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Ventilation et désodorisation : des stratégies combinées pour des besoins spécifiques

30 mai 2012 Paru dans le N°352 à la page 42 ( mots)
Rédigé par : Françoise ROUSSEILLE

Les moyens mis en oeuvre pour le traitement des odeurs d'une station d'épuration dépendent conjointement des besoins en ventilation des locaux et des ouvrages et de l'efficience de la désodorisation pour répondre aux exigences de qualité de l'air au sein de la station et dans son environnement. La stratégie retenue doit répondre aux spécificités des sites, avec des choix technologiques adaptés selon les émissions de polluants différentes selon les pays. Grâce à ses bases de données d'émissions et à son panel technologique de solutions de désodorisation, Degrémont optimise la conception du traitement de l'air des stations à travers le monde.

Grâce à ses bases de données d’émissions et à son panel technologique de solutions de désodorisation, Degrémont optimise la conception du traitement de l’air des stations à travers le monde.

Depuis de nombreuses années, Degrémont s’investit dans la construction et l’exploitation de stations en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Dans ces régions, la concomitance « température + long temps de séjour dans le réseau » conduit à la formation de grandes quantités de sulfures pouvant atteindre 35 à 40 mg/L à l'origine de fortes émissions d’hydrogène sulfuré (H₂S). En France, la concentration en sulfures de l'eau brute est bien plus faible, et rarement supérieure à 3 mg/L. De telles différences de concentrations en sulfures dans l'eau, et donc d’émissions d'odeurs, nécessitent des stratégies particulières de ventilation ayant pour objectif de maîtriser les zones à fortes concentrations en H₂S afin d’assurer la sécurité du personnel. Associées à cette ventilation, des stratégies de traitement de l’air sont mises en œuvre pour, d’une part réduire au maximum l'impact olfactif de la station sur son environnement, et d’autre part optimiser les coûts d’exploitation. L’interdépendance ventilation/désodorisation a conduit Degrémont à développer des outils d'aide à la décision et des procédés adaptés à des besoins spécifiques.

Des outils d’aide à la décision associés à des procédés adaptés

En France, les ouvrages de traitement de l'eau brute et de boue sont généralement mis en place dans des bâtiments qui sont ventilés et désodorisés. Degrémont calcule, ouvrage par ouvrage, la ventilation nécessaire selon les préconisations INRS

[Photo : Tours de lavage physico-chimique Azurair™ C.]

partir de sa propre base d’émissions de polluants odorants réactualisée annuellement. Pour réduire le débit total d’air extrait, la tendance actuelle est à un confinement de tout ou partie des ouvrages avec une ventilation par captage à la source associée à une ventilation des locaux par dilution. Cette optimisation assure une ambiance saine et le respect de la Valeur Moyenne d’Exposition des principaux polluants dans les locaux. Les débits d’air générés sont souvent élevés avec de faibles concentrations en polluants. Ainsi, la station de Cahors (46 - France) – 15000 m³/j d’eaux usées en moyenne – est ventilée jusqu’à 33500 m³/h avec une concentration de design en H₂S de 5 mg/m³.

Le traitement de cette pollution est réalisé par voie physico-chimique sur des tours de lavage en série. Cette technologie est la plus utilisée en France car elle assure une réponse instantanée à toute variation de la pollution et permet d’éliminer de manière très efficace les composés azotés et les composés soufrés majoritairement émis. Grâce à son procédé de lavage physico-chimique Azurair™ C, Degrémont est en mesure d’assurer des concentrations en sortie en H₂S inférieures à 0,01 mg/Nm³. Des traitements aussi performants sont installés, en France, sur les stations de La Morée (93 - France) et d’Achères (78 - France) gérées par le SIAAP (Syndicat Interdépartemental pour l’Assainissement de l’Agglomération Parisienne).

Toutefois, Degrémont recherche toujours la meilleure combinaison ventilation/désodorisation pour répondre à des problématiques spécifiques au cas par cas. À titre d'exemple, lors de la réhabilitation de la station de Pleucadeuc (56 - France) – 52000 EH – de fortes émissions en H₂S ont été mesurées au niveau des ouvrages de prétraitement. Plutôt que de proposer uniquement du lavage physico-chimique Azurair™ C, une solution mixte couplant traitement biologique sur média inorganique et tours de lavage en finition a été privilégiée. La biofiltration sur média inorganique présente l'avantage de ne pas utiliser de réactifs chimiques, ce sont des bactéries qui dégradent naturellement les polluants atmosphériques, tout en proposant des solutions compactes. Avec ce procédé Azurair™ B, la biofiltration utilisée en tant que prétraitement des composés soufrés présente de nombreux avantages comme la réduction de consommation de produits chimiques des tours de finition Azurair™ C ou l'allongement de la durée de vie du charbon actif dans les tours de finition par adsorption. Ainsi, grâce au couplage en série des deux procédés Azurair™ B et Azurair™ C, la consommation en eau de javel sur la station de Pleucadeuc a été réduite d’un facteur 6 tout en améliorant le traitement des odeurs.

[Encart : Azurair™ B-Twin : une épuration poussée de l’hydrogène sulfuré et des mercaptans Ces dernières années, Degrémont a choisi de porter ses efforts d'innovation sur l'accroissement de sa gamme de procédés de biofiltration sur média inorganique. Avec une empreinte environnementale et des coûts d'exploitation réduits, cette technologie répond aux attentes des collectivités en matière de développement durable. Dans cet objectif, Degrémont vient de lancer sur le marché un nouvel équipement permettant une épuration poussée pour le traitement des polluants soufrés que sont l’hydrogène sulfuré et les mercaptans pour les petites et moyennes installations, l’Azurair™ B-Twin. Cette innovation vient d’être mise en œuvre sur la station de Chevrières-Grandfresnoy (60 - France) pour éliminer plus de 94 % d’hydrogène sulfuré et des mercaptans.]

Développer des stratégies spécifiques

Ces exemples de stratégies de traitement de l'air trouvent cependant vite leur limite sur les stations d’eaux usées du Moyen-Orient où la température de l’air peut dépasser en été les 50 °C à l’ombre.

La station d’As Samra en Jordanie émettait environ 6 kg/h d’H₂S pour une concentration moyenne en sulfures dans l'eau de 9 mg/L lors d’une campagne de mesures en 2008. Le traitement de ce polluant par lavage physico-chimique seul entraînerait une consommation d'eau de javel de 8 m³/jour. Les coûts d’exploitation s’élèveraient alors à plus de 600000 € par an.

Pour les stations de cette région, il faut donc trouver d'autres stratégies de ventilation.

[Photo : Traitement des odeurs sur la station de Pleucadeuc (56 – France) par biofiltration Azurair™ B et tour de lavage Azurair™ C.]

France

Moyen-Orient

  • Dessableur/dégraisseur
  • Bassins biologiques zone non aérée
  • Épaississeur boues primaires
[Photo : Graphique 1 : Comparaison France et Moyen-Orient pour l’émission surfacique d’hydrogène sulfuré de certains ouvrages.]

tion des ouvrages et de désodorisation de l’H₂S qui y est très majoritairement présent. La première étape consiste à déterminer à l’avance quels seront les ouvrages les plus émissifs et à quantifier leurs flux d’H₂S. Cette étape est la plus complexe dans une approche de conception car la transposition de données européennes au prorata de la concentration en sulfures dans l’eau ne va pas de soi. Des études sur le terrain ont été menées par les équipes de la Direction Technologie et Innovation de Degrémont sur les stations de Doha West au Qatar et d’As Samra en Jordanie pour évaluer les émissions des principaux ouvrages et mettre en avant la différence avec des émissions mesurées en France. Les exemples présentés dans le graphique 1 montrent de fortes disparités d’émissions en H₂S avec un facteur d’émission allant de 6 jusqu’à 25 fois plus important selon les ouvrages. Ces fortes émissions doivent faire l’objet d’une attention particulière pour la mise en œuvre de la ventilation car les concentrations en H₂S peuvent atteindre des valeurs dangereuses.

Elles ne peuvent pas être traitées sur la base d’une ventilation d’ambiance comme en France car cela engendrerait des débits d’air gigantesques impossibles à associer à un traitement d’air. Une toute autre approche est alors nécessaire.

Pour s’adapter à ce contexte, Degrémont a élaboré une nouvelle stratégie de ventilation avec :

  • • le confinement de tous les ouvrages fortement émissifs d’H₂S, en particulier les ouvrages de prétraitement et de traitement des boues primaires,
  • • l’isolation du « ciel gazeux » de chaque déversoir,
  • • la protection renforcée du béton adaptée à de fortes teneurs en H₂S pour garantir la pérennité des ouvrages,
  • • des points d’extraction d’air adaptés à la configuration de l’ouvrage et au type de couverture pour assurer une dépression et éviter toute fuite d’air fortement chargé en H₂S.

Cette stratégie exclut toute ventilation des locaux par dilution. Pour la sécurité des opérateurs, la ventilation des ouvrages émissifs est assurée uniquement par captage à la source. Les locaux sont alors ventilés sur la base d’un taux horaire de renouvellement de l’air.

Cette nouvelle stratégie de ventilation a conduit à une approche innovante de la désodorisation pour traiter les sources fortement chargées en H₂S. Ainsi une technologie de biofiltration de dernière génération a été installée sur le site d’As Samra où elle fonctionne depuis plus de 5 ans. Il s’agit de biofiltres à ruissellement sur garnissage synthétique. Grâce à ce média breveté et à une humidification séquentielle sur deux niveaux, l’élimination théorique d’H₂S par m³ de média est jusqu’à 10 fois supérieure à celle obtenue dans un biofiltre conventionnel.

Les mesures réalisées en 2008 après mise en œuvre de cette technologie (voir tableau 1) montrent une excellente élimination de l’H₂S à plus de 99 % grâce à cette technologie. Par contre, l’élimination des autres composés soufrés tels que le méthylmercaptan est faible. Il apparaît également que des processus de transformation biologique génèrent des composés tels que l’éthylmercaptan.

[Photo : Salle de prétraitement de la station de Doha West (Qatar).]
[Photo : Couverture souple sur les déversoirs des décanteurs primaires de la station d’As Samra (Jordanie).]
[Photo : Biofiltres ruisselants de la station d’As Samra (Jordanie).]

Tableau 1 : mesures de performances sur les biofiltres ruisselants d’As Samra (Jordanie).

Polluants H₂S Méthylmercaptan Éthylmercaptan
Entrée (mg/m³) 225 5,3 < 0,1
Sortie (mg/m³) < 0,15 4,2 0,18
Efficacité d’élimination (%) > 99 21 Faible production

Ces biofiltres à haute performance sur l’H₂S ont ouvert la voie au développement d’un autre procédé par Degrémont : l’Azurair™ Boost.

L’air issu de la ventilation des zones de prétraitement et des boues primaires est traité au travers des biofiltres haute performance pour éliminer 99 % de l’H₂S. Une ou plusieurs tours de lavage physico-chimique Azurair™ C sont placées en aval des biofiltres pour, d’une part, achever le traitement des composés soufrés résiduels issus des biofiltres, et d’autre part, traiter l’air à faible concentration en H₂S issu de la ventilation des bâtiments d’exploitation et des ouvrages peu émissifs. Il en découle une très forte réduction de la consommation en eau de javel. Selon la charge d’H₂S éliminée par l’Azurair™ Boost, le retour sur investissement peut être inférieur à deux ans grâce à l’économie réalisée sur les réactifs.

Le développement de nouveaux procédés comme l’Azurair™ Boost, et plus récemment de l’Azurair™ B-Twin, illustre la volonté de Degrémont de proposer des réponses originales pour optimiser des dimensionnements combinés de ventilation et de désodorisation.

Cette approche est réalisée en portant les efforts sur deux axes principaux. Le premier concerne la mise à jour et l’enrichissement de bases de données d’émissions de polluants odorants grâce à la réalisation de campagnes de mesures régulières. La seconde porte sur l’innovation en matière de traitement des odeurs pour proposer un large panel de technologies répondant aux exigences des clients en termes de performances et de réduction des coûts, notamment d’exploitation. Enfin, l’élaboration de guides de ventilation et de désodorisation permet d’optimiser l’interdépendance de ces deux problématiques pour répondre aux cas spécifiques de chaque station.

[Photo : Azurair™ Boost.]
Modèle Procédé Composés traités Taille de stations
Azurair™ B Biologique (faibles et moyennes concentrations) H₂S < 100 000 EH
Azurair™ B-Twin Biologique en 2 étages H₂S et mercaptans ≈ 200 000 EH
Azurair™ Boost Pré-traitement biologique + finition physico-chimique H₂S (fortes concentrations) > 250 000 EH
Azurair™ C Physico-chimique Composés soufrés et azotés > 150 000 EH
[Photo : Graphique 2 : Positionnement des Azurair™.]
[Photo : Graphique 3 : Cartographie des Azurair™ pour le traitement des composés soufrés.]

Conclusion

Les exemples de Cahors, Pleucadeuc et d’As Samra sont une illustration du panel technologique de Degrémont en matière de traitement des odeurs au travers de ses procédés Azurair™.

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