flux traditionnel d’élimination près de 370 tonnes de déchets ménagers dans l'année tout en responsabilisant les usagers et en les sensibilisant aux problèmes d’environnement.
Le bilan financier de l'opération indique la nécessité d’optimiser la collecte et le tri. Il s’agissait d'une opération montée avec les moyens du moment représentatifs d’une organisation en rodage.
L’investissement prévu pour moderniser la chaîne de tri permettra de réduire les coûts et de se rapprocher des estimations établies par le Plan Départemental d'Élimination des Déchets Ménagers (812 F/tonne ou 36,8 F/hab/an) sur cette filière.
Ce type de collecte est assez bien adapté au milieu rural (une seule collecte supplémentaire suffit) et le tri à la source est relativement simple. De plus, le tri de second rang permet d’avoir l’assurance d'un produit de bonne qualité pour la valorisation ou le recyclage. Cependant les matériaux collectés sont souillés par les débris de verre. C’est pourquoi, il est préférable de collecter le verre à part lors d'un ramassage spécial. Cette collecte peut soit remplacer une fois par mois la collecte des autres matériaux, soit être réalisée avec les autres matériaux dans une benne à deux compartiments.
Le type de collecte sélective mis en œuvre au Neubourg est le même que celui existant déjà à Dunkerque : collecte multi-matériaux suivie d'une séparation des produits dans un centre de tri. Plusieurs systèmes de collecte et de tri sont actuellement testés en France. Nous citerons le cas du SIVOM de l'Agglomération Rouennaise (Plan Jeter Utile) qui expérimente la collecte sélective sur différents types d’habitats : pavillonnaire, centre-ville, petit collectif, grand collectif. Il n'y a donc pas de système unique de collecte sélective, mais au contraire de multiples qu’il faut adapter en fonction de l'habitat, du matériel de pré-collecte (sac ou bac), de la fréquence de la collecte, des matériels de collecte, de l’existence d'un centre de tri, de l’existence de débouchés pour les matériaux collectés...
La collecte sélective est aujourd'hui une nécessité. La population est prête à participer à ce genre d’opération, même en milieu rural, à condition qu'elle soit bien informée. Il reste aux élus à s’engager dans cette voie en sachant que le temps n’est plus au gaspillage, que l’époque du “tout en décharge” ou du “tout en incinération” est révolue...
(2) Est ajouté au gisement du verre collecté en porte-à-porte celui collecté en apport volontaire dans des conteneurs, soit 90 tonnes par an.

